Les observateurs avertis ne peuvent que constater la réalité amère de la triste situation au Liban : l’année 2021 a pratiquement consacré le diktat du Hezbollah au niveau des diverses sphères du pouvoir, et rien n’indique pour l’heure que la situation sera différente durant la nouvelle année 2022. Et pour cause : il s’est avéré jour après jour qu’il n’existe pas d’autorité politique au Liban capable de gérer le chaos dans lequel se débat le pays.

Pire encore : la seule autorité agissante et capable de s’imposer est celle du Hezbollah, sauf que ce parti est au service des seuls intérêts de la République islamique iranienne. Comment ne le serait-il pas puisqu’il ne représente qu’une brigade au sein de la structure des Gardiens de la Révolution iranienne ? Comment dans de telles conditions serait-il possible de planifier l’avenir du pays lorsque cet avenir est décidé à Téhéran dont les intérêts sont totalement étrangers à ceux du Liban et des Libanais ?

Le plus grave dans les développements locaux qui ont marqué la scène libanaise réside dans le chaos politique qu’a connu le pays à l’ombre d’un gouvernement soumis pratiquement au diktat du tandem chiite, et plus particulièrement du Hezbollah, en dépit de toutes les compétences dont jouit le Premier ministre Nagib Mikati qui connait bien, plus spécifiquement, les grands dossiers de la région et du monde. Mais cela n’a pas eu l’impact requis au niveau de l’exercice du pouvoir.

Dans le contexte actuel, le Hezbollah s’obstine à vouloir contrôler le déroulement de l’enquête sur la double explosion au port de Beyrouth, le 4 août 2020. Nul n’ignore désormais que le parti chiite s’oppose à la divulgation de tout élément de l’enquête qui pourrait indiquer pour quelles raisons des tonnes de nitrate d’ammonium ont été entreposées dans l’un des hangars du Port pendant des années, et quelle est l’identité de la partie qui avait les moyens de sortir du Port certaines quantités de ce produit pour utilisation en Syrie ou ailleurs.

L’année 2021 a ainsi dévoilé qu’il n’existe pas de gouvernement au Liban et que le Hezbollah a réussi à contrôler tous les rouages du pouvoir après avoir imposé ses choix sur les plans de la désignation du président de la République et de la constitution du gouvernement, sans compter qu’il se permet de décider si le Conseil des ministres peut se réunir ou non et si la Justice peut ou non mener à bien ses investigations sur des affaires aussi cruciales que l’explosion du 4 août 2020.

Le Liban paye ainsi le prix du fait accompli qui a permis au Hezbollah de décider qui serait président de la République, ce qui a été rendu possible par le fait que Michel Aoun a accepté d’accéder à la Première Magistrature dans de telles conditions. Résultat pratique : la présidence de la République est devenue l’otage du Hezbollah et de la République islamique. Il faudrait donc s’attendre à un accroissement des pressions iraniennes sur le Liban en 2022, d’autant que l’Iran perçoit le Liban comme une simple carte entre ses mains et ne se préoccupe nullement du sort subi ainsi par les Libanais.
Le Liban a perdu en 2021 toute capacité de résistance. Preuve en est que le président de la République et le Premier ministre n’ont adopté aucune position claire après l’agression contre Aïn el-Remmaneh, dont les habitants n’ont fait que se défendre. De même, le chef de l’Etat ne semble pas été inquiété outre mesure par l’effondrement du système bancaire libanais ni par l’isolement arabe dont pâtit le Liban.

Tous les pouvoirs sont paralysés dans le pays du fait que le président de la République n’a que deux idées en tête : assurer l’élection de son gendre Gebran Bassil à la présidence ; et manifester sa rancune à l’égard de toute personne qui a réussi une action donnée, comme la reconstruction du centre-ville de Beyrouth après son éviction du palais de Baabda le 13 octobre 1990.

En dehors de ces deux buts, c’est le néant, comme le montre le dernier discours du président de la République, qui a tenté de donner l’impression qu’il se démarque du Hezbollah – alors qu’il apparaît clairement que le parti chiite n’épargne aucun effort pour imposer le fait que le Liban a changé de visage et qu’il gravite dans le giron de l’Iran, comme l’ont illustré les activités organisées, au Liban, pour la deuxième commémoration de l’assassinat de Kassem Soleimani, le chef de al-Qods relevant des Gardiens de la Révolution iranienne.