Istanbul, nid d'espion. Avec sa position géographique et ses quelque 17 millions d'habitants, la mégapole turque est un terrain propice pour de nombreux services secrets, notamment israéliens et iraniens. L'État hébreu a d'ailleurs demandé le 13 juin à ses ressortissants de quitter la ville, Téhéran cherchant tout particulièrement à les cibler ces derniers jours.
Israël a demandé lundi 13 juin à ses ressortissants, qu'elle dit menacés par l'Iran, de quitter au plus vite Istanbul. Dernier règlement de comptes en date dans la mégapole turque perçue de longue date, par son immensité et sa situation géographique unique, comme un nid d'espions.
En ce début de saison estivale, l'affaire tombe mal pour la Turquie, confrontée à une grave crise économique et à une inflation galopante.
Les touristes israéliens sont loin d'être les plus nombreux, mais près de 160.000 ont visité la Turquie entre janvier et avril, précise Hamit Kuk, membre de la direction de l'Association des agents de voyages.
"La Turquie est un pays sûr", a réagi mardi Ankara, ajoutant dans un communiqué de son ministère des Affaires étrangères qu'elle "continue de lutter contre le terrorisme à l'intérieur et hors de ses frontières".
Même si Israël n'était pas nommément cité, il s'agissait de répondre aux alertes anxiogènes du patron de la diplomatie israélien Yaïr Lapid. D'autant que la presse israélienne a fait état, parfois en détail, de tentatives d'attaques contre des touristes israéliens à Istanbul, déjouées par la coopération des services turcs et israéliens. Les premiers auraient même alerté le Mossad du danger.
Ce n'est pas la première fois que les Iraniens viennent solder des comptes sur le sol turc, relèvent des experts contactés par l'AFP. "Les Iraniens conduisent tout le temps des assassinats et des enlèvements sur le sol turc, mais en visant généralement les opposants iraniens", note Savash Porgham, journaliste et chercheur iranien basé en Turquie.
Des tentatives d'attentats contre des touristes israéliens seraient régulièrement déjoués (AFP)
En s'en prenant aux Israéliens, poursuit-il, l'Iran a deux objectifs : "Des représailles, pour venger l'assassinat d'un responsable iranien, civil ou militaire". Ou bien l'enlèvement comme monnaie d'échange.
En février dernier, les services de renseignement turcs (MIT) ont empêché l'assassinat de l'homme d'affaires turco-israélien Yair Galler par les Iraniens. Sa mort aurait vengé celle de Mohsen Fakhrizadeh, un des architectes du nucléaire iranien, tué en novembre 2020 par le Mossad, rappelle-t-il.
Relations tendues entre Téhéran et Ankara
Circonstance aggravante, les relations ne sont pas au grand beau actuellement entre Téhéran et Ankara, avance Nihat Ali Özcan, ancien officier de l'armée turque, professeur de droit et analyste, qui parle d'une "compétition intense" des services de renseignement des deux pays.
La Turquie, rappelle-t-il, change d'alliances au Moyen-Orient en se rapprochant des Émirats, des Saoudiens et… d'Israël. De plus, "elle s'active dans le nord de l'Irak au côté du clan (kurde) des Barzani contre le PKK et ses alliés chiites", soutenus par Téhéran, détaille-t-il.
La Turquie a lancé mi-avril une opération dans le nord de l'Irak contre les bases du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), classé comme mouvement "terroriste" par Ankara et ses alliés occidentaux.
Et le président Recep Tayyip Erdogan menace d'intervenir contre le même PKK et ses alliés dans le nord de la Syrie pour sécuriser sa frontière, au grand déplaisir de Téhéran, soutien de Damas.
Sa taille et sa densité de population rendent Istanbul difficilement contrôlable (AFP)
Or, "depuis la révolution iranienne il y a 40 ans, l'Iran est très actif en Turquie et ses services y entretiennent de nombreuses cellules", explique M. Özcan. De la même façon, "même quand les relations politiques sont tendues, en coulisse, les services israéliens et turcs coopèrent et partagent leurs informations".
Une "immensité incontrôlable"
Enfin, rappelle-t-il, la Turquie reste un terrain sensible pour tous les services de la région : iranien, israélien, mais aussi russe et ukrainien. La présence de tous ces services antiterroristes représente "autant de problèmes potentiels".
Or, malgré de très nombreuses caméras de surveillance, publiques et privées, la mégapole stambouliote reste une "immensité incontrôlable", assure le géographe français Jean-François Pérouse, l'un de ses meilleurs connaisseurs.
Avec ses 17 millions d'habitants, à cheval sur deux continents, aux portes du Moyen-Orient et du Caucase, Istanbul n'usurpe pas sa réputation de nid d'espions.
"Depuis la Seconde guerre mondiale et même la Première, l'immensité de la ville rend possible le traquage des opposants par tous les services et l'anonymat de leurs agents", insiste-t-il.
