L’accord du Caire, boîte de Pandore du Liban (2/2)

Dans cette seconde partie sur l’accord libano-palestinien, signé au Caire le 3 novembre 1969, on aborde le timing d’un tel arrangement, ainsi que ses motifs.
L’accord du Caire, signé le 3 novembre 1969, avait consacré la présence de la résistance palestinienne armée au Liban. Un examen de la situation régionale de l’époque est incontournable pour situer la signature de cet accord dans son contexte.
Il ne faut pas oublier qu’en 1967, l’État hébreu s’est estimé menacé, notamment par la montée de l’Égypte nassérienne et par l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), créée en 1964. Après la nationalisation du canal de Suez, proclamée en 1956 par le leader égyptien, Gamal Abdel Nasser, et la propagande menée par celui-ci, promettant de «jeter tous les juifs à la mer», une coalition arabe s’est formée, regroupant l’Égypte, la Syrie et la Jordanie. Face aux troupes arabes postées à ses frontières, Israël mène une attaque préventive.
Du 5 au 10 juin 1967, dans ce qui est connu sous le nom de la guerre des Six jours, l’armée israélienne neutralise ses homologues égyptienne et syrienne, qu’elle détruit au sol en une heure. Puis, elle se bat sur plusieurs fronts, contre les troupes égyptiennes, jordaniennes et syriennes. Israël occupe alors, dans la foulée, la Cisjordanie (administrée par la Jordanie), la bande de Gaza (administrée par l’Égypte), la péninsule égyptienne du Sinaï, le Golan syrien et Jérusalem-Est.

Bilan de ce moment charnière dans l’histoire du Moyen-Orient. Victoire historique pour Israël, qui prend le contrôle de l’intégralité de Jérusalem, depuis la proclamation de l’indépendance de l’État hébreu en 1948. De l’autre côté, défaite cuisante pour les Arabes, portant un coup fatal au nationalisme arabe.
Dans ce nouveau contexte, la résistance palestinienne a été amenée à se restructurer en formation autonome. Avec la complicité du sunnisme politique au sein du gouvernement libanais et le soutien des partis gauchistes, l’accord du Caire de 1969 est venu consacrer le territoire libanais comme base légitime pour les opérations militaires de l’OLP, majoritairement constituée du groupe Fateh.
Parallèlement, l’organisation palestinienne, ainsi renforcée, avait pris pour base principale Amman, capitale du royaume hachémite de Jordanie. Le roi Hussein, voyant son autorité bafouée et, à la fois, la sécurité de son royaume et de sa personne menacée, décide de réprimer définitivement la résistance palestinienne. Le 17 septembre 1970, il lance son armée contre les camps de réfugiés palestiniens sur son territoire, opération sanglante connue sous le nom de «Septembre noir». En moins d’un an, les fedayin sont totalement éliminés du royaume hachémite. L’OLP se replie alors au Liban, où elle possède une marge de liberté d’action, à la fois politique et militaire.
D’ailleurs, de multiples organisations palestiniennes installent leurs bureaux à Beyrouth et la résistance palestinienne s’implante par le biais d’une vaste structure administrative dans la capitale libanaise.
Cette activité constitue un sujet de discorde parmi les différentes parties libanaises. Les partis chrétiens ressentent de plus en plus le besoin de se défendre face à la consolidation de la présence palestinienne au Liban.


De la guerre civile à l’invasion israélienne
L’implantation des réfugiés palestiniens au Liban avait occasionné des déséquilibres d’ordre social et démographique, sans compter la montée en puissance d’une présence armée à travers l’OLP.
Le parti Kataëb, fondé par Pierre Gemayel, ainsi que d’autres partis libanais, s’étaient armés et constituaient des milices visant à contrecarrer les guérillas palestiniennes.
Nous sommes en 1975. Plusieurs événements sécuritaires secouent le pays et les tensions durent déjà depuis des mois.
Dans ce climat conflictuel qui allait crescendo, un bus transportant des Palestiniens armés passe par Aïn el-Remmané, dans la banlieue de Beyrouth. Une fusillade éclate, faisant une dizaine de morts parmi les Palestiniens. C’est le début de la guerre libanaise.
Plusieurs cycles de violences se succèdent, pendant plusieurs années, en alternance avec des accalmies.
Le gouvernement israélien voit alors, dans l’embrasement du Liban, l’occasion d’en finir avec les combattants palestiniens qui continuaient de pilonner le nord d’Israël à partir du Liban-Sud.
C’est ainsi que le 6 juin 1982, 60.000 soldats israéliens franchissent la frontière libanaise. Dans une opération baptisée «Paix pour la Galilée»orchestrée par le général Ariel Sharon, alors ministre de la Défense, l’armée israélienne traverse les villes du Liban-Sud et arrive rapidement aux portes de la capitale, avec pour but de déloger l’OLP des camps palestiniens installés à Beyrouth-Ouest.
L’OLP et ses combattants sont contraints de quitter le Liban, se repliant sur Tunis le 30 août 1982, avec leurs dirigeants, à la tête desquels figure Yasser Arafat.
Ce n’est que le 21 mai 1987 que le Parlement libanais abroge l’accord libano-palestinien du Caire, conclu le 3 novembre 1969, qui n’a plus sa raison d’être.
Commentaires
  • Aucun commentaire