Une déplorable équivoque marque généralement les élections législatives au Liban. Nombre d’électeurs ont, en effet, une fausse conception du scrutin destiné à élire des députés, qu’ils confondent avec des municipales. Des élections législatives ne sont pas des élections municipales et de ce fait, il est erroné de faire son choix pour le départage des candidats à la députation sur base de critères qui dictent généralement le choix des membres d’un conseil municipal, qui sont généralement choisis en fonction de considérations d’ordre purement personnel.

Des élections législatives revêtent par essence un caractère fondamentalement politique. Or pour le scrutin de cette année, les enjeux sur ce plan paraissent clairs et sont non seulement politiques mais surtout existentiels. Indépendamment des sympathies personnelles à l’égard des candidats en lice, à titre individuel, ou de l’opinion que l’on peut avoir de tel ou tel parti, l’électeur se doit dans les jours qui viennent de faire un choix entre deux projets politiques, deux projets de société, voire deux visions du Liban et de sa vocation dans cette partie du monde.

Les Libanais doivent choisir aujourd’hui entre deux conceptions du rôle et de la place du pays du Cèdre : (i) celle du Hezbollah qui veut édifier une société guerrière, sans horizon précis, à part celui d’être au service des ambitions hégémoniques des Gardiens de la Révolution islamique iranienne (avec tout ce que cela entraîne comme déviations idéologique, économique, sociale, et culturelle, aux antipodes de ce qu’est le Liban) ; (ii)  la seconde conception, diamétralement opposée à la première, est défendue par un très vaste courant national, souverainiste, qui place en tête de ses priorités le rétablissement de la souveraineté de l’État central, arguant du fait qu’aucune réforme, aucune lutte contre la corruption, aucune opération sérieuse de redressement ne sont possibles tant que le Hezbollah continue de prendre le pays en otage et s’obstine à hypothéquer toute décision libre de l’État libanais, pour servir la Raison d’État de la République islamique iranienne.

C’est l’un ou l’autre de ces deux projets que le Libanais doit choisir aujourd’hui. Toute autre option qui serait mi-figue, mi-raisin, ne serait que faiblesse. Et, de surcroît, inutile … Et dans le contexte local et régional actuel, un vote blanc ou une abstention ne ferait que favoriser la vision du Hezbollah. Or celle-ci, force est de l’admettre, est contraire à tout ce qui a fait la spécificité du Liban tout au long des décennies, voire des siècles passés.

Cela implique qu’il est plus que jamais nécessaire d’opter pour un vote utile, visant, plus précisément, à favoriser l’émergence d’un bloc politique, d’une large alliance, qui soit capable de faire barrage au projet du Hezbollah. Des électrons libres, plus communément appelés " indépendants " par abus de langage, ne peuvent mener, de façon isolée, une telle action de manière efficace et durable. Seuls de grands partis, avec leurs alliés non partisans, sont en mesure, en raison de leur solide implantation populaire, de contrebalancer le poids du parti pro-iranien, de le juguler, afin de réduire et stopper sa capacité de nuisance pour pouvoir par la suite s’attaquer aux divers dossiers d’ordre politique, financier, structurel et socio-économique auxquels est confronté le Liban.

De tels dossiers se poseront avec acuité au cours de la prochaine étape, tels que la formation d’un nouveau gouvernement, l’élection d’un nouveau président de la République, la mise en application d’un plan de redressement économique, le règlement de la crise du secteur bancaire, le rétablissement des relations du Liban avec le monde extérieur, la solution des problèmes qui ébranlent les secteurs éducatif, universitaire, hospitalier etc.

Le traitement de l’ensemble de ces dossiers ne peut se faire avec un parti omnipotent qui paralyse l’État et qui ne perçoit la situation au Liban que sous l’angle de la consolidation des intérêts stratégiques du nouvel empire perse.

C’est en étant conscient de cet enjeu existentiel que le Libanais doit aujourd’hui orienter son vote, du Nord au Sud. Un vote utile … Pour favoriser l’émergence d’une vaste alliance articulée autour des grands partis souverainistes entourés d’élus indépendants et non partisans mais qui devraient faire bloc avec les grandes formations dites " traditionnelles ". Aux électeurs donc de savoir orienter leur vote pour choisir et booster les véritables défenseurs de l’option souverainiste.

Beyrouth I

Le nombre d’électeurs dans la circonscription de Beyrouth I s’élève à 134.825, dont 125.175 inscrits au Liban et 9.650 à l’étranger.