Parmi les nombreuses communautés qui ont trouvé asile sur les rives du Bosphore, les 113.000 Iraniens officiellement résidents comptent parmi les mieux représentés. Et les meilleurs acheteurs d'immobiliers - devancés depuis avril par les Russes.
Avec AFP
Israël a demandé lundi 13 juin à ses ressortissants, qu'elle dit menacés par l'Iran, de quitter au plus vite Istanbul. Dernier règlement de comptes en date dans la mégapole turque perçue de longue date, par son immensité et sa situation géographique unique, comme un nid d'espions.
En ce début de saison estivale, l'affaire tombe mal pour la Turquie, confrontée à une grave crise économique et à une inflation galopante.
Les touristes israéliens sont loin d'être les plus nombreux, mais près de 160.000 ont visité la Turquie entre janvier et avril, précise Hamit Kuk, membre de la direction de l'Association des agents de voyages.
"La Turquie est un pays sûr", a réagi mardi Ankara, ajoutant dans un communiqué de son ministère des Affaires étrangères qu'elle "continue de lutter contre le terrorisme à l'intérieur et hors de ses frontières".
Kidnapper ou se venger
Même si Israël n'était pas nommément cité, il s'agissait de répondre aux alertes anxiogènes du patron de la diplomatie israélien Yaïr Lapid. D'autant que la presse israélienne a fait état, parfois en détail, de tentatives d'attaques contre des touristes israéliens à Istanbul, déjouées par la coopération des services turcs et israéliens. Les premiers auraient même alerté le Mossad du danger.
Ce n'est pas la première fois que les Iraniens viennent solder des comptes sur le sol turc, relèvent des experts contactés par l'AFP. "Les Iraniens conduisent tout le temps des assassinats et des enlèvements sur le sol turc, mais en visant généralement les opposants iraniens", note Savash Porgham, journaliste et chercheur iranien basé en Turquie.
Des tentatives d'attentats contre des touristes israéliens seraient régulièrement déjoués (AFP)
En s'en prenant aux Israéliens, poursuit-il, l'Iran a deux objectifs : "Des représailles, pour venger l'assassinat d'un responsable iranien, civil ou militaire". Ou bien l'enlèvement comme monnaie d'échange.
En février dernier, les services de renseignement turcs (MIT) ont empêché l'assassinat de l'homme d'affaires turco-israélien Yair Galler par les Iraniens. Sa mort aurait vengé celle de Mohsen Fakhrizadeh, un des architectes du nucléaire iranien, tué en novembre 2020 par le Mossad, rappelle-t-il.
Relations tendues entre Téhéran et Ankara
Circonstance aggravante, les relations ne sont pas au grand beau actuellement entre Téhéran et Ankara, avance Nihat Ali Özcan, ancien officier de l'armée turque, professeur de droit et analyste, qui parle d'une "compétition intense" des services de renseignement des deux pays.
La Turquie, rappelle-t-il, change d'alliances au Moyen-Orient en se rapprochant des Émirats, des Saoudiens et… d'Israël. De plus, "elle s'active dans le nord de l'Irak au côté du clan (kurde) des Barzani contre le PKK et ses alliés chiites", soutenus par Téhéran, détaille-t-il.
La Turquie a lancé mi-avril une opération dans le nord de l'Irak contre les bases du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), classé comme mouvement "terroriste" par Ankara et ses alliés occidentaux.
Et le président Recep Tayyip Erdogan menace d'intervenir contre le même PKK et ses alliés dans le nord de la Syrie pour sécuriser sa frontière, au grand déplaisir de Téhéran, soutien de Damas.
Sa taille et sa densité de population rendent Istanbul difficilement contrôlable (AFP)
Or, "depuis la révolution iranienne il y a 40 ans, l'Iran est très actif en Turquie et ses services y entretiennent de nombreuses cellules", explique M. Özcan. De la même façon, "même quand les relations politiques sont tendues, en coulisse, les services israéliens et turcs coopèrent et partagent leurs informations".
Une "immensité incontrôlable"
Enfin, rappelle-t-il, la Turquie reste un terrain sensible pour tous les services de la région : iranien, israélien, mais aussi russe et ukrainien. La présence de tous ces services antiterroristes représente "autant de problèmes potentiels".
Or, malgré de très nombreuses caméras de surveillance, publiques et privées, la mégapole stambouliote reste une "immensité incontrôlable", assure le géographe français Jean-François Pérouse, l'un de ses meilleurs connaisseurs.
Avec ses 17 millions d'habitants, à cheval sur deux continents, aux portes du Moyen-Orient et du Caucase, Istanbul n'usurpe pas sa réputation de nid d'espions.
"Depuis la Seconde guerre mondiale et même la Première, l'immensité de la ville rend possible le traquage des opposants par tous les services et l'anonymat de leurs agents", insiste-t-il.
Parmi les nombreuses communautés qui ont trouvé asile sur les rives du Bosphore, les 113.000 Iraniens officiellement résidents comptent parmi les mieux représentés. Et les meilleurs acheteurs d'immobiliers - devancés depuis avril par les Russes.
Avec AFP
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