Nasrallah: Ni volonté, ni crainte d’une guerre
«Israël continuera de prendre des décisions selon ses seuls intérêts, sans égard aux menaces», a vite répondu le ministre israélien Avigdor Lieberman au secrétaire général du Hezbollah.

Le secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah a tenu jeudi soir un discours consacré au dossier de la délimitation des frontières maritimes, et l’amarrage quelques jours plus tôt d’une plateforme gazière dans le champ de Karish.

«Le Liban est entré dans une nouvelle phase et fait face à une nouvelle échéance d’une grande importance et d’une grande urgence», a-t-il commencé par dire, en faisant valoir que c’est l’extraction et non pas la prospection qui est l’objectif de la plateforme gazière. «Ce qui s’est passé est une agression, une provocation à l'adresse du Liban, qui le place dans une position difficile où il doit faire un choix définitif et clair», a-t-il indiqué, en citant les positions officielles du chef de l’État, du Premier ministre et du président de la Chambre, et en précisant que ce choix serait celui de l’État et non pas de son parti.  «En tant que parti, nous ne parlons ni de la ligne 23 (ligne retenue officiellement par le Liban), ni de zone disputée ou pas (Israël affirme avoir amarré le navire dans une zone non disputée)».

L’atteinte aux frontières maritimes «doit se transformer en affaire nationale primordiale», puisque la zone économique exclusive, où les richesses sont évaluées entre 200 et 500 milliards de dollars, doit «concerner tout Libanais indépendamment de sa région, confession, communauté ou politique (…) par-delà les divisions 8-14 Mars, pouvoir-opposition et autres calculs». «Ces richesses appartiennent à tout le peuple libanais. Ces richesses sont le seul espoir restant pour sortir le Liban de sa situation difficile», a-t-il ajouté.

L’enjeu à ses yeux serait d’abord de «protéger ce trésor» face aux dangers multiples qui le guettent, et «œuvrer à l’extraire au plus vite».

«Le premier danger est l’effort soutenu israélien et américain, visant à arracher une très grande partie de cette zone au Liban. Le deuxième danger est l’interdiction imposée au Liban et la Syrie d’entreprendre toute prospection et extraction», a fait valoir Hassan Nasrallah, en signalant que «des sociétés ont été interdites de participer aux adjudications, et celles qui l’ont fait ont été empêchées d’entamer leur travail, même dans les zones non contestées», et ont été menacées de sanctions. «Le troisième danger est que ces champs se vident de leurs ressources (…) et lorsque la plateforme gazière commencera l’extraction (pour le compte d’Israël), cela deviendra plus difficile pour le Liban», a poursuivi le leader chiite.

«Le Liban a les moyens d’une confrontation»


C’est pourquoi «le facteur temps gagne en importance (…) puisque chaque jour fait perdre un droit aux Libanais, alors qu’un retard d’un an ou deux pour libérer Jezzine ou les fermes de Chebaa était tolérable». «Tous les Libanais doivent faire preuve de responsabilité éthique (…) Il faut interdire à l’ennemi d’entamer les travaux d’extraction de Karish», a martelé Hassan Nasrallah. "Peu importe que la zone où la plateforme a jeté l'ancre soit disputée ou non". «Certains ont été dans la surenchère, mais la ligne 29 n’est pas la question: l’important est que la plateforme se soit arrêtée à Karish, qui est une zone commune (…)».

Si le leader pro-iranien a rappelé l’abstention du Hezbollah d’intervenir sur le dossier, même s’il vient de désigner un représentant, il a souligné que son parti ne prendra pas part aux négociations qui relèvent des prérogatives du chef de l’État. Mais «en tant que résistance, il est de notre droit de faire ce qu’il faut pour recueillir des renseignements et nous suivrons le dossier de près», a-t-il indiqué.

«Armée-résistance»

Le numéro un du Hezbollah a en même temps mis en avant les capacités de militaires de son parti, sous le thème de la complémentarité entre «le droit et la force, l’armée et la résistance». «L’armée libanaise peut parler de sa force, mais pour ce qui est de la résistance, celle-ci détient la capacité matérielle et logistique d’interdire à Israël d’extraire du gaz du champ de Karish (…). L’ennemi doit renoncer à son ‘activité’ et la résistance ne restera pas les bras croisés face à l’extraction de pétrole et de gaz du champ de Karish», a-t-il poursuivi.

Et d’ajouter, en revenant sur l’invasion israélienne de 1982: «Le Liban n’est pas faible et n’est pas en 1982, le médiateur (américain, Amos Hochstein, ndlr) n’est ni honnête ni juste et travaille dans l’intérêt de l’ennemi du Liban (…)». «Nous avons affaire à une cause qui n’est pas moins importante que la libération de la bande frontalière», a-t-il dit.

C’est pourquoi «toutes les options sont ouvertes: nous ne voulons pas la guerre, mais nous ne la craignons pas pour autant», a-t-il déclaré, sans manquer de dire que «toutes les mesures prises par l’ennemi ne pourront pas protéger la plateforme». Et le leader chiite de conclure: «Une position populaire unifiée en faveur d’une bataille nationale pour récupérer les richesses du pays serait à même d’intimider l’ennemi, sans besoin d’une aventure (de guerre, ndlr). Serons-nous à la hauteur?».

Prompt à réagir au discours de Hassan Nasrallah, le ministre israélien des Finances Avigdor Lieberman a affirmé que «nul n’est en position de nous dicter s’il faut ou non extraire du gaz dans nos eaux». «Israël continuera de prendre des décisions selon ses seuls intérêts, sans égard aux menaces», a-t-il ajouté.
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