©Dans un volte-face inattendu, les talibans, au pouvoir depuis août, ont fait refermer le 23 mars aux filles les lycées et collèges. (Photo : AFP)
La fermeture aux filles des écoles secondaires montre que les orientations du mouvement taliban restent dictées par sa frange la plus radicale et expose ses divisions, qui se répercutent sur les chances de l'Afghanistan d'obtenir l'aide dont il a tant besoin, selon des experts.
Dans un volte-face inattendu, les talibans, au pouvoir depuis août, ont fait refermer le 23 mars aux filles les lycées et collèges, quelques heures à peine après leur réouverture, annoncée de longue date.
Ce revirement a suscité l'indignation de la communauté internationale mais a aussi laissé incrédule la composante la plus moderne des talibans, consciente que cela pourrait affecter sa capacité à obtenir de l'Occident l'aide financière que l'Afghanistan réclame.
"Cet ordre a été dévastateur. Le chef suprême lui-même est intervenu", affirme un haut responsable taliban, sous couvert d'anonymat comme toutes les sources talibanes interrogées par l'AFP.
Cette décision a été prise après une réunion secrète des dirigeants talibans à Kandahar (sud). Aucune raison officielle n'a été donnée pour la justifier, les talibans rappelant seulement que l'éducation des filles doit se faire en conformité avec la charia, la loi islamique, dont ils ont défendent une version ultra-rigoriste.
Le chef suprême du mouvement Hibatullah Akhundzada, et quelques autres, "sont ultra-conservateurs sur cette question" et ont eu le dernier mot, explique le même haut responsable taliban.
"Les ultra-conservateurs ont gagné cette partie", dit-il en se référant à un groupe de religieux qui inclut le président de la Cour suprême Abdul Hakim Sharai, le ministre des Affaires religieuses Noor Mohammad Saqeb et le ministre de la Promotion de la vertu et de la prévention du vice Mohammad Khalid Hanafi.
Ceux-ci se sont jusqu'ici sentis maintenus à l'écart des décisions gouvernementales et s'opposer à l'éducation des filles est leur manière de restaurer leur emprise, estime Ashley Jackson, une spécialiste de l'Afghanistan.
"L'influence exagérée de cette minorité déconnectée de la réalité" a empêché le gouvernement d'appliquer une mesure approuvée par la vaste majorité des Afghans et la plupart des dirigeants talibans, ajoute-t-elle.
"Cela montre que Kandahar reste le centre de gravité de la politique talibane", souligne Graeme Smith, analyste pour l'International Crisis Group. Kandahar, deuxième plus grande ville d'Afghanistan, est le berceau des talibans qui en avaient fait l'épicentre de leur précédent régime (1996-2001).
Les ultra-conservateurs cherchent aussi à apaiser les milliers de combattants talibans issus des zones rurales les plus conservatrices du pays, souligne le même haut responsable taliban.
"Pour eux, dès qu'une femme sort de sa maison, c'est immoral. Alors imaginez ce qu'il en est de l'éduquer", dit-il.
A l'en croire, le chef suprême est lui-même opposé à une "éducation moderne, séculaire", qu'il associe à la vie sous les anciens présidents afghans, soutenus par l'Occident, Hamid Karzai et Ashraf Ghani.
Les talibans ont repris le pouvoir en Afghanistan en août, en mettant fin à vingt années d'occupation par les Etats-Unis et leurs alliés, qui les en avaient chassés en 2001.
Pendant ces deux décennies, les Afghanes --privées de presque tout droit sous le précédent régime taliban-- ont acquis des libertés nouvelles, retournant à l'école ou postulant à des emplois dans tous les secteurs d'activité, même si le pays est resté socialement conservateur.=
La militante Tafsir Siyaposh remarque que les filles afghanes ont toujours étudié dans des classes non-mixtes et suivi un curriculum islamique. Les interdire d'école montre que les talibans veulent seulement "opprimer les droits des femmes en donnant des excuses", accuse-t-elle.
Une autre source talibane, basée au Pakistan, confirme à l'AFP ces différences d'opinion entre dirigeants talibans sur la question de l'éducation, mais en écartant tout risque de voir le groupe se fragmenter.
"Il y a un débat sur cette question (...), mais nous essayons de résoudre nos divergences", confie-t-elle.
Pour les analystes toutefois, ce revirement sur l'école est un coup dur porté aux efforts des talibans pour être reconnus par la communauté internationale et obtenir l'indispensable aide humanitaire.
Ni Hibatullah Akhundzada, ni ceux qui sont proches de lui, "n'ont pleinement compris et évalué "les conséquences de cette décision sur la communauté internationale, qui a lié une éventuelle reconnaissance du gouvernement taliban à son respect des droits des femmes, considère Ashley Jackson.
Même de hauts responsables talibans sont en accord avec cette analyse. "Nous leur disons (aux ultra-conservateurs) que diriger un pays n'est pas la même chose que gérer une madrassa", une école coranique, explique à l'AFP l'un de ceux-ci, originaire de Kandahar.
"Tout se passait bien jusqu'à ce que cette décision sévère ne tombe. Elle est venue de notre Emir, alors nous devons l'appliquer, mais nous essayons de la modifier", ajoute-t-il.
