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- Les Houthis et l’Iran: une alliance stratégique de guerre? (1/2)
La guerre de Gaza a remis, sur le devant de la scène, un groupe armé yéménite, les Houthis, qui s’attaque actuellement à l’État hébreu et aux intérêts stratégiques d’Israël et des États-Unis dans la mer Rouge. Qui sont donc ces Houthis? Quels liens ont-ils avec l’Iran?
Apparus en 1992 et connus sous le nom de Houthis en référence à leur guide spirituel Hussein Badreddine el-Houthi, ils ont mené plusieurs guerres contre le régime du président Ali Abdallah Saleh de 2004 à 2010 depuis leur fief de Saada au nord du Yémen. M. Saleh, obligé de quitter le pouvoir en 2012, devient leur allié principal en 2014 quand ils prennent la capitale Sanaa et dissolvent le Parlement.
(Photo by MOHAMMED HUWAIS / AFP)
À la différence du réseau iranien dans la région (le Hezbollah ou le Hachd el-Chaabi irakien), le leadership houthi présente une connotation familiale unique (la famille El-Houthi). Les Houthis ont un statut socioreligieux et une légitimité découlant de leur filiation à la famille du Prophète (Ahl el-Beit). Ce statut leur a permis d’obtenir le soutien des principales tribus du nord. De ce fait, ils ont pu limiter l’association des tribus avec l’ancien président Ali Abdallah Saleh et de gouverner en tant qu’autorité alternative pendant des années.
À partir de 2015, l’Arabie saoudite, à la tête d’une coalition de plusieurs pays arabes, intervient au Yémen, l’objectif étant le rétablissement de la souveraineté du gouvernement et le démantèlement des Houthis. Par ailleurs, les Saoudiens mettent un blocus autour du Yémen afin d’empêcher l’Iran de ravitailler les Houthis en armes.
(Photo by MOHAMMED HUWAIS / AFP)
L’affinité idéologique entre l’Iran et les Houthis
Les Houthis sont un clan originaire du nord-ouest du Yémen. Ils pratiquent le chiisme zaydite. D’après le think tank Wilson Center, le Yémen a été gouverné par un imam zaydite pendant 1.000 ans avant d’être renversé en 1962. Depuis lors, les Zaydites luttent pour restaurer leur autorité et influence au Yémen. Selon l’Institut néerlandais des relations internationales (Clingedael), le clan houthi, dans les années 1980, se sentant menacé par les prédicateurs salafistes financés par l’État et établis dans ses régions, lance un mouvement faisant revivre ses traditions. Toutefois, tous les Zaydistes ne s’alignent pas sur le mouvement houthi. Leur slogan est une claire itération de la propagande de la République islamique s’opposant farouchement aux États-Unis et à Israël. D’ailleurs, Badreddine el-Houthi a étudié en Iran dans les années 1980.
Ils sont en conflit avec le gouvernement du Yémen depuis plus de 10 ans. Depuis 2011, leur mouvement devient plus large et s’oppose au gouvernement central. Ils commencent à s’autodésigner «Ansarullah» (littéralement partisans de Dieu).
L’affinité idéologique entre l’Iran et les Houthis, en ce qui concerne les aspects religieux de l’idéologie, est relativement faible puisque les chiites iraniens suivent le chiisme duodécimain alors que les Houthis suivent le courant zaydite, deux courants du chiisme fondés sur des conceptions différentes.
Après l’unification du Yémen en 1990, le pays est devenu majoritairement sunnite. De là où ils étaient majoritaires, les Zaydites ne représentent plus que 35% de la population, les poussant à s’engager sur la voie de l’indépendance. Selon Clingendael, c’est là que les convictions idéologiques renvoient à un sentiment d’appartenance à un chiisme transnational qui promeut une action militante contre l’oppression – réelle ou perçue comme telle. Les Houthis déclarent partager un récit idéologique avec les autres populations chiites du Moyen-Orient, nourri par l’Iran, indépendamment des différences de doctrine. Et c’est de là que naît l’affiliation avec «l’axe de la résistance».
Le parrainage du Hezbollah
Selon Eleonora Ardemagni de l’Institut italien des études politiques internationales, l’Iran, à travers le Hezbollah, a apporté un parrainage certain au groupe yéménite en matière de formation militaire et en améliorant les opérations de missiles guidés.
Les Houthis profèrent une grande ressemblance au Hezbollah parce qu’ils sont tous les deux «nés» en tant que mouvements de résistance et qu’ils ont des chefs perçus comme charismatiques. De même, la guerre leur a permis de renforcer leur présence politique et militaire dans la région (guerre de 2006 pour le Hezbollah et intervention arabe de 2015 pour les Houthis).
