Je ne suis d’aucun côté de la clôture
Aujourd'hui je me sens engourdie. Je me sens invisible. Comme un intrus. Si heureuse d'être hors concours. Effrayée à l’idée même que l’on pourra se souvenir de moi.

Une sensation de désappartenance qui me donne agréablement la chair de poule. Je suis l’option «pas de réponse» dans un quiz de statistiques urbaines.

Je ne suis d’aucun côté de la clôture.

L’herbe de mon côté n’est ni plus ni moins verte.

Mon passé m’appartient certes, mais je m’en dissocie bon gré. Je ne suis pas le produit systématique de mon passé.

Je ne suis pas parmi l’échantillon représentatif sur lequel bases de données et études sont manipulées et trafiquées au nom du behaviorisme.


Mon avenir est aussi brouillé qu’une image à moindre résolution. C’est de cette façon que je m’aime.

Les yeux tournoyant dans le vague, les doigts écartés fermant les lèvres, les lèvres écarlates renfermant une grimace... Les voix des masses faisant écho à ma petite voix intérieure qui tente une quelconque diversion... Dix versions de vie qui m'encombrent... La foule sortant de l'ombre et moi suivant le troupeau pour donner un peu de ciel bleu au mouton qu'une imagination refoule dans une boîte.

Je n’ai plus rien à dire. Rien ne s'annonce ni ne s'énonce. Et ma bouche est désespérément close sur le sourire du silence. Lui seul convient. Et fait écho. Lui seul narre avec autant de précision ce qui se joue. Se dénoue. Lui seul, aussi, rend hommage à cette vie qui s'écoule devant mes yeux. Avec ses charmes. Ses fossettes. Son ciel bleu. Son temps qui n'est que celui de vivre. Lui seul sait ne rien entacher de toutes ces petites beautés au coin des jardins.

Lui seul demeure.

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