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Le mois sacré du Ramadan s’annonce pour le moins mouvementé, à en croire les frappes israéliennes survenues ce matin et hier soir à Baalbeck. Toutefois, la classe politique libanaise reste impassible face au cours des événements à la frontière sud ou à l’est du pays. Paralysée ou indifférente, nul ne le sait vraiment.

Pourtant, la situation est alarmante, en dépit de ce que le gouvernement sortant tente de nous faire croire. Un Conseil des ministres présidé par un Premier ministre démissionnaire (dans tous les sens du terme), qui pose, un petit sourire aux lèvres, devant les caméras, se voulant à la fois rassurant et confiant que les confrontations au sud ne déborderont pas au-delà de la zone en conflit, "inchallah". Une attitude qui laisserait plus d’un déconcertés, face à l’affichage d’un tel laxisme et m’en-fichisme. Les habitants du sud pourraient certainement en témoigner.

Car Najib Mikati, le chef actuel et temporaire de l’Exécutif, réputé pour arrondir les angles et pour remplir son propre agenda, ne fait pas grand-chose pour calmer les tensions dans le sud du pays. Ni lui ni les membres de son Cabinet ne se sont rendus au sud, depuis l’ouverture du front le 8 octobre dernier. Pourquoi le ferait-il, alors que le Hezbollah, son principal allié, gère des affaires qui ne le concernent pas directement? Pourquoi s’occuperait-il des communautés du sud des villages limitrophes, qui voient leurs familles périr, ainsi que leurs propriétés et leurs vivres brûler sous leurs yeux? Pourquoi s’enquerrait-il de leurs besoins et se battrait-il pour leur sécurité, quand la formation pro-iranienne renforce, par la force des armes illégales, son emprise dans la région? Pourquoi se préoccuperait-il de la souveraineté territoriale de son pays, de son indépendance et du monopole étatique des forces armées ou de l’application des résolutions onusiennes? Pourquoi demanderait-il à l’armée libanaise de se déployer à la frontière? Non. M. Mikati préfèrerait rencontrer des émissaires internationaux pour leur rabâcher les mêmes promesses et déplorer son incapacité à gouverner et à expédier les affaires de tous les Libanais. Mais finalement, qui peut le blâmer? Allégeance oblige, il est tenu de jouer le jeu du Hezbollah – à qui il doit sa fonction actuelle –, qui s’attèle minutieusement à faire hausser les enchères sur le marché des négociations régionales.

Il n’en demeure pas moins que Najib Mikati n’est pas le seul condamnable dans cette affaire, bien qu’il soit l’un des principaux coupables, mis à part le Hezbollah. En effet, son gouvernement, aussi insipide qu’inutile, ne cesse de démontrer, au fil des jours, son incompétence et son inefficacité à maîtriser la situation, à commencer par les ministres des Affaires étrangères et de la Défense.

Le premier, Abdallah Bou Habib, fier comme un paon de sa carrière diplomatique, ne cesse d’enchaîner les gesticulations médiatiques, les incartades diplomatiques, les aberrations et les déclarations scandaleuses, à se demander s’il est réellement mandaté pour se prononcer au nom du pays, vu qu’il ignore ses prérogatives et les limites de son poste. Heureusement que certains envoyés internationaux, notamment l’émissaire américain Amos Hochstein ainsi que le ministre britannique des Affaires étrangères, David Cameron, ne prennent même pas la peine de le consulter ou de le rencontrer, sachant que ce ne serait qu’une perte de temps.

Le second, Maurice Slim, ne semble ni intéressé ni concerné par ses responsabilités en tant que ministre de la Défense, alors que le Liban-Sud est à feu et à sang. M. Slim, qui faisait jadis partie de l’armée libanaise, est supposé se battre pour que la seule institution militaire légale et légitime chargée de protéger la souveraineté territoriale et d’assurer la sécurité nationale soit déployée à la frontière, mais préfère manifestement céder les rênes à une milice pro-iranienne et anti-libanaise qui sert les intérêts d’un pays obstructionniste et qui met en péril la sécurité du pays aux dépens de l’armée nationale. Sa seule priorité demeure – décidément! – les nominations au sein des institutions et le partage du gâteau communautaire – obsession qu’il partage avec ses alliés du Courant patriotique libre.

Quant aux "ministres conquérants", à savoir les ministres sortant de l’Énergie, Walid Fayad, et des Affaires sociales, Hector Hajjar, qui ont eu droit à une couverture médiatique intense lorsqu’ils se sont vaillamment rendus le 30 août 2022 à la frontière méridionale pour repousser l’armée israélienne sous les coups de jets de pierre, aucun commentaire ou activité n’a été recensé de leur part en faveur des résidents du sud. Il est évident qu’ils se sentiraient plus en sécurité "au-delà, au-delà du nord du Litani"…