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- L’éditorial – Israël/Iran: la stratégie de la patience
Un épisode chasse l’autre… Au cours des derniers jours, les supputations allaient bon train dans plus d’un milieu médiatique et politique au sujet des tiraillements, voire des sérieuses divergences, ayant émergé entre les États-Unis et Israël concernant la gestion de la guerre de Gaza et son aboutissement géopolitique à moyen et long termes.
À l’origine de ces spéculations, l’abstention US lors du vote au Conseil de sécurité de la résolution 2728 exigeant un cessez-le-feu entre le Hamas et l’armée israélienne. C’était sans doute la première fois que Washington n’imposait pas son véto à une résolution qui allait à l’encontre de la position officielle de Tel-Aviv, hostile à un arrêt des combats à Gaza dans le contexte présent. Ce vote abstentionniste américain avait été interprété comme un nouvel indice du désaccord grandissant, étalé au grand jour, entre l’administration Biden et le cabinet Netanyahou.
L’élan de ceux qui capitalisaient un peu trop vite sur ce désaccord a été toutefois rapidement refroidi par la toute récente décision US, annoncée fin mars, de livrer à Israël 25 avions ultrasophistiqués F35-A, parallèlement à 1.800 bombes MK84 et 500 bombes MK82 extrêmement puissantes, capables d’atteindre des cibles souterraines. Une fois de plus, les États-Unis apportaient la preuve que leur appui total à Israël demeure une constante stratégique, même si des signes «d’impatience» ou des différends se manifestent parfois entre les deux alliés indéfectibles, comme cela a été le cas plus d’une fois par le passé.
Mais cet épisode quelque peu fiévreux ayant marqué ces derniers jours les rapports israélo-US a été rapidement éclipsé par un autre épisode bien plus grave et lourd de conséquences: le raid aérien israélien de lundi après-midi contre un bâtiment relevant du consulat iranien à Damas, où le chef de la Brigade de Jérusalem en Syrie et au Liban (bras armé des pasdaran à l’étranger), Mohammad Reza Zahedi, son adjoint, ainsi que cinq «conseillers» des Gardiens de la révolution iranienne ont été tués.
Nombre d’observateurs et d’analystes se sont aussitôt lancés dans toutes sortes de supputations sur ce que pourrait être la riposte de Téhéran. Outre le caractère symbolique du lieu visé par l’aviation israélienne (un immeuble du consulat), l’importance et la gravité du raid résident dans l’identité des victimes et leurs hautes fonctions. La Brigade de Jérusalem en Syrie et au Liban, en charge des alliés du régime des mollahs dans ces deux pays, a été en effet littéralement décapitée.
Quelle pourrait être la riposte de Téhéran? Le ministère iranien des Affaires étrangères a repris sans tarder la traditionnelle rengaine: «Nous riposterons à l’endroit et au moment que nous jugerons opportuns.» Au-delà de cette classique antienne, un survol rapide de la longue série d’opérations spectaculaires menées ces dernières années par Israël contre de hauts responsables iraniens permet d’illustrer la passivité constante affichée par le pouvoir des mollahs dans ce genre de situation.
Cette passivité est très «élégamment» qualifiée à Téhéran de «stratégie de la patience», une «savante» innovation en la matière qui permet de justifier l’absence de représailles. Que l’on se rafraîchisse la mémoire sur ce plan: l’assassinat de Imad Moghniyé en plein centre de Damas, à sa sortie du centre culturel iranien, le 12 février 2008; la liquidation à Bagdad (par les États-Unis), le 3 janvier 2020, du chef de la Brigade de Jérusalem, Qassem Souleimani, qui était LE leader omnipotent de l’appareil militaro-sécuritaire iranien et l’élément moteur de la stratégie expansionniste des pasdaran au Moyen-Orient; l’assassinat à la périphérie de Téhéran, le 27 novembre 2020, au cours d’une opération digne des films de Mission impossible, du père du programme nucléaire iranien, Mohsen Fakhrizadeh; le vol par le Mossad (autre opération en tous points surréaliste) dans une proche banlieue au sud de la capitale iranienne des archives… du programme nucléaire iranien (!) qui ont été transportées par camion, sans autre forme de procès, en Israël par une nuit sans lune; à cela s’ajoutent les récents assassinats à Damas de plusieurs hauts responsables des Gardiens de la révolution…
À la suite de toutes ces opérations spectaculaires, les dirigeants iraniens reprenaient la formule traditionnelle: «Nous riposterons à l’endroit et au moment de notre choix.» Cependant, les ripostes à cette série d’opérations d’envergure se font toujours attendre.