Avec 38 candidats en lice et 8 sièges à pourvoir (1 pour les maronites, 1 pour les grecs-orthodoxes, 1 pour les grecs-catholiques, 3 pour les arméniens-orthodoxes, 1 pour les arméniens-catholiques, et 1 pour les minorités chrétiennes), la course électorale sera certainement mouvementée, puisque six listes ont été enregistrées, une de plus qu’en 2018.

Les 6 listes en lice sont réparties comme suit : " Liban-Souveraineté " (formée par le parti Kataëb et des indépendants) ; " Nous sommes pour Beyrouth " (formée par les Forces libanaises) ; " Beyrouth, ma ville " (formée par le regroupement Madinati) ; " Pour mon pays " (formée par le regroupement Watani et des indépendants) ; " Capables " (formée par le mouvement " Citoyens et citoyennes dans un État " de Charbel Nahas) ; et " Nous étions et nous resterons pour Beyrouth " (formée par le Courant patriotique libre, le Tachnag et des indépendants).

En 2018, l’opposition aux partis traditionnels s’était unifiée sur une seule liste et a pu obtenir assez de voix pour porter Paulette Yaacoubian au Parlement. Cette année, trois listes se revendiquant une légitimité issue des mouvements de contestation du 17 octobre 2019 s’affrontent et risquent de diviser les électeurs. Si un vote utile ne s’organise pas, des milliers de voix risquent d’être éliminées de l’équation, ce qui profiterait aux listes des partis traditionnels.

Du côté des souverainistes qui se présentent sur deux listes distinctes, contrairement à 2018, les risques de défaite sont moindres car chaque liste est assurée d’atteindre le coefficient électoral de 12,5%. Le pire scénario pour elles serait d’obtenir les mêmes trois sièges que lors du dernier scrutin.

Enfin, c’est le CPL et le Tachnag qui sont surtout en difficulté : en 2018, ils avaient obtenu quatre sièges, un score très difficile à atteindre cette fois-ci. Ces deux partis politiques ont été conspués depuis le 17 octobre 2019 et l’explosion du 4 août 2020 a fortement touché les quartiers de la circonscription.  L’alliance entre les deux formations politiques n’était pas certaine et ne s’est faite que dans les derniers jours avant la clôture du dépôt des candidatures.

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Beyrouth I

Beyrouth II

Le nombre d’électeurs dans la circonscription de Beyrouth II s’élève à 370.862, dont 344.437 inscrits au Liban et 26.425 à l’étranger.

Avec 88 candidats en lice et 11 sièges à pourvoir (6 pour les sunnites, 2 pour les chiites, 1 pour les grecs-orthodoxes, 1 pour les évangélistes et 1 pour les druzes), ce scrutin sera aussi incertain que celui de 2018. Le retrait de Saad Hariri et du courant du Futur a provoqué un séisme politique dans cette circonscription où 232.929 sunnites sont appelés à voter et à choisir entre 10 listes, une de plus qu’en 2018.

Les 10 listes en lice sont réparties comme suit : " Beyrouth fait face " (formée par Fouad Siniora, le PSP et des indépendants) ; " Beyrouth a besoin d’un cœur " (formée par Fouad Makhzoumi) ; " Beyrouth – ma ville " (formée par le regroupement Madinati, qui s’est retirée de la course mercredi 4 mai) ; " Beyrouth – le changement " (formée par le regroupement Watani, Melhem Khalaf et des indépendants) ; " Capables " (formée par le mouvement " Citoyens et citoyennes dans un État " de Charbel Nahas) ; " C’est Beyrouth " (formée par des personnalités indépendantes) ; " Oui à Beyrouth " (formée par des personnalités indépendantes) ; " Pour que Beyrouth reste " (formée par des personnalités indépendantes) ; " Pour Beyrouth " (formée par les Ahbaches et des indépendants) et " L’Unité de Beyrouth " (formée par le Hezbollah, Amal, le PSNS, le Courant patriotique libre et des indépendants).

L’enjeu est crucial dans cette circonscription qui se retrouve sans leader sunnite (ni Hariri ni Tamam Salam). Et comme la nature a horreur du vide, le Hezbollah et ses alliés mettent tout leur poids dans cette circonscription pour tenter de remporter des sièges- ils avaient obtenu 4 sièges en 2018 – et compenser les probables pertes dans d’autres circonscriptions. La liste soutenue par les Ahbaches pourrait également profiter de l’absence du Futur et d’un report de voix tactique du Hezbollah.