(Photo by Al-Huthi Group Media Office / AFP)
Le support matériel de l’Iran
Différents sites Web des Nations unies affirment que les Houthis ont commencé à recevoir des armes de l’Iran à partir de 2009. Téhéran leur a fourni un soutien matériel: des armes, du financement et des conseils stratégiques.
En termes guerriers, les Houthis sont passés d’un groupe de guérilla à une force armée plus sophistiquée. Ceci est dû en grande partie au renforcement des relations avec l’Iran. Au cours des années 2000, leur stratégie se base sur le modèle iranien créant des centres d’apprentissage et des camps d’été servant de centres de recrutement.
Selon l’Institut italien pour les études politiques internationales, l’assistance sécuritaire fournie par le Corps des gardiens de la révolution islamique – Force Qods (contrebande d’armes et de munitions, formation militaire) a permis aux Houthis d’améliorer leurs capacités de défense et de développer leurs compétences asymétriques. Ceci leur a permis de créer de nouvelles institutions militaires au Yémen comme le Conseil du jihad. Celui-ci permet aux Houthis de centraliser la prise de décision stratégique tout en intégrant les conseils du Qods et du Hezbollah sur la stratégie militaire et l’armement. L’assistance du réseau iranien a permis aux Houthis de construire leurs propres usines d’armements, notamment des drones.
Au début des années 2000, les Houthis se sont mis à collecter des contributions volontaires de Yéménites fortunés ou des impôts de citoyens ordinaires pour la libération de la Palestine. Une fois emparés de Sanaa en 2011, ils ont également commencé à collecter les revenus des gisements de gaz et de pétrole, à prélever des ressources économiques (taxes, impôts, zakat, khums) et à s’approprier les recettes douanières du port de Hodeïda. On peut donc supposer que les Houthis disposent d’une solide base financière indépendante. Mais ils sont le maillon le plus faible de la chaîne iranienne sur le plan de l’aide sociale. Par exemple, pendant la pandémie de Covid-19, ils n’ont pas été en mesure de contenir la maladie ni de fournir médicaments ou vaccins aux populations sous leur contrôle.
L’affiliation iranienne a aussi contribué à la structuration du réseau des médias houthis. Al-Masirah, leur média officiel, émet à partir de Beyrouth depuis 2012 avec l’assistance technique d’Al-Manar, média du Hezbollah.
L’Iran a joué un rôle plus important après l’intervention de l’Arabie saoudite en 2015 en fournissant de l’armement. Mais l’objectif des Houthis a toujours été de restaurer leur autorité dans le nord du Yémen.
Prochain article: Les Houthis et l’Iran: une alliance stratégique de guerre? (2/2)
Apparus en 1992 et connus sous le nom de Houthis en référence à leur guide spirituel Hussein Badreddine el-Houthi, ils ont mené plusieurs guerres contre le régime du président Ali Abdallah Saleh de 2004 à 2010 depuis leur fief de Saada au nord du Yémen. M. Saleh, obligé de quitter le pouvoir en 2012, devient leur allié principal en 2014 quand ils prennent la capitale Sanaa et dissolvent le Parlement.
(Photo by MOHAMMED HUWAIS / AFP)
À la différence du réseau iranien dans la région (le Hezbollah ou le Hachd el-Chaabi irakien), le leadership houthi présente une connotation familiale unique (la famille El-Houthi). Les Houthis ont un statut socioreligieux et une légitimité découlant de leur filiation à la famille du Prophète (Ahl el-Beit). Ce statut leur a permis d’obtenir le soutien des principales tribus du nord. De ce fait, ils ont pu limiter l’association des tribus avec l’ancien président Ali Abdallah Saleh et de gouverner en tant qu’autorité alternative pendant des années.
À partir de 2015, l’Arabie saoudite, à la tête d’une coalition de plusieurs pays arabes, intervient au Yémen, l’objectif étant le rétablissement de la souveraineté du gouvernement et le démantèlement des Houthis. Par ailleurs, les Saoudiens mettent un blocus autour du Yémen afin d’empêcher l’Iran de ravitailler les Houthis en armes.
(Photo by MOHAMMED HUWAIS / AFP)
L’affinité idéologique entre l’Iran et les Houthis
Les Houthis sont un clan originaire du nord-ouest du Yémen. Ils pratiquent le chiisme zaydite. D’après le think tank Wilson Center, le Yémen a été gouverné par un imam zaydite pendant 1.000 ans avant d’être renversé en 1962. Depuis lors, les Zaydites luttent pour restaurer leur autorité et influence au Yémen. Selon l’Institut néerlandais des relations internationales (Clingedael), le clan houthi, dans les années 1980, se sentant menacé par les prédicateurs salafistes financés par l’État et établis dans ses régions, lance un mouvement faisant revivre ses traditions. Toutefois, tous les Zaydistes ne s’alignent pas sur le mouvement houthi. Leur slogan est une claire itération de la propagande de la République islamique s’opposant farouchement aux États-Unis et à Israël. D’ailleurs, Badreddine el-Houthi a étudié en Iran dans les années 1980.
