Capitole: Trump tentait «vilement» de manipuler la justice américaine
Quand une poignée de responsables intègres sauve la démocratie américaine. Là est le pouvoir des institutions démocratiques. Les dirigeants passent, les institutions restent, seules gardiennes de la loi. Liz Cheney, une des rares élus républicains membres de la commission d'enquête parlementaire sur l'assaut du Capitole, avaient répliqué la semaine dernière aux matamores du GOP qui lui reprochaient sa félonie envers son parti: "Un jour Trump ne sera plus là, mais votre déshonneur demeurera!" A chaque audience, la commission dévoile les absurdités et les manipulations de l'ex-président. Chaque séance révèle le degré de criminalité et de corruption atteint par Trump. Le plus choquant, c'est qu'une foule de gens lui voue toujours une fidélité, voire une admiration. C'est dire qu'il faut de tout pour faire un monde...

La commission d'enquête parlementaire sur l'assaut du Capitole s'est attaquée jeudi aux tentatives "éhontées" de Donald Trump de pousser le ministère de la Justice à soutenir ses fausses allégations de fraude électorale autour de la présidentielle remportée par Joe Biden.

Au cours de cette cinquième audition publique, les neuf élus - sept démocrates et deux républicains répudiés par leur parti - ont détaillé les pressions exercées par M. Trump sur le ministère et ses efforts pour nommer à sa tête un de ses fidèles prêt à "une ingérence dans les résultats d'une élection présidentielle".

Jeffrey Rosen, et Richard Donoghue, hauts fonctionnaires du ministère de la Justice ont témoigné jeudi devant la commission parlementaire. Ils étaient les héros de la journée.

"Donald Trump ne voulait pas simplement que le ministère de la Justice enquête. Il voulait que le ministère de la Justice l'aide à légitimer ses mensonges et déclare sans fondement que l'élection était truquée", a noté le président de la Commission, Bennie Thompson.

Les élus sont revenus sur les tensions au sein du ministère les jours précédant le 6 janvier 2021, lorsque le président battu avait été confronté à une révolte interne tandis qu'il tentait d'installer un de ses proches à la tête de l'institution.

"C'était une tentative éhontée d'utiliser le ministère de la Justice pour faire progresser les intérêts politiques personnels du président", a ajouté M. Thompson.

L'ancien ministre adjoint par intérim, Richard Donoghue, a témoigné pour sa part avoir dit à de nombreuses reprises à l'ancien président américain que ses accusations de fraude électorale étaient infondées.

M. Trump a simplement répété avoir gagné l'élection présidentielle. "Le président a dit: +dites juste que l'élection était truquée et laissez le reste entre mes mains et celles des élus républicains+", a raconté M. Donoghue, en se basant sur ses notes prises lors d'une conversation téléphonique avec M. Trump et l'ex-ministre par intérim Jeffrey Rosen.

Dans la salle d'audience, le citoyen Sean Penn était intéressé par l'enquête.

Voyant que les plus hauts responsables du ministère de la Justice refusaient de plier, le président battu a tenté d'installer un de ses proches à la tête de l'institution. Jeffrey Clark, un fonctionnaire de rang intermédiaire ayant adopté les théories poussées par le président sur une élection truquée, devait annuler les conclusions du ministère - qui n'avait trouvé aucune preuve de fraude ayant pu changer l'issue du scrutin de novembre.
"Un crime"

Jeffrey Clark devait aussi intervenir au nom du ministère pour refuser de certifier le résultat de l'élection dans l'Etat clé de Géorgie, où Joe Biden l'avait emporté avec seulement 12.000 voix d'avance.


La Commission a appris que M. Clark avait préparé une lettre destinée aux élus de Géorgie, dans laquelle il affirmait que le ministère avait découvert des preuves de fraudes massives en Géorgie, ce qui était faux. Mais les autres responsables du ministère de la Justice ont refusé de signer cette lettre et un des conseillers juridiques de la Maison Blanche, Eric Herschmann, a révélé avoir dit à Jeff Clark qu'envoyer cette lettre aurait été "un crime".

M. Trump a annoncé à Jeffrey Rosen et Richard Donoghue qu'on lui conseillait de les limoger et de nommer Jeffrey Clark ministre par intérim.

Steven Engel, Jeffrey Rosen, et Richard Donoghue, hauts fonctionnaires du ministère de la Justice, ont témoigné jeudi.

"Je lui ai répondu (...) Monsieur le Président, il faut que vous ayez les responsables qui vous conviennent, mais vous devez comprendre que le ministère de la Justice fonctionne sur la base de faits, de preuves et de lois. Et ça, ça ne changera pas", a raconté M. Donoghue.

L'ancien ministre adjoint a aussi raconté avoir prévenu Jeffrey Clark que ses efforts pour justifier les allégations de fraude "n'étaient rien moins qu'une ingérence du ministère de la Justice dans les résultats d'une élection présidentielle".

Jeffrey Rosen, Richard Donoghue, Steven Engel, un haut responsable du ministère, et Pat Cipollone, avocat de la Maison-Blanche, ont menacé de démissionner lors d'une réunion avec le président le 3 janvier, avertissant qu'ils emmèneraient avec eux les meilleurs procureurs fédéraux à travers le pays.

Donald Trump a renoncé à nommer Jeffrey Clark, qui a refusé de témoigner devant la commission d'enquête.

La commission d'enquête a annoncé mercredi que deux sessions supplémentaires auraient lieu en juillet.

Le Congrès interrompt ses travaux le 4 juillet pour deux semaines.

Après un an d'enquête, la commission veut présenter avant la fin de l'été ses conclusions, plaçant Donald Trump au cœur "d'une tentative de coup d'Etat" qui a culminé avec l'assaut de centaines de ses partisans sur le bâtiment du Congrès à Washington le 6 janvier 2021, alors que les élus certifiaient la victoire de Joe Biden.

Les images de chaos dans et autour du Capitole avaient fait le tour du monde et ébranlé pendant quelques heures la démocratie américaine.

AFP
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