La position des talibans sur l'éducation rend les gouvernements étrangers moins indulgents à leur égard, juge Graeme Smith.
Avec AFP
Dans un volte-face inattendu, les talibans, au pouvoir depuis août, ont fait refermer le 23 mars aux filles les lycées et collèges, quelques heures à peine après leur réouverture, annoncée de longue date.
Ce revirement a suscité l'indignation de la communauté internationale mais a aussi laissé incrédule la composante la plus moderne des talibans, consciente que cela pourrait affecter sa capacité à obtenir de l'Occident l'aide financière que l'Afghanistan réclame.
"Cet ordre a été dévastateur. Le chef suprême lui-même est intervenu", affirme un haut responsable taliban, sous couvert d'anonymat comme toutes les sources talibanes interrogées par l'AFP.
Cette décision a été prise après une réunion secrète des dirigeants talibans à Kandahar (sud). Aucune raison officielle n'a été donnée pour la justifier, les talibans rappelant seulement que l'éducation des filles doit se faire en conformité avec la charia, la loi islamique, dont ils ont défendent une version ultra-rigoriste.
Le chef suprême du mouvement Hibatullah Akhundzada, et quelques autres, "sont ultra-conservateurs sur cette question" et ont eu le dernier mot, explique le même haut responsable taliban.
"Les ultra-conservateurs ont gagné cette partie", dit-il en se référant à un groupe de religieux qui inclut le président de la Cour suprême Abdul Hakim Sharai, le ministre des Affaires religieuses Noor Mohammad Saqeb et le ministre de la Promotion de la vertu et de la prévention du vice Mohammad Khalid Hanafi.
Restaurer l'influence de Kandahar
Ceux-ci se sont jusqu'ici sentis maintenus à l'écart des décisions gouvernementales et s'opposer à l'éducation des filles est leur manière de restaurer leur emprise, estime Ashley Jackson, une spécialiste de l'Afghanistan.
"L'influence exagérée de cette minorité déconnectée de la réalité" a empêché le gouvernement d'appliquer une mesure approuvée par la vaste majorité des Afghans et la plupart des dirigeants talibans, ajoute-t-elle.
"Cela montre que Kandahar reste le centre de gravité de la politique talibane", souligne Graeme Smith, analyste pour l'International Crisis Group. Kandahar, deuxième plus grande ville d'Afghanistan, est le berceau des talibans qui en avaient fait l'épicentre de leur précédent régime (1996-2001).
Les ultra-conservateurs cherchent aussi à apaiser les milliers de combattants talibans issus des zones rurales les plus conservatrices du pays, souligne le même haut responsable taliban.
"Pour eux, dès qu'une femme sort de sa maison, c'est immoral. Alors imaginez ce qu'il en est de l'éduquer", dit-il.
A l'en croire, le chef suprême est lui-même opposé à une "éducation moderne, séculaire", qu'il associe à la vie sous les anciens présidents afghans, soutenus par l'Occident, Hamid Karzai et Ashraf Ghani.
Les talibans ont repris le pouvoir en Afghanistan en août, en mettant fin à vingt années d'occupation par les Etats-Unis et leurs alliés, qui les en avaient chassés en 2001.
Pendant ces deux décennies, les Afghanes --privées de presque tout droit sous le précédent régime taliban-- ont acquis des libertés nouvelles, retournant à l'école ou postulant à des emplois dans tous les secteurs d'activité, même si le pays est resté socialement conservateur.=
Coup dur pour l'aide humanitaire
La militante Tafsir Siyaposh remarque que les filles afghanes ont toujours étudié dans des classes non-mixtes et suivi un curriculum islamique. Les interdire d'école montre que les talibans veulent seulement "opprimer les droits des femmes en donnant des excuses", accuse-t-elle.
Une autre source talibane, basée au Pakistan, confirme à l'AFP ces différences d'opinion entre dirigeants talibans sur la question de l'éducation, mais en écartant tout risque de voir le groupe se fragmenter.
"Il y a un débat sur cette question (...), mais nous essayons de résoudre nos divergences", confie-t-elle.
Pour les analystes toutefois, ce revirement sur l'école est un coup dur porté aux efforts des talibans pour être reconnus par la communauté internationale et obtenir l'indispensable aide humanitaire.
Ni Hibatullah Akhundzada, ni ceux qui sont proches de lui, "n'ont pleinement compris et évalué "les conséquences de cette décision sur la communauté internationale, qui a lié une éventuelle reconnaissance du gouvernement taliban à son respect des droits des femmes, considère Ashley Jackson.
Même de hauts responsables talibans sont en accord avec cette analyse. "Nous leur disons (aux ultra-conservateurs) que diriger un pays n'est pas la même chose que gérer une madrassa", une école coranique, explique à l'AFP l'un de ceux-ci, originaire de Kandahar.
"Tout se passait bien jusqu'à ce que cette décision sévère ne tombe. Elle est venue de notre Emir, alors nous devons l'appliquer, mais nous essayons de la modifier", ajoute-t-il.
La position des talibans sur l'éducation rend les gouvernements étrangers moins indulgents à leur égard, juge Graeme Smith.
Avec AFP
Lire aussi
Commentaires