Ils sont en conflit avec le gouvernement du Yémen depuis plus de 10 ans. Depuis 2011, leur mouvement devient plus large et s’oppose au gouvernement central. Ils commencent à s’autodésigner «Ansarullah» (littéralement partisans de Dieu).
L’affinité idéologique entre l’Iran et les Houthis, en ce qui concerne les aspects religieux de l’idéologie, est relativement faible puisque les chiites iraniens suivent le chiisme duodécimain alors que les Houthis suivent le courant zaydite, deux courants du chiisme fondés sur des conceptions différentes.
Après l’unification du Yémen en 1990, le pays est devenu majoritairement sunnite. De là où ils étaient majoritaires, les Zaydites ne représentent plus que 35% de la population, les poussant à s’engager sur la voie de l’indépendance. Selon Clingendael, c’est là que les convictions idéologiques renvoient à un sentiment d’appartenance à un chiisme transnational qui promeut une action militante contre l’oppression – réelle ou perçue comme telle. Les Houthis déclarent partager un récit idéologique avec les autres populations chiites du Moyen-Orient, nourri par l’Iran, indépendamment des différences de doctrine. Et c’est de là que naît l’affiliation avec «l’axe de la résistance».
Le parrainage du Hezbollah
Selon Eleonora Ardemagni de l’Institut italien des études politiques internationales, l’Iran, à travers le Hezbollah, a apporté un parrainage certain au groupe yéménite en matière de formation militaire et en améliorant les opérations de missiles guidés.
Les Houthis profèrent une grande ressemblance au Hezbollah parce qu’ils sont tous les deux «nés» en tant que mouvements de résistance et qu’ils ont des chefs perçus comme charismatiques. De même, la guerre leur a permis de renforcer leur présence politique et militaire dans la région (guerre de 2006 pour le Hezbollah et intervention arabe de 2015 pour les Houthis).
(Photo by Al-Huthi Group Media Office / AFP)
Le support matériel de l’Iran
Différents sites Web des Nations unies affirment que les Houthis ont commencé à recevoir des armes de l’Iran à partir de 2009. Téhéran leur a fourni un soutien matériel: des armes, du financement et des conseils stratégiques.
En termes guerriers, les Houthis sont passés d’un groupe de guérilla à une force armée plus sophistiquée. Ceci est dû en grande partie au renforcement des relations avec l’Iran. Au cours des années 2000, leur stratégie se base sur le modèle iranien créant des centres d’apprentissage et des camps d’été servant de centres de recrutement.
Selon l’Institut italien pour les études politiques internationales, l’assistance sécuritaire fournie par le Corps des gardiens de la révolution islamique – Force Qods (contrebande d’armes et de munitions, formation militaire) a permis aux Houthis d’améliorer leurs capacités de défense et de développer leurs compétences asymétriques. Ceci leur a permis de créer de nouvelles institutions militaires au Yémen comme le Conseil du jihad. Celui-ci permet aux Houthis de centraliser la prise de décision stratégique tout en intégrant les conseils du Qods et du Hezbollah sur la stratégie militaire et l’armement. L’assistance du réseau iranien a permis aux Houthis de construire leurs propres usines d’armements, notamment des drones.
Au début des années 2000, les Houthis se sont mis à collecter des contributions volontaires de Yéménites fortunés ou des impôts de citoyens ordinaires pour la libération de la Palestine. Une fois emparés de Sanaa en 2011, ils ont également commencé à collecter les revenus des gisements de gaz et de pétrole, à prélever des ressources économiques (taxes, impôts, zakat, khums) et à s’approprier les recettes douanières du port de Hodeïda. On peut donc supposer que les Houthis disposent d’une solide base financière indépendante. Mais ils sont le maillon le plus faible de la chaîne iranienne sur le plan de l’aide sociale. Par exemple, pendant la pandémie de Covid-19, ils n’ont pas été en mesure de contenir la maladie ni de fournir médicaments ou vaccins aux populations sous leur contrôle.
L’affiliation iranienne a aussi contribué à la structuration du réseau des médias houthis. Al-Masirah, leur média officiel, émet à partir de Beyrouth depuis 2012 avec l’assistance technique d’Al-Manar, média du Hezbollah.
L’Iran a joué un rôle plus important après l’intervention de l’Arabie saoudite en 2015 en fournissant de l’armement. Mais l’objectif des Houthis a toujours été de restaurer leur autorité dans le nord du Yémen.
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