- Accueil
- Guerre au Moyen-Orient
- L’éditorial – Crise du P.O. : Entre pragmatisme et stratégie de l’irrationnel
Cette nouvelle guerre lancée par le Hamas contre Israël pourrait bien constituer (le conditionnel est de mise…) un tournant dans la longue et interminable crise du Proche-Orient. Elle met surtout en relief, dans la violence et dans le sang, une fâcheuse caractéristique de ce vieux conflit régional: le règne de l’irrationnel, de la démesure, qui a marqué de sa sinistre empreinte, pendant des années et jusqu’à nos jours, les développements sur le terrain.
Au début des années 1990, pourtant, les événements semblaient avoir pris un nouveau cours, ouvrant la voie à de réelles perspectives de paix. En janvier 1993, une poignée de hauts responsables israéliens et palestiniens entamaient en effet à Oslo, dans le plus grand secret, des discussions étalées sur une longue période afin de jeter les bases d’une solution durable au conflit proche-oriental. Seul un nombre très restreint de hauts dirigeants des deux bords étaient discrètement au courant de cette initiative, qu’ils avaient évidemment avalisée et qui avait donné le coup d’envoi à ce qui sera appelé «le processus d’Oslo», parrainé au départ par un diplomate norvégien de renom, Terje Roed-Larsen.
En faisant ainsi le très audacieux pari de s’engager sur la voie de pourparlers directs, en face à face – ce qui brisait de très vieux tabous que nul n’avait osé surmonter auparavant – les négociateurs israéliens et palestiniens manifestaient un indéniable pragmatisme et un courage politique qui dénotaient avec le climat obstructionniste et dogmatique imposé à la région depuis des décennies.
Reflétant ce pragmatisme avant-gardiste et une détermination à dépasser les barrières psychologiques pour effectuer des pas de géant vers «l’autre», les participants à ces rencontres ont pris soin de consacrer les deux ou trois premiers jours de leur cohabitation, dans une confortable résidence à la périphérie d’Oslo, à l’édification d’une atmosphère de confiance mutuelle. Promenades conjointes dans le jardin de la résidence, repas pris en commun, soirées conviviales et échanges sur des sujets d’ordre général ont permis aux négociateurs de briser la glace et de mieux se connaître.
La phase de construction de la confiance étant ainsi franchie, les pourparlers pouvaient être entamés. Ils devaient aboutir à l’élaboration d’un mécanisme de paix – le processus d’Oslo – étalé sur plusieurs années. La signature des accords d’Oslo aura lieu le 13 septembre 1993 à la Maison-Blanche au cours d’une cérémonie historique, marquée par une non moins historique poignée de main entre le Premier ministre israélien Yitzhak Rabin et le leader de l’OLP Yasser Arafat, en présence du président Bill Clinton.
Il s’agissait de la première initiative pragmatique sur la voie du règlement d’un conflit remontant à sept décennies. Sauf que les tenants de la politique de l’irrationnel et de la démesure ont vite fait de passer à l’action pour tenter de saboter cette dynamique de paix. Aussi bien le Hamas – encore lui – que l’extrême droite israélienne ont ainsi fait feu de tout bois… En 1994, un extrémiste israélien devait tuer une trentaine de fidèles palestiniens à la mosquée Abraham d’Hébron, dans le but évident d’enclencher une montée aux extrêmes. Effectivement, le Hamas organisa sans tarder des attentats-suicides en 1994 et 1995 à Tel-Aviv et Jérusalem. Et en novembre 1995, un jeune Israélien d’extrême droite devait assassiner Yitzhak Rabin, qui était la principale personnalité israélienne bénéficiant de suffisamment de légitimité et de crédibilité pour obtenir la mise en application des accords d’Oslo. Parallèlement, la politique des gouvernements israéliens de droite n’a pas aidé la population palestinienne à adhérer activement à la dynamique de paix.
Depuis, le Proche-Orient et le Liban sont déchirés entre deux courants qui sont l’antithèse l’un de l’autre: le premier, pragmatique, cherche à mettre fin à des décennies de gesticulations guerrières et de conflits stériles pour instaurer une paix durable, source de prospérité et de bien-être; le second courant applique sans relâche une stratégie de l’irrationnel et veut maintenir un climat de conflit perpétuel et de guerre permanente. Un tel clivage explique le bras de fer qui oppose au Liban le Hezbollah au courant souverainiste. Il permet aussi de comprendre pourquoi la Cisjordanie, gouvernée par le Fateh, ne subit pas aujourd’hui le même sort que Gaza.
Particulièrement significatifs sur ce plan sont les propos du président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas (qui avait participé aux pourparlers d’Oslo) qui plus d’une fois a souligné ces derniers jours son attachement à «une solution politique» et à une «résistance pacifique», allant même jusqu’à affirmer que les actions du Hamas ne reflètent pas la volonté du peuple palestinien.
La guerre en cours à Gaza constitue la dernière illustration de cette politique de l’irrationnel: le Hamas a lancé une attaque contre Israël dont le seul gagnant, au stade actuel, est l’Iran, et le perdant n’est autre que le Hamas lui-même qui a perdu dans cette bataille plusieurs de ses hauts responsables ainsi que près de 1500 miliciens tués après l’infiltration en territoire israélien, sans compter les Libanais qui ont perdu inutilement leur vie sur l’autel de la Raison d’État iranienne. Mais le plus grand perdant reste la population palestinienne qui fait les frais, elle seule, de la destruction à grande échelle de la bande de Gaza, si bien que l’on se demande ce que les Palestiniens ont gagné en définitive de cette attaque lancée le 7 octobre par le Hamas.
