Ce serait peut-être le rendez-vous de la dernière chance : Après son retour de New York, où il doit prononcer le mot du Liban à la 77e Assemblée générale de l’Onu, le Premier ministre désigné Najib Mikati devrait en principe reprendre ses discussions avec le président Michel Aoun au sujet de la formation du gouvernement.

En dépit des échanges de critiques entre les deux hommes et du bras-de-fer qui les oppose au sujet de la composition de la future équipe ministérielle, Baabda et le Sérail maintiennent un minimum de contacts entre eux, comme le montre la visite matinale jeudi de M. Mikati au chef de l’État avec qui il a passé en revue les sujets qu’il compte aborder dans son discours à l’Onu, dont notamment la crise au Liban, la délimitation des frontières maritimes sud avec Israël et la présence des réfugiés syriens.

A sa sortie de Baabda, Najib Mikati a taquiné les journalistes au sujet de la durée de son entretien, laquelle fait régulièrement l’objet de spéculations dans la presse, avant d’indiquer qu’à la prochaine visite, il ne partira pas sans la composition de son équipe sous le bras. Pour la première fois depuis longtemps, le Premier ministre désigné prend le temps de répondre aux questions de la presse à Baabda, ce que d’aucuns ont interprété comme un signe indicateur d’un éventuel déblocage. Celui-ci serait possible à cause d’une entrée en force du Hezbollah au niveau des tractations pour la mise en place d’un cabinet doté des pleins pouvoirs, avant l’expiration du mandat du président Aoun le 31 octobre prochain.

Après les appels répétés du secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah en ce sens, et la visite du ministre sortant des Travaux publics Ali Hamiyé, proche de la formation pro-iranienne, auprès du patriarche maronite mercredi à Dimane, le numéro 2 du Hezbollah, le cheikh Naïm Kassem, a préconisé un renflouement de l’équipe actuelle. "Il n’est pas trop tard pour mettre en place une nouvelle équipe ministérielle en prenant pour point de départ celle qui est actuellement en place. Les forces qui la composent sont d’ailleurs les mêmes qui seront représentées dans la nouvelle qui va voir le jour sous ce mandat", a-t-il dit. "Qu’est-ce qui change donc? Rien. Comme nous avions choisi le groupe de ministres actuels, nous pouvons les garder ou opérer de légers remaniements qui faciliteront la mie en place du nouveau gouvernement", a souligné le cheikh Kassem, reprenant ainsi à son compte les propositions de Najib Mikati et barrant la voie au rêve caressé par Michel Aoun et son gendre, Gebran Bassil, d’élargir la nouvelle équipe ministérielle à travers la nomination de six ministres d’État, dans le seul but serait d’avoir la haute main sur ses décisions.

"Maintenir la même équipe faciliterait l’élection d’un nouveau président, d’autant que sa durée de vie sera courte. Il est donc inutile de compliquer les choses avec des revendications et des conditions", a-t-il encore dit dans ce qui semble être un nouveau message indirect au camp présidentiel. "L’intérêt du pays, a insisté de nouveau Naïm Kassem, réside dans la mise en place d’un gouvernement et la tenue de la présidentielle dans les délais constitutionnels".

Le responsable du Hezbollah s’en est pris ensuite aux détracteurs de son parti, mais sans violence, leur reprochant de "bloquer le redressement" du pays, après avoir appelé à "un dialogue dans la perspective d’une entente autour du prochain chef de l’État et des moyens de réédifier le Liban".

Il a critiqué en particulier "les démonstrations de force et de défi de certains", en allusion au dernier discours du chef des Forces libanaises, Samir Geagea. "Elles sont inutiles. Que ceux qui pouvaient rassembler le plus grand nombre de députés pour s’entendre sur un président s’y mettent pour qu’on passe à une nouvelle étape", a conclu le cheikh Kassem.