Vendredi, en l'espace de quelques secondes, Israël a largué près de 10 tonnes d'explosifs sur Beyrouth lors d'une frappe aérienne massive qui a réduit en ruines un bloc entier à Dahieh (balieue sud de Beyrouth), détruisant, selon les rapports, huit immeubles et tuant Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah.
Les frappes aériennes israéliennes se poursuivent contre diverses cibles à travers le Liban, avec une concentration notable dans la banlieue sud de Beyrouth, à Dahieh.
D’après le dernier bilan du ministère de la Santé, 11 personnes ont été tuées et 108 blessées à Beyrouth depuis la frappe de vendredi, mais les autorités prévoient que ce bilan pourrait encore s’alourdir dans les prochains jours.
Dahieh, un quartier souvent désigné comme un «bastion du Hezbollah», est une zone de Beyrouth où le soutien à l'organisation est omniprésent et où la présence du Hezbollah est étroitement intégrée à la vie communautaire. Nombreux sont les habitants ayant des amis ou des proches affiliés au Hezbollah, mais les liens entre Dahieh et l'organisation sont aussi d'une nature plus concrète.
Au cours des 18 dernières années, le Hezbollah s'est profondément enraciné sous le quartier, établissant un vaste réseau de tunnels, de centres de commandement et de contrôle, ainsi que des dépôts d'armes.
Peu d'informations sont accessibles au public concernant ce réseau de tunnels, à l'exception de quelques photos divulguées montrant de larges passages aux murs carrelés, ce qui suggère qu'ils étaient destinés à servir de centres opérationnels, voire de quartiers de repos.
D’après Riad Kahwaji, analyste en sécurité et défense au Moyen-Orient basé à Dubaï et directeur de l’Institut pour l’analyse militaire du Proche-Orient et du Golfe (INEGMA), «ce système de tunnels est conçu pour faciliter le mouvement des dirigeants à l’abri des regards et pour fournir une zone sécurisée où établir leur quartier général pour le commandement supérieur».
Cependant, il semble évident que ce réseau de tunnels n’a pas réussi à remplir cet objectif, le New York Times rapportant qu’Israël était au courant des déplacements de Hassan Nasrallah depuis plusieurs mois avant son assassinat.
Des rapports médiatiques indiquent que la frappe ayant tué le leader du Hezbollah a atteint quatorze niveaux de profondeur, visant un centre de commandement du Hezbollah situé dans un bunker souterrain. Les membres du Hezbollah n'ont découvert le corps du Sayyed sous les décombres que dans les premières heures de samedi.
Ali Karaké, le commandant en charge du front sud, se trouvait également dans le bunker au moment de l'attaque, bien que sa mort n'ait pas encore été officiellement confirmée.
La frappe aérienne israélienne a été effectuée par des chasseurs F-16. Lors de cette opération, des «munitions antibunker» hautement explosives, conçues spécifiquement pour détoner profondément sous terre, ont été utilisées.
Ce type de munition, initialement développé pendant la Seconde Guerre mondiale, a été largement utilisé au cours des quatre-vingts dernières années et a été fortement déployé dans le cadre de la «guerre contre le terrorisme» durant le conflit en Afghanistan, alors que la coalition dirigée par les États-Unis cherchait à déloger les combattants talibans de leurs refuges profonds dans les montagnes.
Bien que le type exact de munitions utilisées lors de la frappe n'ait pas été confirmé, selon Mohammed el-Bacha, analyste indépendant au Moyen-Orient, l'aviation israélienne possède plusieurs munitions guidées antibunker dans son arsenal, notamment: la GBU-28 de 5.000 livres, la GBU-31 JDAM de 2.000 livres et la BLU-109 Penetrator de 2.000 livres.
Ces munitions sont produites en Israël et aux États-Unis. En 2021, Israël a sollicité le modèle GBU-72, le plus récent et le plus avancé de l’armée américaine. Cependant, l'accord n'a pas encore été finalisé, excluant ainsi leur utilisation lors de la frappe de vendredi.
Ces munitions se divisent principalement en deux catégories.
La première catégorie se compose de munitions équipées d'une ogive renforcée, conçue pour percer les surfaces dures, permettant à la bombe de résister à l'impact. Grâce à son poids important, la bombe peut s'enfouir profondément dans la cible avant qu'un retardateur n'active sa détonation sous terre.
La seconde catégorie contient deux charges. La première, plus petite, est destinée à créer une ouverture dans la cible, tandis que la seconde charge, intacte, la suit. Un retardateur permet également à cette seconde charge de détoner à l'intérieur de la cible.
Bien que ces types de munitions soient légaux en vertu du droit international, leur utilisation dans des zones densément peuplées est expressément interdite.
La frappe a causé d'immenses dégâts, que Mohammed el-Basha attribue en partie au fait que «ces armes sont les plus efficaces contre les bunkers construits sur un sol plat, comme ceux que l'on trouve probablement à Dahieh, qui sont généralement construits en béton armé, en acier et en couches de sol pour la protection».
Cependant, elles pourraient s'avérer moins efficaces pour démanteler le vaste réseau de tunnels du Hezbollah dans le sud du Liban, car «les réseaux de tunnels en montagne offrent une protection naturelle supérieure grâce à l'épaisse couche de roches au-dessus et ces munitions antibunker sont généralement moins efficaces contre les installations creusées dans les montagnes».
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