La mort du président iranien, Ebrahim Raïssi, aura-t-elle une quelconque incidence sur le Liban? C’est une question que nombreux se posent dans le pays, depuis que la disparition du président et de son ministre des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian, dans un crash d’hélicoptère, dimanche, en Azerbaïdjan, a été confirmée.
Interrogé par Ici Beyrouth, Mustafa Fahs, écrivain et journaliste, a insisté sur le fait que la politique étrangère de l’Iran à l’égard du pays du Cèdre ne changera pas, quelle que soit la personne qui sera élue à la tête de la République islamique.
«L’Iran n’est pas un État qui peut être influencé par la perte d’une personne. Celui qui établit la politique étrangère de Téhéran est le guide suprême et les Gardiens de la révolution et non pas le président ou le gouvernement» iraniens, précise-t-il.
M. Fahs rappelle ainsi que l’assassinat de Qassem Suleimani, en janvier 2020, «n’a eu aucune incidence sur la politique iranienne vis-à-vis du Liban». «Dans le cas de Raïssi et d’Abdollahian, ce sera pareil», note-t-il.
Chef de la force Al-Qods, l’unité d’élite des Gardiens de la révolution, Qassem Suleimani avait été tué en 2020 à Bagdad, dans un raid américain.
Lundi matin, le gouvernement iranien a nommé Ali Bagheri Kani, chef de la diplomatie par intérim, en remplacement de Hossein Amir-Abdollahian. La politique étrangère étant déterminée par le guide suprême, «toute personne chargée de représenter la politique étrangère de Téhéran n’est là que pour exécuter les ordres de ce dernier, sinon elle doit rentrer chez elle», insiste M. Fahs.
L’influence du Hezbollah
L’influence iranienne au Liban, à travers le Hezbollah, est, comme on le sait, celle qui provoque le plus de controverse dans le pays, divisé en deux camps: celui dit de la Moumanaa (pro-iranien) et celui de l’opposition qui se bat contre cette influence. Pour ce groupe, «l’occupation iranienne» du Liban est la principale cause de l’effondrement du pays depuis plusieurs décennies et particulièrement depuis l’assassinat de l’ancien Premier ministre, Rafic Hariri, en 2005.
Lorsque Raïssi avait remporté la présidentielle en 2021, le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, avait salué «une grande victoire à un moment sensible et fatidique de l’histoire de l’Iran et de la région». «Votre victoire a ravivé les espoirs du peuple iranien et des peuples de notre région qui voient en vous une forteresse et un soutien solide à la résistance contre les agresseurs», avait-il déclaré.
La politique étrangère iranienne au Liban
Comme dans un théorème de maths, «l’Iran contrôle le Hezbollah qui contrôle l’État libanais, ce qui signifie que l’Iran, à travers le Hezbollah, contrôle l’État libanais. La décision de guerre et de paix au Liban appartient donc à Téhéran», selon Mustafa Fahs.
Mais quel est le lien exact entre l’Iran et le Hezbollah? Il s’agit d’un lien fusionnel, dans le sens où il ne dépend pas des aides financières fournies par Téhéran à cette formation ou d’un alignement politique. Toutefois l’influence de l’Iran dans les détails reste inconnue tout autant que la marge de manœuvre dont dispose le Hezbollah par rapport à son parrain iranien sur la scène politique libanaise.
L’existence et la montée en puissance de cette formation reste la plus grande réussite de la politique extérieure de Téhéran, depuis la révolution islamique de 1979. Le Hezbollah est ainsi son meilleur produit exporté.
C’est une des raisons pour lesquelles, depuis le début de la guerre de Gaza, entre Israël et le Hamas, l’Iran a refusé d’engager son allié local dans une guerre ouverte avec Tel-Aviv. Le Hezbollah se contente de maintenir la tension à la frontière sud, à travers des échanges de tirs d’artillerie ininterrompus avec Israël, lesquels, en dépit de leur violence parfois, restent limités.
Le risque d’un élargissement du conflit n’est toutefois pas écarté et le Hezbollah constituerait, dans ce cas, la meilleure arme stratégique de l’Iran face à Israël.
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