Les raisons de l'hostilité du CPL à l'égard de Joseph Aoun
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Il est désormais évident que la principale raison de la colère de l’ancien président Michel Aoun à l’égard du commandant en chef de l’armée, Joseph Aoun, réside dans le fait que ce dernier s’est abstenu de réprimer le soulèvement populaire du 17 octobre 2019. L’ancien chef de l’État lui reproche également le fait que les forces de sécurité, en particulier les services de renseignement de l’armée, étaient mal informées des développements dans la rue. Et si elles étaient bien informées alors que le président ne l’était pas, cela soulève bien des questions.
Pour le président Aoun et le Courant patriotique libre, la non-répression des manifestants a été la principale raison de l’échec du mandat Aoun. Ils estiment, en effet, que si l’armée avait bien géré la situation et si les routes n’avaient pas été bloquées, la situation politique et économique ne se serait pas détériorée. De ce fait, l’ancien président de la République et le chef du CPL, le député Gebran Bassil, ne pardonnent pas ce qu’ils qualifient «d’erreur fatale» commise par le commandant en chef de l’armée, et c’est la raison pour laquelle ils ne le soutiendront pas pour la présidence de la République. Un député du CPL a déclaré à cet égard: «Pourquoi essayez-vous de nous convaincre alors que nous voulons rester en dehors d’une telle entente? Vous avez suffisamment de députés pour porter le commandant en chef de l’armée à la présidence. Nous serons, pour notre part, dans l’opposition.»
L’argument du président Aoun et du CPL contre le chef de l’armée est en contradiction avec ce qu’ils ont toujours prôné concernant les manifestations qu’ils organisaient eux-mêmes. Le 14 mars 2005, le président Aoun aurait-il toléré que le commandant en chef de l’armée, à l’époque le général Michel Sleiman, réprime les manifestants?
Lorsque le président Aoun était à la tête du Courant patriotique libre, n’avait-il pas mis en garde le général Jean Kahwaji, commandant en chef de l’armée, contre toute répression des manifestants du CPL et leur interdiction de brûler des pneus et de bloquer les routes? L’armée aurait-elle dû démanteler les tentes du CPL et du Hezbollah plantées en plein centre-ville de Beyrouth sous le gouvernement du Premier ministre Fouad Siniora? Par ailleurs, est-il concevable que Michel Aoun compare l’attaque en règle menée par le Hezbollah le 7 mai 2008 aux manifestations du 17 octobre?

Évidemment, le président Aoun ne tolérait aucune manifestation ou mouvement d’opinion dirigé contre lui. Depuis son accession au pouvoir en 1988, il a constamment été en conflit permanent avec les médias et les journalistes ainsi qu’avec ses opposants, à qui il refuse ce qu’il se permet, lui.
Le 17 octobre 2019, il était inconcevable que le commandant en chef de l’armée réprime les mouvements populaires. Il n’en demeure pas moins qu’à l’époque, l’armée n’est pas restée les bras croisés et a empêché les attaques contre les institutions privées et publiques, ainsi que les administrations de l’État, ce qui a déclenché des incidents dès le premier jour avec les manifestants. Cela dit, l’armée devait-elle tuer ses propres citoyens? A-t-on cherché à savoir pourquoi certains militaires ont pleuré lorsqu'ils se sont retrouvés face aux manifestants?
Dans ce contexte, des politiciens favorables au commandant en chef de l’armée soulignent que «l’ancien président et le CPL souhaitaient peut-être que l’armée se transforme en milice, exécutant des ordres personnels à des fins personnelles, comme cela s’est produit de 1988 à 1990, ce que, bien sûr, le général Joseph Aoun n’acceptera jamais.»
En effet, ce n’est pas la décision de ne pas réprimer les manifestants qui a conduit le pays à son état actuel, mais plutôt les politiques de l’exécutif, en particulier après le 17 octobre 2019.
C’est bien le pouvoir exécutif qui a pris la décision de ne pas payer les Eurobonds en 2020, et le président Aoun et le Courant patriotique libre étaient précisément représentés à l’époque au gouvernement.  C’est ce même pouvoir exécutif, et non l’armée et son commandement, qui a dilapidé des milliards de dollars en subventions de marchandises acheminées illégalement vers la Syrie. De même, ce n’est ni l’armée ni son commandant qui ont entravé les réformes et l’adoption des lois pour mettre en application ces réformes, mais plutôt l’exécutif en collaboration avec le législatif. Enfin, ce n’est ni l’armée ni son commandant qui ont entravé, et qui entravent toujours, l’élection présidentielle, mais les forces politiques de l’axe obstructionniste, en particulier le Courant patriotique libre et son allié, le Hezbollah.
Ce sont là des faits établis. En réalité, certains ne veulent pas voir les autres réussir là où ils ont échoué.
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