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Une "influenceuse" surnommée Gigi attirait les jeunes vers les appartements où ils étaient violentés.

La seule femme jusque-là impliquée dans l’immonde affaire de Tiktoteurs pédophiles a été arrêtée. Il s’agit d’une "influenceuse", très active sur les réseaux sociaux, surnommée Gigi ou Barbie, qui était vigoureusement recherchée par la police. Elle a pu être arrêtée à Laylaki, dans la banlieue sud de Beyrouth, samedi à l’aube, par des agents du bureau de lutte contre la cybercriminalité.

Le blogueuse jouait le rôle d’"intermédiaire", dans la mesure où sa mission consistait, sur les réseaux sociaux, à attirer les mineurs qui étaient ensuite emmenés dans des appartements où ils étaient violentés et filmés. Elle se chargeait également de menacer les victimes au cas où elles songeraient à dénoncer le réseau.

Onze personnes sont aujourd’hui arrêtées dans le cadre de cette affaire sordide. Toutes ont été déférées devant le Premier juge d’instruction du Mont-Liban, Nicolas Mansour, par le bureau de lutte contre la cybercriminalité qui est désormais engagé sur deux voies: trouver la piste des personnes dont les noms sont apparus durant l’enquête, et traquer d’autres qui n’ont pas été encore identifiées.

De source proche de l’enquête, on apprend que l’avocat général près la cour d’appel, le juge Tanios Saghbini, a engagé de nouvelles poursuites contre cinq personnes, dont la blogueuse Gigi. Il avait émis un mandat de recherche et d’amener à son encontre il y a quelques jours.

Selon la source, Gigi "est impliquée dans des actes graves et a joué un sale rôle dans l’affaire dont des dizaines d’enfants ont été victimes".

Dans les faits relatés par la source, "elle faisait la connaissance des jeunes sur TikTok et les attirait dans les appartements où les membres du réseau opéraient. Elle les accueillait à la porte et les introduisait au salon où des hommes les attendaient. Ces derniers leur offraient des tablettes de chocolat et du jus mélangé à une substance soporifique. Après avoir ingéré la boisson, les enfants perdaient conscience et étaient violés".

Toujours selon la même source, "c’est Gigi qui filmait la scène et prenait des photos qu’elle envoyait aux chefs du réseau établis à l’étranger, dont Paul Méouch, surnommé Jay, et qui finançait une grande partie de l’opération en échange des vidéos, ainsi que Pierre Naffah, en plus d’autres". Le premier est installé en Suède et le second à Dubaï.

Au total, 17 personnes font l’objet de poursuites judiciaires, mais seuls 11, avec Gigi, ont pu être arrêtés. Le juge Mansour doit lancer la semaine prochaine l’instruction.

Selon une source judiciaire, M. Mansour "a examiné attentivement les procès-verbaux de l’enquête, des documents de plusieurs centaines de pages dans lesquels sont consignés de nombreux indices, dont des photos et des vidéos d’actes de torture et d’abus sexuels". "Autant de preuves irréfutables, d’après la source, incriminant les auteurs, les complices et les intermédiaires qui ne peuvent pas nier ces actes ou échapper à la justice."

De même source, on indique que le juge Mansour "ne doit pas tarder à délivrer des mandats d’arrêt contradictoires contre les 11 prévenus et par défaut contre ceux qui ont réussi à se dérober à la justice, qu’ils soient au Liban ou à l’étranger". Leur nombre n’est pas déterminé.

"Les mandats d’arrêt par défaut seront immédiatement envoyés à Interpol, par le biais de son bureau au Liban, de sorte qu’ils deviennent internationaux et contraignants pour tout pays hébergeant l’un des accusés, avec obligation de les rapatrier au Liban dans les plus brefs délais."

De retour de voyage, la procureure générale près la cour d’appel du Mont-Liban, Ghada Aoun, a pris connaissance de l’enquête préliminaire, aux côtés du juge Saghbini, et a donné à la police judiciaire, des instructions déterminées, sur base des éléments consignés dans les procès-verbaux.

Une nouvelle charge a ainsi été ajoutée à celles qui ont motivé l’engagement des poursuites. Il s’agit de "la mise en place d’un réseau criminel de trafic d’êtres humains, de blanchiment d’argent, de l’utilisation des réseaux sociaux, notamment TikTok et de l’usage de faux noms, pour attirer des enfants, les brutaliser, les menacer de mort et les violer".

Dans le même ordre d’idées, toujours selon la source, la nouvelle charge porte sur "le rôle dangereux joué par les chefs et membres du réseau qui forçaient les enfants abusés à consommer de la drogue avant de les violer, les photographier nus, vendre les photos, et, dans certains cas, de tenter de tuer certaines victimes à travers des actes de violence qui ont mis leur vie en danger". Les articles du Code pénal sur lesquels les poursuites sont fondées prévoient "des sanctions sévères allant d’une peine de trois à vingt ans de prison".

Cette affaire sordide n’a pas ému et indigné les Libanais seulement puisqu’elle est également suivie avec attention par des pays arabes et occidentaux, en particulier en raison des ramifications du réseau à l’étranger. Cela laisse à penser que la réponse internationale aux demandes d’entraide judiciaire du Liban pourrait être rapide, étant donné les craintes de voir des actes similaires se reproduire dans les pays abritant des membres de ce réseau.

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