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L’émissaire français, Jean-Yves Le Drian, a cautionné l’appel au dialogue du président de la Chambre, Nabih Berry, lorsqu’il a exprimé l’espoir, durant son entretien avec le Premier ministre sortant, Najib Mikati, qu’il "constitue le début d’une solution" au Liban.

La troisième phase de la mission de bons offices, engagée par le représentant personnel du président français pour le Liban, Jean-Yves Le Drian, pour aider au déblocage de la présidentielle au Liban, est articulée principalement autour de l’organisation d’un dialogue qui donnerait lieu, ensuite, à l’élection d’un nouveau chef de l’État. Une feuille de route qui renvoie à celle proposée par le président de la Chambre, Nabih Berry, qui avait convié les députés à un dialogue de sept jours au terme duquel il s’est engagé à convoquer une réunion parlementaire électorale et des tours successifs jusqu’à l’élection d’un nouveau chef de l’État. À cette nuance près: le dialogue devra porter, selon Paris, sur le chantier que le nouveau locataire de Baabda est appelé à lancer, pour sortir le pays de la crise.

L’émissaire français a d’emblée cautionné l’initiative de M. Berry, lorsqu’il a exprimé l’espoir, durant son entretien avec le Premier ministre sortant, Najib Mikati, qu’elle "constitue le début d’une solution" au Liban, selon un communiqué du bureau de presse de la présidence du Conseil.

M. Le Drian a entamé sa tournée à Beyrouth par un entretien avec M. Mikati. Et s’il a pris soin d’évoquer l’importance de l’initiative du président de la Chambre, au cours de ses discussions avec lui, c’est sans doute pour adresser un message aux différents acteurs politiques libanais au sujet de l’élément principal de sa mission, indique-t-on dans l’entourage du Premier ministre.

De sources proches de Aïn el-Tiné, on a également fait état d’une convergence de vues entre MM. Berry et Le Drian, au sujet de l’importance d’un dialogue qui permettrait d’en finir avec le vide à la tête de l’Etat. De mêmes sources, on a indiqué que l’envoyé du président Macron est "convaincu" de l’opportunité de cette sortie de crise.

Selon les premières indications relatives à la série d’entretiens que M. Le Drian a eus mardi, au lendemain de son arrivée à Beyrouth, ce sont les réponses fournies par les députés aux deux questions que l’émissaire français leur avait adressées qui devraient servir de base pour l’établissement d’un agenda pour un éventuel dialogue. Les deux questions portaient sur les chantiers prioritaires qu’un nouveau président est supposé lancer ainsi que sur les qualités et les compétences du locataire de Baabda.

Priorité au chantier

Il est intéressant de relever dans ce contexte que la porte-parole du Quai D’Orsay, Anne-Claire Legendre, a mis en relief cet élément en évoquant lors d’un point de presse, mardi, la mission de M. Le Drian à Beyrouth.

Après avoir indiqué que l’envoyé du président Macron demeurera au Liban jusqu’au 15 septembre, elle a déclaré: "Face à l’urgence de sortir de l’impasse politique actuelle, il évoquera avec tous acteurs les chantiers prioritaires à traiter pour le prochain président de la République, afin de faciliter l’émergence d’une solution consensuelle au Parlement pour sortir de la vacance institutionnelle".

Mme Legendre a souligné qu’au cours de sa mission, "menée en coordination avec les États-Unis, l’Arabie saoudite, le Qatar et l’Egypte", M. Le Drian s’entretiendra "avec tous les acteurs politiques représentés au Parlement, élus par les Libanais et qui ont la responsabilité d’élire le président de la République".

"Comme l’ont rappelé le président de la République et la ministre de l’Europe et des Affaires étrangères lors de la conférence des ambassadrices et ambassadeurs, La France est déterminée à œuvrer en faveur de la souveraineté et la stabilité du Liban, un pays que la France n’abandonnera pas", a-t-elle ajouté, répondant ainsi indirectement aux rumeurs sur des dissonances au sein du groupe des cinq ainsi que sur une présumée volonté de Paris de renoncer à son initiative.