À l’aune des développements qui se précipitent aussi bien à Gaza qu’au Liban-Sud, on ne peut s’empêcher aujourd’hui de poser la question de savoir jusqu’où cette stratégie de l’irrationnel et de la démesure peut encore aller… Et surtout jusqu’à quand.
Au début des années 1990, pourtant, les événements semblaient avoir pris un nouveau cours, ouvrant la voie à de réelles perspectives de paix. En janvier 1993, une poignée de hauts responsables israéliens et palestiniens entamaient en effet à Oslo, dans le plus grand secret, des discussions étalées sur une longue période afin de jeter les bases d’une solution durable au conflit proche-oriental. Seul un nombre très restreint de hauts dirigeants des deux bords étaient discrètement au courant de cette initiative, qu’ils avaient évidemment avalisée et qui avait donné le coup d’envoi à ce qui sera appelé «le processus d’Oslo», parrainé au départ par un diplomate norvégien de renom, Terje Roed-Larsen.
En faisant ainsi le très audacieux pari de s’engager sur la voie de pourparlers directs, en face à face – ce qui brisait de très vieux tabous que nul n’avait osé surmonter auparavant – les négociateurs israéliens et palestiniens manifestaient un indéniable pragmatisme et un courage politique qui dénotaient avec le climat obstructionniste et dogmatique imposé à la région depuis des décennies.
Reflétant ce pragmatisme avant-gardiste et une détermination à dépasser les barrières psychologiques pour effectuer des pas de géant vers «l’autre», les participants à ces rencontres ont pris soin de consacrer les deux ou trois premiers jours de leur cohabitation, dans une confortable résidence à la périphérie d’Oslo, à l’édification d’une atmosphère de confiance mutuelle. Promenades conjointes dans le jardin de la résidence, repas pris en commun, soirées conviviales et échanges sur des sujets d’ordre général ont permis aux négociateurs de briser la glace et de mieux se connaître.
La phase de construction de la confiance étant ainsi franchie, les pourparlers pouvaient être entamés. Ils devaient aboutir à l’élaboration d’un mécanisme de paix – le processus d’Oslo – étalé sur plusieurs années. La signature des accords d’Oslo aura lieu le 13 septembre 1993 à la Maison-Blanche au cours d’une cérémonie historique, marquée par une non moins historique poignée de main entre le Premier ministre israélien Yitzhak Rabin et le leader de l’OLP Yasser Arafat, en présence du président Bill Clinton.
Il s’agissait de la première initiative pragmatique sur la voie du règlement d’un conflit remontant à sept décennies. Sauf que les tenants de la politique de l’irrationnel et de la démesure ont vite fait de passer à l’action pour tenter de saboter cette dynamique de paix. Aussi bien le Hamas – encore lui – que l’extrême droite israélienne ont ainsi fait feu de tout bois… En 1994, un extrémiste israélien devait tuer une trentaine de fidèles palestiniens à la mosquée Abraham d’Hébron, dans le but évident d’enclencher une montée aux extrêmes. Effectivement, le Hamas organisa sans tarder des attentats-suicides en 1994 et 1995 à Tel-Aviv et Jérusalem. Et en novembre 1995, un jeune Israélien d’extrême droite devait assassiner Yitzhak Rabin, qui était la principale personnalité israélienne bénéficiant de suffisamment de légitimité et de crédibilité pour obtenir la mise en application des accords d’Oslo. Parallèlement, la politique des gouvernements israéliens de droite n’a pas aidé la population palestinienne à adhérer activement à la dynamique de paix.
Depuis, le Proche-Orient et le Liban sont déchirés entre deux courants qui sont l’antithèse l’un de l’autre: le premier, pragmatique, cherche à mettre fin à des décennies de gesticulations guerrières et de conflits stériles pour instaurer une paix durable, source de prospérité et de bien-être; le second courant applique sans relâche une stratégie de l’irrationnel et veut maintenir un climat de conflit perpétuel et de guerre permanente. Un tel clivage explique le bras de fer qui oppose au Liban le Hezbollah au courant souverainiste. Il permet aussi de comprendre pourquoi la Cisjordanie, gouvernée par le Fateh, ne subit pas aujourd’hui le même sort que Gaza.
Particulièrement significatifs sur ce plan sont les propos du président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas (qui avait participé aux pourparlers d’Oslo) qui plus d’une fois a souligné ces derniers jours son attachement à «une solution politique» et à une «résistance pacifique», allant même jusqu’à affirmer que les actions du Hamas ne reflètent pas la volonté du peuple palestinien.
La guerre en cours à Gaza constitue la dernière illustration de cette politique de l’irrationnel: le Hamas a lancé une attaque contre Israël dont le seul gagnant, au stade actuel, est l’Iran, et le perdant n’est autre que le Hamas lui-même qui a perdu dans cette bataille plusieurs de ses hauts responsables ainsi que près de 1500 miliciens tués après l’infiltration en territoire israélien, sans compter les Libanais qui ont perdu inutilement leur vie sur l’autel de la Raison d’État iranienne. Mais le plus grand perdant reste la population palestinienne qui fait les frais, elle seule, de la destruction à grande échelle de la bande de Gaza, si bien que l’on se demande ce que les Palestiniens ont gagné en définitive de cette attaque lancée le 7 octobre par le Hamas.
À l’aune des développements qui se précipitent aussi bien à Gaza qu’au Liban-Sud, on ne peut s’empêcher aujourd’hui de poser la question de savoir jusqu’où cette stratégie de l’irrationnel et de la démesure peut encore aller… Et surtout jusqu’à quand.
Lire aussi
Commentaires