L'influence politique restreinte du Vatican sur les chrétiens
Une évaluation de la situation des chrétiens au Liban révèle clairement une divergence de visions entre le Vatican et les forces politiques chrétiennes libanaises, ce qui conduit à la conclusion que la présence chrétienne au Liban est menacée.

Des sources qui suivent de près les démarches du Vatican envers le Liban affirment que le Saint-Siège se trouve limité dans sa capacité à influencer les partenaires chrétiens du pays. Ces derniers accueillent les responsables du Vatican avec des honneurs cérémoniels et montrent leur appréciation en se contentant de respecter le protocole.  Cependant, ils ne prennent pas sérieusement en compte les perspectives non seulement en faveur des intérêts des chrétiens, mais également ceux du Liban et de l'ensemble de sa population.

Selon ces mêmes sources, quiconque croit que le Vatican peut influencer les agendas du Hezbollah au Liban se trompe grandement. Malgré l'intervention de grands acteurs internationaux dans la vacance présidentielle et le conflit dans le sud du pays, aucun n'a réussi à contraindre le Hezbollah à reculer ne serait-ce qu'une fois. D’après ces sources d’information, la présence du Vatican, comme celle du patriarcat maronite et d'autres factions libanaises opposées aux projets du Hezbollah, exerce peu d'influence.

Ces sources ont souligné que le Vatican reconnaît cette réalité sous différents angles et cherche à obtenir une percée au sein de la communauté chrétienne pour favoriser une position chrétienne unifiée en faveur de la présence de cette communauté au Liban. Cependant, jusqu'à présent et dans ce contexte déterminé, il n'a pas réussi à concrétiser une telle avancée. Certains partis chrétiens alignés sur le Hezbollah hésitent à confronter le parti chiite sur des questions cruciales telles que la guerre, les armes et le dossier présidentiel. Ce sentiment est particulièrement représenté par le Courant patriotique libre (CPL), dirigé par le député Gébran Bassil, résolu à sécuriser le siège présidentiel. Ses manœuvres stratégiques visent explicitement à évincer Sleiman Frangieh, chef des Marada, de la course présidentielle, le présentant ainsi comme le principal candidat alternatif.


De plus, ces sources ont mis en avant que le désaccord entre M. Bassil et le Hezbollah sur la question présidentielle ne relève pas d'un désaccord stratégique concernant le programme et les orientations du président en soi. Il relève plutôt d'une divergence tactique sur la manière dont un président pro-Moumana’a (de l'axe de la «Résistance») devrait accéder au pouvoir et sur l'identité de cette personne. Un examen factuel des positions de Gebran Bassil et de Sleiman Frangieh révèle une convergence fondamentale concernant les armes et les activités du Hezbollah. Et ce, malgré des différences rhétoriques quant au rôle du Hezbollah, à ses armements au Liban, à son agenda politique et à son allégeance à l'Iran.

Face à ces réalités, les milieux étroitement liés au suivi des initiatives du Vatican ont souligné que le Saint-Siège se heurte à des défis significatifs, voire insurmontables, pour concilier les points de vue politiques parmi les chrétiens qui soutiennent le Hezbollah ou s'y opposent. Le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d'État du Vatican, a posé des questions percutantes à de nombreux interlocuteurs: comment certaines factions chrétiennes peuvent-elles justifier la vacance à la présidence, la seule position chrétienne à la tête d'un État au Moyen-Orient? Et comment peuvent-elles soutenir une guerre et l'utilisation d'armes en dehors du contrôle de l'État, en justifiant cela comme étant une pratique courante?

Le Vatican reconnaît que ses récentes tentatives pour convaincre les factions chrétiennes en conflit de faire des concessions ne produiront pas de résultats. Ainsi, dans un avenir proche, le Saint-Siège s'efforcera d'intensifier les initiatives sociales et économiques visant à préserver les chrétiens du Liban, en particulier les jeunes. Il est conscient de l'ampleur de la tâche qui l'attend. En effet, l'absence d'un État fonctionnel se traduit par une instabilité, un manque d'opportunités d'investissement et des perspectives d'emploi limitées. Or, ces conditions, si elles perdurent, conduisent inévitablement à l'émigration des jeunes.
Bassam Abou Zeid
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