"La situation continue en effet de se dégrader avec un affaiblissement préoccupant des institutions de l’État dans un contexte où il n’y a également plus de gouverneur de la Banque du Liban, où il y a des tensions sécuritaires, un Parlement qui ne se réunit plus pour voter les lois indispensables au redressement du pays et pour la prospérité des Libanais, une hyper inflation, une économie de cash qui fragilise la souveraineté du pays et des forces vives qui continuent de quitter le pays ", a-t-elle relevé, en réaffirmant l’urgence de l’élection d’un président.

Le Quai d’Orsay a ainsi remis les pendules à l’heure sur trois points, le premier étant la cohésion au sein du groupe des cinq. Celle-ci s’est reflétée dans les concertations franco-saoudiennes à Paris, lundi, ainsi que dans la réunion que l’ambassadeur d’Arabie saoudite, Walid Boukhari, tiendra jeudi après-midi avec les députés sunnites de la Modération nationale (Ahmad Kheir, Walid Baarini, Mohammad Sleiman, Abdelaziz Samad), en présence de l’émissaire français.

Le deuxième point se rapporte à l’un des principaux éléments du dialogue à venir, si jamais celui-ci se tient, à savoir le chantier que le nouveau président est appelé à lancer pour mettre le Liban sur la voie d’un redressement. Ce qui signifie que le choix du candidat est tributaire de sa capacité à lancer tout un programme de réformes indispensables et exigées par la communauté internationale.

Le troisième point concerne la détermination de la France à poursuivre sa mission en faveur d’une normalisation au Liban.

Aïn el-Tiné et Yarzé

Accompagné de l’ambassadeur de France, Hervé Magro, M. Le Drian a commencé sa tournée au Sérail.

Au cours de la réunion, il a déclaré être "venu au Liban pour poursuivre sa mission". Il a ajouté qu’il "n’émettrait pas d’avis avant d’avoir achevé les contacts et les rencontres prévus". Il a aussi souhaité, selon le bureau de presse de M. Mikati, que "l’initiative annoncée par le chef du Parlement constitue le début d’une solution".

M. Le Drian s’est ensuite rendu à Ain el-Tiné. À l’issue de la réunion, le président du Parlement a fait état d’une "convergence de vues avec M. Le Drian" au sujet du dialogue.

Il a rendu visite par la suite au commandant en chef de l’armée, le général Joseph Aoun, à Yarzé. Sur son compte X, l’armée a précisé que l’entretien a porté sur "la situation sécuritaire et les défis auxquels l’armée est confrontée, notamment l’exode syrien (vers le Liban) et la situation dans les camps palestiniens".

"M. Le Drian a exprimé le soutien continu de son pays à l’armée pour renforcer ses capacités de mener à bien diverses missions", peut-on lire également.

On rappelle que le chef de la troupe est considéré comme le candidat consensuel par excellence. Selon plusieurs sources, le Qatar, membre avec la France du Groupe des Cinq (qui compte également l’Égypte, l’Arabie saoudite et les États-Unis), œuvre de plus en plus activement en vue de son élection à la présidence de la République.

En fin de journée, M. Le Drian a eu deux entretiens successifs avec le chef des Marada, Sleiman Frangié, puis avec le chef du CPL, Gebran Bassil.

Ce dernier s’est dit en faveur de "tout dialogue réel, se rapportant exclusivement à la présidentielle". Il a posé comme condition qu’il soit "limité dans le temps", que "son lieu, son agenda et sa forme soient bien précisés" et qu’il "débouche sur l’élection d’un président, soit par le biais d’une entente sur le nom et la vision d’un candidat, soit à travers la tenue de séances successives, mais au cours d’une seule réunion, pour l’élection d’un président".

Mercredi, M. Le Drian doit se rendre, entre autres, auprès des chefs des Forces libanaises, Samir Geagea, et des Kataëb, Samy Gemayel.

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