Le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, s’est déchaîné, sans le nommer, contre le Hezbollah, l’accusant de vouloir changer la politique et les principes du chef de l’État.

Le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, a haussé le ton dimanche, se déchaînant contre le Hezbollah, sans le nommer, l’accusant de vouloir changer la politique et les principes du président de la République. "Les forces politiques continuent de manœuvrer au sujet de l’échéance présidentielle et s’empêchent d’élire un nouveau chef de l’État, qui résisterait aux difficultés, refuserait les ingérences et préserverait la spécificité du Liban", a-t-il déclaré dans son homélie.

"Nous ne craignons pas un changement de l’identité et de la communauté du président de la République maronite, mais de sa politique et de ses principes, en adhérant à des politiques, des axes et des pays qui s’efforcent de mettre la main sur le Liban et de le transformer en zone d’influence", a-t-il lancé, critiquant le Hezbollah, qui insiste pour l’élection d’un président qui ne poignarderait pas la "Résistance" dans le dos. "Cela est impossible, a affirmé Mgr Raï, parce que la décision de faire face au changement de l’identité du président de la République et à l’entité libanaise est déjà prise quels que soient les sacrifices. Que nul ne croie qu’il est capable de changer ce patrimoine historique et cette spécificité. Celui qui pense qu’il peut prendre en otage la présidence de la République se trompe. Les forces nationales souverainistes, qu’elles soient chrétiennes ou musulmanes, sont appelées à s’unir et à former un comité conjoint pour défendre le Liban."

Constatant que "les démarches intérieures et extérieures déployées" pour faire élire un président de la République ont été "vaines", Mgr Raï a mis l’accent sur "la division dans les positions des factions locales aux ramifications étrangères qui distraient l’opinion publique avec la question des réunions du Conseil des ministres". "Avec la fin du sexennat (de Michel Aoun), nous avons déclaré que ce gouvernement est démissionnaire et qu’il doit expédier les affaires courantes, a rappelé Mgr Raï. Il est de son devoir de s’entendre sur le concept d’expédition des affaires courantes pour éviter toute problématique dont nous pouvons nous en passer. Ce gouvernement a pour mission de résoudre les problèmes des gens et d’empêcher l’effondrement de l’État, d’autant que la mascarade des séances pour l’élection d’un président de la République se poursuit." Cela, selon Mgr Raï, alors que la livre continue de perdre de sa valeur face au dollar dont le taux de change sur le marché parallèle a dépassé les 50.000 livres, que le prix des 20 litres d’essence a frôlé le million de livres et celui des produits alimentaires et médicaux ont décuplé. "Comment le peuple peut-il vivre? s’est-il interrogé. Nous craignons que vous ne vouliez que le peuple vive dans cette misère pour des raisons inavouables."

Mgr Raï a, par ailleurs, accusé les députés et ministres d’être "responsables de la nouvelle honte qui frappe le Liban du fait qu’il ait été privé de son droit de vote aux Nations unies", pour ne pas avoir payé la contribution minimale au budget de l’ONU, dont le montant s’élève à plus de deux millions de dollars. "Votre responsabilité est d’autant plus grande que le Liban est l’un des pays fondateurs de l’ONU", a-t-il poursuivi, notant au passage que le pays du Cèdre "n’aurait pas non plus payé ses contributions à d’autres organisations arabes et internationales". Et de se demander comment, dans ce cas, le Liban pourrait-il continuer à solliciter l’aide des Nations unies.

Amine Gemayel à Bkerki

Par ailleurs, le patriarche Raï a reçu l’ancien président de la République, Amine Gemayel, qui a souligné la nécessité de "revenir au texte de la déclaration de Baabda", initiée par l’ancien chef de l’État Michel Sleiman et votée en 2012. Dans ce document, reconnu par les Nations unies et la Ligue arabe, il est notamment question de garder le Liban à l’écart des conflits régionaux et internationaux. Il a estimé que le dialogue, auquel invite notamment le président de la Chambre, est "un prétexte pour ne pas trouver une solution, alors qu’il est nécessaire de s’entendre sur les principes susceptibles de mener à une vraie paix".