Les actions du Hamas dans le sud du Liban ont suscité un ras-le-bol libanais. Pourquoi est-ce que le Liban est toujours mis sur la sellette dans le conflit du Hamas avec Israël? Pourquoi chercher à réactiver le front du Sud sous prétexte de désorienter Tel Aviv et d’alléger la pression sur Gaza ?

Les événements récents au Sud du pays indiquent que les Gardiens de la révolution iranienne ont l’intention de centraliser les fronts et de modifier les règles du conflit en s’appuyant sur le Hamas plutôt que sur le Hezbollah.

Des proches du Hezbollah ont affirmé que "nous sommes témoins d’une nouvelle forme de confrontation entre les forces de la résistance face à Israël via la centralisation des fronts géographiques". En parallèle, Israël a fait porter le chapeau de l’escalade au Hamas en prenant le soin d’épargner le Hezb. Ces événements ne font que confirmer l’engagement de Tel Aviv envers l’accord de délimitation de la frontière maritime avec le Liban, parrainé par Washington et le Hezbollah, qui a joué un rôle actif dans cette affaire. En effet, ce dernier ne serait plus en mesure, selon certains observateurs, de mener des actions militaires au Sud, vu que cet accord vise à assurer la stabilité et la sécurité dans les zones pétrolières et gazières. Israël et le Hezbollah en respectent donc les règles.

Selon l’opposition, l’implication du Hezbollah dans la délimitation de la frontière maritime pose les prémices de la stabilité. Il en est de même pour l’accord conclu entre l’Arabie saoudite et l’Iran sous l’égide de la Chine. Or de sources proches du Hezb, on affirme que ni la délimitation de la frontière maritime ni l’accord entre l’Arabie saoudite et l’Iran n’auront une influence quelconque sur la stabilisation du front sud ainsi que sur la scène intérieure.

Selon un ancien ministre des Affaires étrangères, l’escalade au Sud est une sorte de mise à l’épreuve de l’accord de normalisation des relations diplomatiques entériné par les ministres des Affaires étrangères saoudien et iranien en présence de leur homologue chinois. En effet, certaines factions lésées tentent de torpiller cet accord et d’en empêcher sa mise en œuvre.

Un responsable iranien a affirmé, suite à la signature de l’accord en question, que "la dissipation de malentendus et l’ouverture vers un avenir nouveau entre les deux pays engendrera, sans aucun doute, sécurité et stabilité dans la région". De plus, souligne-t-il, nous assisterons à un regain de coopération entre les pays du Golfe et le monde islamique afin de faire face aux défis actuels". Et d’ajouter que "l’escalade au Sud était certainement l’œuvre de factions palestiniennes, même s’il est inconcevable que le Hezb n’ait pas été au courant", tout en assurant que la résurgence du facteur palestinien prouve le changement dans les règles du conflit, auquel Israël ripostera avec force et véhémence.

Par ailleurs, selon certaines sources, un responsable américain assure que le Hezb entraîne des membres du Hamas dans la Békaa sur les modalités de lancement de missiles de longue portée dans le but de frapper Israël, et ce, en collaboration avec les Gardiens de la révolution islamique et la Syrie. L’appel de Netanyahu à la retenue dans la région, et son dédouanement du Hezb de toute responsabilité dans l’escalade, montrent clairement son refus de la confrontation.

D’autant plus que l’administration de Joe Biden s’oppose à toute escalade ; ce qui restreint de ce fait la liberté d’action d’Israël qui ne jouit plus du soutien inconditionnel des États-Unis.

La question reste de savoir si les ramifications militaires de l’Iran dans la région seront en mesure de dynamiter l’accord afin de maintenir leur position et leur rôle dans la région ou si la Chine a d’autres tours dans son sac qui lui permettront de mettre en œuvre ledit accord.

L’escalade militaire au Sud est une tentative évidente de faire entrer la région dans une guerre. Mais elle a fait long feu vu que les capitales qui détiennent un pouvoir de décision, à savoir Washington, Pékin et Paris, ne souhaitaient pas cela.

L’utilisation de la carte palestinienne par l’Iran pour créer un "Hamas land" dans le Sud a eu pour effet d’accentuer les revendications libanaises portant sur le fait que les camps palestiniens ne devraient pas rester hors de contrôle de l’État, car cela ne concorde pas avec le droit. Par ailleurs, cette situation est inacceptable pour les Palestiniens eux-mêmes, car ils pâtissent des conséquences de la prolifération des armes et des affrontements quotidiens au sein des camps. Sur ce, il serait opportun de placer les camps sous tutelle de l’État et d’y contrôler les armes en interne et de les interdire à l’extérieur, comme l’a demandé le président Mahmoud Abbas, exécutant ainsi les décisions prises en 2006 lors de la table de dialogue.

De son côté, le chef du CPL, Gebran Bassil, a déclaré que "l’accord du Caire est mort, entraînant avec lui Le Fatah land". "Nous ne tolérerons pas que des agressions contre Israël se fassent depuis notre territoire, a-t-il souligné. Nous refusons toute arme sur notre territoire à l’exception des armes libanaises. Nous ne voulons pas que notre pays soit une rampe de lancement pour quiconque.  Nous refusons que des missiles soient lancés à partir de notre territoire". Il a également déclaré que la stratégie de défense était au cœur de l’accord de Mar Mikhael.

Selon des sources souverainistes, le Hezb a utilisé le Sud pour exécuter l’agenda iranien. Aujourd’hui, l’Iran s’en remet au Hamas et au Jihad pour faire monter la tension.

Par conséquent, on est en droit de se demander si le Hamas est de retour sur la scène libanaise, sachant que son rôle sera tributaire de l’agenda iranien.

Un ancien ministre affirme que les Palestiniens savent pertinemment, notamment après les événements de Nahr el Bared et de Miyeh w Miyeh et de Ain el Helwé, qu’il leur est impossible d’effectuer un retour armé sur la scène libanaise et l’utiliser dans le cadre d’une confrontation armée.

Certaines sources politiques proches de la banlieue sud (fief du Hezbollah) affirment que le chef des brigades d’Al-Qods, Ismail Kaani, s’est rendu au Liban suite à l’incident du lancement des missiles à partir du sud-Liban, où il a présidé une réunion à laquelle ont participé des représentants du Hezbollah, du Hamas et du Djihad islamique afin de mettre au point un plan d’unification des fronts contre Israël.

Sur base de ces données, certaines factions de l’opposition réclament le contrôle des frontières libanaises nord et est avec la Syrie. L’État devrait jouer un rôle efficace pour empêcher que le Liban ne redevienne un théâtre d’affrontements utilisé à discrétion par les Palestiniens.

D’aucuns se demandent comment le Liban peut-être, à lui seul, un théâtre d’affrontement alors que les autres pays arabes s’engagent à maintenir le calme et la stabilité, et que certains ont même normalisé leurs relations avec Israël.

Dans ce contexte, reste à savoir pourquoi certaines factions telles que le Hamas et le Jihad souhaitent voir le Sud s’embraser à ce moment précis et pourquoi impliquer le Liban et en faire un théâtre d’affrontements, et à qui profite le crime?