L'atelier restauré de Rabih Kayrouz, écrin d'une collection vibrante
©Crédit photo : Joumana Rizk


Beyrouth, la ville meurtrie, renaît de ses cendres à travers l’art et la création. Symbole de cette résilience, le créateur libanais Rabih Kayrouz a choisi de présenter sa nouvelle collection printemps-été 2024 dans son atelier du quartier de Gemmayzé, magnifiquement restauré après avoir été soufflé par l’explosion dévastatrice du port de Beyrouth le 4 août 2020. Un événement empreint d’émotion qui marque les 25 ans de sa maison de mode et témoigne de son attachement indéfectible à sa ville natale.

Rabih Kayrouz, figure incontournable de la mode internationale, a su s’imposer par son talent et sa créativité. Parti à Paris à l’âge de 16 ans pour étudier la mode, il y a ouvert sa propre maison en 2009, tout en gardant un ancrage profond à Beyrouth. «Des fois on n’a pas le choix. Je suis chez moi, ici», confie-t-il à l’AFP, évoquant son choix de rester et de reconstruire malgré les traumatismes de l’explosion, dont il a lui-même été victime, blessé grièvement à la tête alors qu’il se trouvait dans son atelier.

C’est dans ce même lieu, miraculeusement restauré grâce à la détermination de son équipe, que Rabih Kayrouz accueille aujourd’hui ses clientes fidèles.
«Pour être très honnête, c’est mon équipe qui m’a poussé», admet-il avec émotion. «C’est mon équipe qui a nettoyé les débris (...), peut-être que si j’étais seul, je ne serais pas revenu» au Liban. Un aveu qui souligne l’importance des liens humains et de la solidarité dans les moments les plus sombres.

Au deuxième étage de cette bâtisse traditionnelle aux gracieuses arcades, Rabih Kayrouz, en chemise blanche à col Mao, sert lui-même des verrines de grenade – emblème de sa maison – et d’amandes à ses clientes venues découvrir sa nouvelle collection. Les tons de jaune et de bleu dominent, traduisant «la joie, la couleur», mais aussi «le respect de la coupe, le respect de la femme, le respect de son corps», souligne le créateur.

Cette présentation intimiste reflète la volonté de Rabih Kayrouz de s’éloigner des grands spectacles pour privilégier des moments plus authentiques. «Je n’ai plus envie de show. Je n’ai plus envie de spectacle. J’aime les choses plus humaines, plus normales», confie-t-il, marquant ainsi une nouvelle étape dans son parcours de créateur.
Les 25 années qui se sont écoulées depuis ses débuts lui paraissent «passées trop vite», mais Rabih Kayrouz regarde vers l’avenir avec espoir et passion. Interrogé sur ses projets, il répond avec une touchante sincérité: «J’aimerais continuer d'avoir la chance d’exercer ce métier et surtout (…) d’entretenir ce petit garçon qui est en moi, qui rêve toujours».
À travers cette présentation empreinte de résilience et de joie, Rabih Kayrouz prouve que l’art et la beauté peuvent triompher des pires épreuves. Son atelier restauré, sa nouvelle collection vibrante de couleurs et son attachement indéfectible à Beyrouth sont autant de symboles d’espoir pour une ville qui se relève, portée par la créativité et le talent de ses enfants. Une histoire de passion, de courage et de rêve, à l’image de ce «petit garçon» qui, 25 ans après ses débuts, continue d’insuffler son énergie et sa vision à la mode internationale depuis le cœur battant de Beyrouth.
Bélinda Ibrahim avec AFP
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