" Le deal entre le Liban et la Jordanie pour l’importation de l’électricité sera mis en veilleuse, le temps que le contrat avec l’Égypte pour l’importation du gaz soit étudié par la Banque mondiale ", confie une source diplomatique occidentale à Ici Beyrouth. 

Alors que la crise de l’électricité bat (encore !) son plein, le ministre libanais de l’Énergie Walid Fayad semble préférer se faire photographier devant les pyramides, au lieu de finaliser et signer le contrat d’importation de gaz avec l’Égypte, qui pourrait constituer un début de solution à la crise énergétique que traverse le Liban depuis plus de dix ans.

Le directeur de la centrale de Zahrani, Ahmad Abbas, a tiré la sonnette d’alarme vendredi lors d’une interview accordée à la chaîne télévisée al-Jadeed. " Les pétroliers en provenance d’Irak ne transportent pas la quantité nécessaire de fuel pour alimenter les centrales de Deir Ammar et de Zahrani ", notant que chacune d’entre elles a besoin de 60.000 tonnes de fuel par mois ", a-t-il souligné. M. Abbas a par la suite précisé que les deux centrales pourraient être à nouveau fonctionnelles " entre mardi et mercredi prochains " (puisque le fuel irakien devra être testé et vérifié avant d’être déchargé). Il a indiqué dans ce cadre que " la crise d’électricité se poursuivra tant qu’elle sera intrinsèquement liée aux problèmes que posent le dollar frais et la production énergétique d’Électricité du Liban (EDL), qui est actuellement estimée à 0 heure ".

Ces propos laissent entendre que le Liban risque d’être plongé dans le noir le plus total dans les prochains jours, alors que cela fait plusieurs mois que le gouvernement libanais étudie les projets d’importation du gaz d’Égypte et d’importation de l’électricité de Jordanie, comme solution à l’éternelle crise de fuel ; les démarches sur ce plan sont entreprises sans pour autant aboutir à un résultat tangible.

La faute serait attribuée au ministre de l’Energie Walid Fayad qui, d’après plusieurs sources informées, " ne cesse de modifier les termes et les conditions du deal proposé par le Caire, empêchant ainsi la conclusion du marché entre les deux pays, espérant soutirer plus d’avantages de l’État égyptien ". De ce fait, M. Fayad retarde le déblocage des fonds de la Banque mondiale.

Une source diplomatique digne de foi relève dans ce cadre que " la Banque mondiale n’a pas refusé le financement de l’acheminement du gaz d’Égypte ". " Elle a plutôt reporté son aval, car les conditions requises les plus basiques n’ont pas été remplies ", indique la source précitée, rejetant ainsi la thèse relayée par certains médias qui affirment que la BM a refusé de financer l’importation de gaz. Et d’ajouter : " La balle est dans le camp du ministre Fayad, et non pas dans celui de l’administration américaine et de la Banque mondiale, comme il (M. Fayad) l’a déclaré il y a quelques jours ".

Ces propos sont contestés par le ministre de l’Énergie qui a assuré à Ici Beyrouth que " le contrat avec l’Égypte a été finalisé " et que " celui du transport (de l’électricité depuis la Jordanie) le sera aussi dans les jours qui viennent ". Quoique pour l’heure, aucun élément de preuve officiel n’a été avancé pour confirmer la version du ministre de l’Énergie.

Par ailleurs, pour que le gaz puisse être acheminé de l’Égypte au Liban, il faudra qu’il passe par la Syrie, laquelle fait l’objet de sanctions américaines en vertu du " Caesar Act ". Face à cet obstacle, la source diplomatique précitée a indiqué que " le Trésor américain pourra évaluer cette situation une fois que le contrat avec l’Égypte sera structuré et finalisé ", dans le but de trouver un moyen pour contourner les sanctions.

Pour ce qui a trait à l’importation du courant électrique de Jordanie, le Liban attend toujours le financement de la Banque mondiale. En effet, " le deal entre le Liban et la Jordanie pour l’importation de l’électricité sera mis en veilleuse, le temps que le contrat égyptien pour l’importation du gaz soit étudié par la Banque mondiale ", a confié une source diplomatique occidentale à Ici Beyrouth.

Il ne reste plus qu’à déterminer le but de tous ces atermoiements concernant l’importation du gaz égyptien, sachant que le Courant patriotique libre (CPL) bloque le dénouement de la crise d’électricité depuis plus de dix ans, par le biais des ministres partisans ou proches du parti aouniste qui ont successivement pris en charge ce portefeuille. La solution semblait pourtant être simple lorsque le chef du parti orange Gebran Bassil était ministre de l’Énergie et clamait haut et fort que le Liban sera fourni en électricité 24 heures sur 24 heures en … 2015. Il avait sans doute omis alors de préciser que ce seraient les générateurs de quartier qui fourniraient le courant 24 heures sur 24 !