Pr Roy Nasnas, le serment d’Hippocrate fait homme
En ce lundi de Pâques, la mauvaise nouvelle est tombée, brisant le cœur d’un nombre incalculable de Libanais dont il était le médecin traitant et qui ne juraient que par lui.

Roy Nasnas était un monument de savoir, d’empathie et d’altérité. Il représentait pour beaucoup «le sauveur», celui qui arrachait à la mort des cas désespérés. Là où d’autres médecins baissaient les bras, il retroussait ses manches, puisant dans l’infinité de son savoir les ressources et les armes pour combattre l’ennemi… chez les autres et les tirer d’affaire.

C’est justement là où le bât blesse, de réaliser que lorsque le plus pernicieux des cancers l’a frappé, il n’a pas pu effectuer sur lui-même ce «miracle» dont il faisait bénéficier ses patients. La médecine était son sacerdoce. Médecin interniste et spécialiste des maladies infectieuses, il rayonnait sur le monde médical dans toutes ses disciplines. Rien, absolument rien ne lui échappait. Cela faisait grincer des dents certains de ses collègues qui lui reprochaient d'empiéter sur leurs plates-bandes. Mais lorsqu’on avait Roy Nasnas comme médecin traitant, c’est à la médecine dans toutes ses branches qu’on avait affaire! Lorsqu’il a été frappé par la maladie, il s’est absenté juste le temps de suivre ses traitements, n’ayant de cesse de persévérer dans sa mission.


Le 4 août 2020, il se trouvait encore dans sa clinique de l’hôpital Jetaoui qui faisait face aux silos du port de Beyrouth. À la première explosion, il s’était réfugié derrière le petit muret qui séparait son bureau de la pièce attenante dans laquelle il examinait ses patients. La seconde explosion a tout fait voler… mais l’a épargné. Il s’en était tiré avec quelques égratignures. Il avait pris ça pour un signe du ciel. Ce ciel en lequel il avait foi et auquel il avait attribué sa guérison qui s’avéra n’être qu’une simple rémission. Lui, le pudique, avait dû évoquer sa maladie à la télévision pour mettre fin aux rumeurs et aux spéculations des curieux. Il en avait parlé avec une pointe de reconnaissance dans la voix, mettant néanmoins un terme aux questions intrusives qui s’en étaient suivies.

Roy Nasnas était un médecin hors norme. Les mots pour le qualifier n’existent dans aucun lexique. Comme me l’a dit un de ses patients, qui fait partie de mon cercle familial le plus proche, en guise de consolation: «Nous avons eu au moins la chance de le connaître, nous, alors que d’autres ne l’ont pas eue, cette chance-là...»

Roy Nasnas demeurera pour toujours cette part manquante à notre monde. Ad vitam aeternam.
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