Le régime des mollahs se cachera-t-il aujourd’hui, encore une fois, derrière le slogan de «patience stratégique» pour s’abstenir de réagir, directement, au raid de lundi, ou considèrera-t-il qu’Israël a franchi une ligne rouge? Dans ce second cas de figure, la République islamique pourrait se lancer elle-même dans un acte de représailles, mais qui serait suffisamment bien dosé et ciblé de manière à éviter une conflagration généralisée avec Israël. Autre cas de figure: compte tenu de ses nombreuses difficultés internes et de ses calculs effectués «à froid», elle pourrait aussi poursuivre sa politique maléfique qui consiste à mener des batailles au moyen de ses mandataires en enjoignant, pour sauver la face, à l’un de ses suppôts de mener une attaque ciblée ou de se livrer à une «escalade» bien jaugée, en prenant bien soin d’éviter un dérapage qui risquerait d’entraîner l’Iran dans un face-à-face militaire avec Israël.
Dans l’attente que se dévoile la réaction iranienne, les spéculations vont bon train – comme à l’accoutumée dans de telles situations – sur les retombées politiques du raid et surtout sur d’éventuelles complicités locales qui auraient permis son exécution de manière aussi minutieuse. Sur le plan politique, des médias américains rapportent que l’administration Biden n’a été informée de l’attaque que quelques minutes seulement avant son exécution et Washington se serait empressé d’affirmer, directement à Téhéran, qu’il n’était nullement impliqué dans cette opération et qu’il n’en avait pas été informé en amont. Si ces informations se confirment, l’attitude de l’administration Biden serait alors parfaitement en phase avec la position de l’ancien président Barack Obama qui, lors de son mandat, avait opté pour une politique qui a eu pour effet de livrer pratiquement le Proche-Orient au pouvoir des mollahs.
Côté israélien, force est de relever que la chronologie des opérations menées au cours de ces dernières années montre que l’État hébreu a ciblé ses actions soit contre les hauts responsables des Gardiens de la révolution, soit contre le programme nucléaire iranien, tout en évitant de s’en prendre aux infrastructures étatiques classiques de manière à établir la distinction entre l’Iran en tant que puissance régionale, d’une part, et les pasdaran et le programme nucléaire, d’autre part. Une politique qui a, là aussi, pour effet, de plonger l’ensemble du Proche-Orient dans une situation de désordre permanent et d’instabilité chronique.
À l’origine de ces spéculations, l’abstention US lors du vote au Conseil de sécurité de la résolution 2728 exigeant un cessez-le-feu entre le Hamas et l’armée israélienne. C’était sans doute la première fois que Washington n’imposait pas son véto à une résolution qui allait à l’encontre de la position officielle de Tel-Aviv, hostile à un arrêt des combats à Gaza dans le contexte présent. Ce vote abstentionniste américain avait été interprété comme un nouvel indice du désaccord grandissant, étalé au grand jour, entre l’administration Biden et le cabinet Netanyahou.
L’élan de ceux qui capitalisaient un peu trop vite sur ce désaccord a été toutefois rapidement refroidi par la toute récente décision US, annoncée fin mars, de livrer à Israël 25 avions ultrasophistiqués F35-A, parallèlement à 1.800 bombes MK84 et 500 bombes MK82 extrêmement puissantes, capables d’atteindre des cibles souterraines. Une fois de plus, les États-Unis apportaient la preuve que leur appui total à Israël demeure une constante stratégique, même si des signes «d’impatience» ou des différends se manifestent parfois entre les deux alliés indéfectibles, comme cela a été le cas plus d’une fois par le passé.
Mais cet épisode quelque peu fiévreux ayant marqué ces derniers jours les rapports israélo-US a été rapidement éclipsé par un autre épisode bien plus grave et lourd de conséquences: le raid aérien israélien de lundi après-midi contre un bâtiment relevant du consulat iranien à Damas, où le chef de la Brigade de Jérusalem en Syrie et au Liban (bras armé des pasdaran à l’étranger), Mohammad Reza Zahedi, son adjoint, ainsi que cinq «conseillers» des Gardiens de la révolution iranienne ont été tués.
Nombre d’observateurs et d’analystes se sont aussitôt lancés dans toutes sortes de supputations sur ce que pourrait être la riposte de Téhéran. Outre le caractère symbolique du lieu visé par l’aviation israélienne (un immeuble du consulat), l’importance et la gravité du raid résident dans l’identité des victimes et leurs hautes fonctions. La Brigade de Jérusalem en Syrie et au Liban, en charge des alliés du régime des mollahs dans ces deux pays, a été en effet littéralement décapitée.
