Affaire Ghada Aoun: le juge Hajjar reste inflexible, en dépit d’interventions

La très controversée procureure générale près la cour d’appel du Mont-Liban, Ghada Aoun, ne semble pas vouloir se plier à la décision du procureur général près la cour de cassation, Jamal Hajjar, qui vient de la décharger de ses fonctions.
Elle continue de l’ignorer, en employant la même stratégie qui consiste à insulter et à dénigrer ses supérieurs.
Son attitude n’a étonné personne parce qu’elle continue de se croire au-dessus des lois, en s’appuyant sur le soutien politique et partisan dont elle bénéficie pour ne pas se conformer aux mesures disciplinaires prises à son égard.
Face à ce comportement décrié par de nombreux magistrats, M. Hajjar ne fléchit pas. La juge, démise de ses fonctions une première fois en mai 2023, pourra continuer à appeler à l’aide, via son compte X, ses supporters parmi le CPL dont elle est proche, les avocats ou les journalistes, rien n’y fera. C’est ce qu’on assure de source au sein de la magistrature, tout en critiquant vivement la juge «qui s’est constitué un cadre de travail propre à elle, s’arrogeant le droit de se substituer à tout autre magistrat». Elle emploie pour cela la même rengaine qu’elle a utilisée pour contester la décision du juge Hajjar: «Je n’ai pas été notifiée de la nomination de tel juge. Personne n’a le droit de m’imposer une décision, entre autres», selon les mêmes sources.
C’est sur cette base que, foulant au pied les règles judiciaires, elle a refusé de remettre ses dossiers au juge Hajjar qui les avait réclamés, pour les examiner conformément à un droit que la loi lui accorde.

À chaque fois qu’une décision est prise pour remettre de l’ordre au niveau du travail de la magistrature, elle menace de présenter un recours en invalidation de cette décision.
Aussi, de même source, on se félicite de la décision disciplinaire prise par le juge Hajjar à son encontre. Ce dernier avait enjoint à la police judiciaire de ne plus mettre en application les mandats délivrés par la juge démise de ses fonctions et de couper tout contact avec elle.
La police judiciaire se conforme à cette décision, relève le journaliste Youssef Diab, spécialisé dans les affaires judiciaires, tout en estimant que Mme Aoun peut, si elle le souhaite, présenter un recours contre la décision du procureur de la République la concernant.
Sauf qu’à son avis, aucune suite ne sera donnée à ce recours. Elle avait saisi le Conseil d’État dans le passé, lorsque l’ancien procureur général près la cour de cassation, Ghassan Ouaidate, l’avait déchargée des dossiers financiers qu’elle traitait de façon sélective, discrétionnaire et destructrice. Mais cette instance n’avait pas rendu de jugement parce qu’elle représente une autorité administrative qui ne peut pas annuler des décisions en rapport avec l’autorité judiciaire. Inversement, à supposer que le président du Conseil d’État, Fadi Elias, décide de dessaisir un juge membre de cette juridiction, d’un dossier et de confier celui-ci à un autre, le magistrat écarté ne peut pas présenter un recours devant le Parquet général près la cour de cassation. En d’autres termes, il s’agit d’une affaire qui relève de la compétence exclusive du président vis-à-vis d’un subordonné qui doit se conformer à la décision de son supérieur.
Par conséquent, Ghada Aoun doit se conformer à la décision du juge Hajjar qui est désormais exécutoire. Pour ce qui est des actions qu’elle peut encore mener, elle peut engager des poursuites contre une tierce partie en cas de plainte déposée devant le Parquet de la cour d’appel de Baabda. Elle peut statuer sur le fond d’une affaire si elle est saisie d’un dossier et faire appel d’un jugement ou modifier un acte d’accusation, mais elle ne peut pas ordonner une interdiction de voyager ou une saisie de biens.
Selon M. Diab, Ghada Aoun se souciait seulement du pouvoir qu’elle croyait détenir sur certaines parties, à travers des dossiers qu’elle suivait. Un pouvoir qu’elle a perdu, parce que la décision du juge Hajjar à son encontre est irrévocable, en dépit des nombreuses interventions auprès du procureur, pour un règlement à l’amiable, en contrepartie d’un engagement de Ghada Aoun à se conformer à ses instructions.
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