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Le secteur postal continue à faire couler beaucoup d’encre, chacun y allant de sa sauce. La récente décision du Cabinet concernant la prorogation du contrat de LibanPost pour la gestion du secteur postal n’a pas trouvé de solution à cette question.

Le secteur postal continue à faire polémique. La décision prise le 16 novembre par le Cabinet de proroger le contrat de LibanPost jusqu’à ce qu’un repreneur récupère le secteur n’a pas résolu la controverse que soulève cette question.

Il a été rapporté que des députés de différentes orientations politiques au sein de la commission parlementaire de l’Information et des Télécommunications, présidée par le député Ibrahim Moussaoui, se sont réunis pour rejeter la décision du Conseil des ministres dans sa forme définitive, notamment en ce qui concerne la prolongation sans délai précis du contrat de LibanPost. Ils poursuivront leurs discussions lors de la réunion de la commission qui doit se tenir jeudi.

Lettre au Conseil des ministres

Par ailleurs, huit députés ont envoyé, en début de semaine, une lettre, au Secrétariat général du Conseil des Ministres, dans laquelle ils estiment que "la résolution n°2 du Conseil des ministres du 16 novembre contient une erreur substantielle, à savoir le lancement de deux appels d’offres: une pour le courrier et l’autre pour le commerce électronique.

Les députés ont considéré cela comme "contraire au contenu des précédentes décisions du Cabinet, en particulier celle publiée en avril dernier, où il était littéralement question d’"approbation de la relance d’un appel d’offres pour l’attribution des services postaux".

Contacté par Ici Beyrouth, le ministre sortant des Télécommunications, Johnny Corm, assure que toutes ces discussions n’ont aucune raison d’être.

"Il suffit de lire la décision du Conseil des ministres stipulant, premièrement, la prorogation du contrat de LibanPost depuis le 1er juin 2023, et ce jusqu’à ce que le secteur postal trouve un repreneur; deuxièmement, charger le ministère des Télécoms de changer les prix des services postaux. Je vais envoyer un courrier dans ce sens à la Cour des comptes pour voir si j’en ai le droit. Et, enfin, le ministère s’est vu confier le lancement d’un seul appel d’offres pour tous les services postaux comprenant le commerce électronique puisque 90% des revenus postaux proviennent du commerce en ligne", indique-t-il.

Notons dans ce cadre que l’appel d’offres remporté par Mérit-Colis Privé aurait permis à l’État de percevoir 5 millions de dollars par an, tandis qu’actuellement, il ne récolte que 40.000 dollars, ce qui engendre des pertes colossales pour le Trésor public. De plus, CMA CGM avait prévu un investissement de 12,8 millions de dollars pour revitaliser le secteur.

De même, les députés signalent qu’au lieu de prolonger le contrat de LibanPost, le Conseil des ministres était censé adhérer à sa décision précédente, publiée en avril dernier, qui préconisait la création d’une société étatique pour gérer les installations postales.

Concernant cette reprise du secteur par le ministère des Télécoms, M. Corm affirme avoir fait une proposition dans ce sens, présentée au Conseil des ministres. "Mais cette option n’a pas été retenue et n’est plus à l’ordre du jour."

Des sources parlementaires estiment aussi que le délai d’au moins huit mois demandé pour préparer les études et le cahier des charges est une exagération de la part du ministre Corm, ce à quoi ce dernier rétorque que pour se conformer à la décision de la Cour des comptes, il faut d’abord assurer des fonds pour effectuer une étude de faisabilité, rappelant qu’une étude menée en 1997 par Deutsche Post avait coûté 4 millions de dollars. "Même si le ministère a besoin de cent mille dollars, il faut du temps pour les obtenir avec en prime une approbation du Conseil des ministres", relève-t-il. Avant de souligner que l’étude aura besoin de 3 à 4 mois pour être réalisée et qu’il faudra modifier le cahier de charges, ce qui coûte également. À noter que Dar al-handasah l’avait fait gratuitement lors du dernier appel d’offres, mais qu’il n’est sans doute plus prêt à le refaire."

Il indique par ailleurs que ces procédures sont longues et que le cahier de charges doit être approuvé avec une publication de trois mois sur le site de l’Autorité du marché public pour que les soumissionnaires puissent soumettre une offre.

Il convient de rappeler que CMA CGM avait remporté, en juillet dernier, via le groupe constitué par les sociétés Merit et Colis Privé France, l’appel d’offres lancé par le ministère des Télécoms. L’objectif était de succéder à LibanPost et de prendre ainsi en charge la gestion du service postal au Liban.

Cependant, la Cour des comptes a rejeté l’attribution du contrat de gestion de la poste au Liban à la société française, même après la demande de révision de M. Corm.

Merit-Colis Privé était la seule entreprise à avoir soumis une offre en juillet dernier pour la gestion du marché postal au Liban. Elle avait également remporté l’appel d’offres lancé par le ministère des Télécoms le 30 mars précédent, visant à succéder à LibanPost. Cependant, à cette époque, des irrégularités avaient été relevées dans le cahier des charges. En conséquence, le ministre des Télécoms avait annulé l’adjudication pour corriger le document, lançant ainsi une nouvelle procédure le 7 juin.