Quelle pourrait être la riposte de Téhéran? Le ministère iranien des Affaires étrangères a repris sans tarder la traditionnelle rengaine: «Nous riposterons à l’endroit et au moment que nous jugerons opportuns.» Au-delà de cette classique antienne, un survol rapide de la longue série d’opérations spectaculaires menées ces dernières années par Israël contre de hauts responsables iraniens permet d’illustrer la passivité constante affichée par le pouvoir des mollahs dans ce genre de situation.
Cette passivité est très «élégamment» qualifiée à Téhéran de «stratégie de la patience», une «savante» innovation en la matière qui permet de justifier l’absence de représailles. Que l’on se rafraîchisse la mémoire sur ce plan: l’assassinat de Imad Moghniyé en plein centre de Damas, à sa sortie du centre culturel iranien, le 12 février 2008; la liquidation à Bagdad (par les États-Unis), le 3 janvier 2020, du chef de la Brigade de Jérusalem, Qassem Souleimani, qui était LE leader omnipotent de l’appareil militaro-sécuritaire iranien et l’élément moteur de la stratégie expansionniste des pasdaran au Moyen-Orient; l’assassinat à la périphérie de Téhéran, le 27 novembre 2020, au cours d’une opération digne des films de Mission impossible, du père du programme nucléaire iranien, Mohsen Fakhrizadeh; le vol par le Mossad (autre opération en tous points surréaliste) dans une proche banlieue au sud de la capitale iranienne des archives… du programme nucléaire iranien (!) qui ont été transportées par camion, sans autre forme de procès, en Israël par une nuit sans lune; à cela s’ajoutent les récents assassinats à Damas de plusieurs hauts responsables des Gardiens de la révolution…
À la suite de toutes ces opérations spectaculaires, les dirigeants iraniens reprenaient la formule traditionnelle: «Nous riposterons à l’endroit et au moment de notre choix.» Cependant, les ripostes à cette série d’opérations d’envergure se font toujours attendre.
Le régime des mollahs se cachera-t-il aujourd’hui, encore une fois, derrière le slogan de «patience stratégique» pour s’abstenir de réagir, directement, au raid de lundi, ou considèrera-t-il qu’Israël a franchi une ligne rouge? Dans ce second cas de figure, la République islamique pourrait se lancer elle-même dans un acte de représailles, mais qui serait suffisamment bien dosé et ciblé de manière à éviter une conflagration généralisée avec Israël. Autre cas de figure: compte tenu de ses nombreuses difficultés internes et de ses calculs effectués «à froid», elle pourrait aussi poursuivre sa politique maléfique qui consiste à mener des batailles au moyen de ses mandataires en enjoignant, pour sauver la face, à l’un de ses suppôts de mener une attaque ciblée ou de se livrer à une «escalade» bien jaugée, en prenant bien soin d’éviter un dérapage qui risquerait d’entraîner l’Iran dans un face-à-face militaire avec Israël.
Dans l’attente que se dévoile la réaction iranienne, les spéculations vont bon train – comme à l’accoutumée dans de telles situations – sur les retombées politiques du raid et surtout sur d’éventuelles complicités locales qui auraient permis son exécution de manière aussi minutieuse. Sur le plan politique, des médias américains rapportent que l’administration Biden n’a été informée de l’attaque que quelques minutes seulement avant son exécution et Washington se serait empressé d’affirmer, directement à Téhéran, qu’il n’était nullement impliqué dans cette opération et qu’il n’en avait pas été informé en amont. Si ces informations se confirment, l’attitude de l’administration Biden serait alors parfaitement en phase avec la position de l’ancien président Barack Obama qui, lors de son mandat, avait opté pour une politique qui a eu pour effet de livrer pratiquement le Proche-Orient au pouvoir des mollahs.
Côté israélien, force est de relever que la chronologie des opérations menées au cours de ces dernières années montre que l’État hébreu a ciblé ses actions soit contre les hauts responsables des Gardiens de la révolution, soit contre le programme nucléaire iranien, tout en évitant de s’en prendre aux infrastructures étatiques classiques de manière à établir la distinction entre l’Iran en tant que puissance régionale, d’une part, et les pasdaran et le programme nucléaire, d’autre part. Une politique qui a, là aussi, pour effet, de plonger l’ensemble du Proche-Orient dans une situation de désordre permanent et d’instabilité chronique.
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