Effet de transmission: l’élasticité des prix faussée par les distorsions du marché libanais

L’effet de transmission (exchange rate pass-through) reflète l'impact des dépréciations du taux de change sur les niveaux de prix, c’est-à-dire sur leur élasticité, principalement à travers les variations des prix des biens et services importés.
Cet enjeu est d'autant plus pertinent que le Liban a subi, de 2020 à 2023, une dévaluation historique de sa monnaie et que son économie dépend largement des importations.
Le taux de transmission se calcule sous forme de pourcentage en mesurant l’évolution des prix à l’importation par une augmentation de 1% du taux de change entre le pays qui exporte et le pays qui importe. Si les prix à l'importation évoluent dans la même proportion que le taux de change, alors la transmission est parfaite.
Dans une note de recherche, BlomInvest a mesuré l’effet de transmission comme la dépréciation du taux de change en pourcentage du ratio des importations de biens et services sur le PIB. Cela signifie que la transmission de la variation du taux de change aux prix domestiques (inflation) est estimée en fonction de l’importance des importations par rapport à l’économie (mesurée par le PIB). En d'autres termes, plus un pays dépend des importations, plus la dépréciation de sa monnaie aura un impact sur les prix domestiques (inflation).
Subventions gouvernementales  
En 2020, l’effet de transmission est supérieur au taux d’inflation, (135,7% contre 112,4%). Cela signifie que l’impact attendu de la dépréciation du taux de change aurait dû être plus important que l’inflation réelle. Cette différence est expliquée par les subventions gouvernementales qui ont probablement atténué l’impact de la dépréciation sur les prix à la consommation.

Pour la période 2021-2023, le taux d’inflation devient beaucoup plus élevé que l’effet de transmission. Cela signifie que d’autres facteurs, en plus de la dépréciation du taux de change, contribuent à la hausse des prix.
Dans le détail, en 2022, la différence est très grande: l’inflation est de 168,5%, tandis que l’effet de transmission est de 52,2%. L’inflation a dépassé de 116,3% l’effet de transmission attendu. En 2021, la différence est de 51% et en 2023, elle est de 87,5%.
Distorsions du marché
La note de recherche souligne que cette inflation excessive ne peut pas être attribuée uniquement à des facteurs globaux ou traditionnels pour plusieurs raisons. D'abord, l'inflation mondiale n'a pas dépassé 8,5% durant cette période, ce qui est bien inférieur aux taux d'inflation observés, comme les 168,5% enregistrés en 2022. De plus, la hausse du coût du travail n'explique pas non plus cette inflation, puisque le salaire minimum est passé de 450 dollars en 2019 à seulement 200 dollars en 2024.
Ainsi, cette inflation démesurée semble plutôt s'expliquer par des problèmes structurels du marché, tels que la présence de prix monopolistiques, des ententes entre entreprises visant à maintenir des prix élevés, ainsi que l'absence de régulation et de supervision officielles des prix.
Enfin, pour 2024, la note de recherche anticipe que l'écart entre l'inflation et l'effet de transmission dépassera 35,4%. Cette situation s'explique par une légère amélioration du taux de change de 0,3% au cours de l'année, mais cette progression restera insuffisante pour entraîner une réduction significative de l'inflation.
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