Avec le Hezbollah ébranlé, l’Iran face à un dilemme de taille
©(ATTA KENARE/AFP)
Après la mort du chef du Hezbollah, tué par Israël, l'Iran doit faire face à la fois à la perte d'un allié crucial au Moyen-Orient et au défi de maintenir son influence dans cette région, selon des analystes dimanche.

En Iran, le guide suprême, Ali Khamenei, a affirmé que la perte de Nasrallah «ne sera pas vaine» et le premier vice-président Mohammad Reza Aref a averti qu'elle entraînerait la «destruction» d'Israël.

Les autorités iraniennes ont en outre juré de venger la mort d'un général iranien tué au côté de Nasrallah.

Ce dernier «a joué un rôle crucial dans l'expansion du pouvoir» iranien et le Hezbollah reste «le joyau de la couronne» parmi les alliés d'Iran, souligne Karim Sadjadpour du Carnegie Endowment.

Son assassinat «n'a pas changé le fait que l'Iran ne souhaite toujours pas s'engager directement» dans la confrontation entre Israël et le Hezbollah, a constaté Ali Vaez, du groupe International Crisis.

Mais cela place l'Iran face à «un sérieux dilemme», car la force de dissuasion de ce pays contre Israël est «en plein désarroi», juge-t-il.
Tâche difficile

D'après Mehdi Zakerian, professeur de relations internationales à Téhéran, au vu des derniers développements, le front iranien est «non seulement incapable de contenir Israël, mais a subi d'importants revers».

En juillet, le chef du Hamas, Ismaïl Haniyeh, a été tué à Téhéran, une attaque imputée par l'Iran et le mouvement palestinien à Israël. L'Iran avait alors juré d'infliger un «châtiment sévère» à Israël, mais la riposte n'a toujours pas eu lieu.

M. Zakerian estime qu'aider le Hezbollah à se remettre des coups infligés par Israël reste une tâche difficile pour Téhéran qui fait face à des défis économiques croissants, conséquences des sanctions internationales.

«Si le gouvernement souhaite contribuer à la reconstruction du Liban ou à rééquiper le Hezbollah, cela aggravera la crise économique», note-t-il.

Les analystes estiment que l'Iran a fait preuve de prudence depuis le début du conflit à Gaza, en cherchant à montrer sa puissance, mais sans provoquer une riposte des États-Unis.

Comme en avril, lorsqu'il a mené une attaque directe sans précédent contre Israël, en représailles à une frappe contre sa mission diplomatique à Damas. La plupart des missiles tirés par l'Iran ont été interceptés par Israël et ses alliés.

À l'époque, l'Iran avait reconnu avoir informé les États-Unis et donné un avertissement de 72 heures aux pays voisins avant l'opération contre son ennemi juré.

«Bouclier de l'Iran»

L'analyste Vaez estime néanmoins que l'Iran «a tout intérêt à essayer de préserver ce qui reste du Hezbollah, le bouclier de l'Iran».

«Je ne pense pas que les Iraniens renonceraient du jour au lendemain à près de 40 ans d'investissement dans ce projet après l'élimination d'une dizaine de personnes», explique-t-il.

Outre Hassan Nasrallah, Israël a affirmé avoir tué «la plupart» des dirigeants du mouvement dans des opérations ces derniers mois.

En plus, «l'Iran ne peut pas abandonner le Hezbollah, car il perdrait ses autres alliés» dans la région, souligne M. Zakerian.

Un autre défi sérieux pour l'Iran: comment communiquer désormais avec le Hezbollah ou lui transférer des armes, indiquent des analystes.

Vendredi, l'armée israélienne a affirmé qu'elle ne permettrait pas à l'Iran de livrer des armes au Hezbollah via l'aéroport de Beyrouth, en évoquant des survols des environs par son aviation.
«Toujours debout»?

«Il est trop tard maintenant pour soutenir le Hezbollah avec des armes» iraniennes, a déclaré le commentateur politique Mossadegh Mossadeghpour. Mais le mouvement «s'en remettra», selon lui.

Plus tôt en septembre, une vague d'explosions de bipeurs et de talkies-walkies utilisés par des membres du Hezbollah, imputée à Israël, a fait des dizaines de morts au Liban et des milliers de blessés.

Pour M. Vaez, il est désormais «très difficile pour les Iraniens» de communiquer avec leurs alliés.

S'agissant des attaques du Hezbollah contre Israël, M. Vaez les a qualifiées de «faibles». «La question est de savoir s'ils ne veulent pas ou ne peuvent pas agir».

L'Iran, dit-il, semble espérer que le groupe «se ressaisisse et lance une attaque d'envergure contre Israël pour démontrer qu'il est toujours debout».

Avec AFP
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