D’autre part, l’homme d’affaire Fouad Makhzoumi tente de profiter de l’absence de leadership sunnite pour remporter plus de sièges : en 2018, malgré les 15.000 voix obtenues, il avait été le seul candidat de sa liste à accéder à la Chambre. S’il fait un meilleur score, ou si l’abstention lui permet de remporter plus de sièges, il essayera de s’imposer comme un leader sunnite national et briguera la présidence du Conseil des ministres.

De l’autre côté de l’échiquier, la liste souverainiste soutenue par l’ancien Premier ministre Fouad Siniora se retrouve en difficulté depuis que Saad Hariri a "suspendu" ses activités politiques. Il y a peu de chance pour que ces candidats, qui représentent l’ancien 14 Mars, puissent reconquérir les 6 sièges de 2018. Un taux élevé d’abstention profiterait vraisemblablement au camp du 8 Mars.

Comme à Beyrouth I, l’opposition aux partis traditionnels ne s’est pas unifiée et au moins trois listes se revendiquant une légitimité issue des mouvements de contestation du 17 octobre 2019 s’affrontent et risquent de diviser les électeurs. Si un vote utile ne s’organise pas, des milliers de voix risquent d’être éliminées de l’équation, ce qui profiterait aux listes des partis traditionnels.

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Beyrouth II

Békaa I

Le nombre d’électeurs dans la circonscription de Békaa I s’élève à 183.425, dont 9.636 à l’étranger pour 7 sièges à pourvoir (2 pour les grecs-catholiques, 1 pour les grecs-orthodoxes, 1 pour les maronites, 1 pour les sunnites et 1 pour les chiites).

Les 8 listes en lice, trois de plus qu’en 2018, sont réparties comme suit : " Zahlé – Souveraineté " (formée par les Forces libanaises et des indépendants) ; " Souverainistes indépendants " (formée par Michel Daher et des indépendants) ; " Zahlé se révolte " (formée par des personnalités indépendantes) ; " Capables d’affronter " (formée par le mouvement " Citoyens et citoyennes dans un État " de Charbel Nahas) ; " Le changement " (formée par des personnalités indépendantes) ; " Des paroles et des actes " (personnalités indépendantes) ; " Le bloc populaire " (Myriam Skaff et des indépendants) ; et " Zahlé – Message " (formée par le Hezbollah, le Courant patriotique libre, le Tachnag et des indépendants).

La multiplicité des listes d’indépendants risquera d’affaiblir l’opposition et de restreindre la bataille entre les partis traditionnels : d’une part, les Forces libanaises, bénéficiant de l’appui de l’ancien Premier ministre Fouad Siniora ; de l’autre le Hezbollah et le Courant patriotique libre, dont l’alliance stratégique politique ne s’était pas traduite par une alliance électorale en 2018, mais s’est imposée cette année pour renflouer le CPL.

Comme dans les autres circonscriptions où la communauté sunnite a une forte présence (54.737 inscrits soit près de 30%), son taux de participation au scrutin sera décisif. Malgré le soutien de Fouad Siniora à la liste FL, si les proches de l’ancien Premier ministre Saad Hariri décident de s’abstenir, ou de répartir leurs voix sur différentes listes, les souverainistes qui se battent contre la formation pro-iranienne et ses alliés en pâtiront.  En plus des FL, le député sortant Michel Daher, démissionnaire du groupe parlementaire du CPL, est candidat sur la liste soutenue par les Kataëb et défend un discours contre les armes du Hezbollah, tandis que Myriam Skaff se concentre sur des alliances locales, et a failli s’allier avec le Hezbollah, n’était un antagonisme avec le CPL depuis le retrait des troupes syriennes en 2005.

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Békaa I

Békaa II

La circonscription de la Békaa Ouest-Rachaya (Békaa II) limitrophe du Liban-Sud et frontalière de la Syrie, mais avec une ouverture sur la Montagne, est un terrain où le régime syrien, relayé par ses alliés au Liban, tente continuellement d’exercer son influence face à une population à large majorité sunnite, traditionnellement pro-haririenne, et druze, fidèle aux positions souverainistes. Le nombre d’électeurs dans cette circonscription s’élève à 153.975, dont 7.158 à l’étranger qui éliront 6 députés : 2 sunnites, 1 druze, 1 grec-orthodoxe, 1 chiite et 1 maronite.

Six listes se livrent bataille cette année – trois de plus qu’en 2018 – dont quatre relevant des partis traditionnels :  une liste pro-8 Mars ; une liste alliant PSP, Jamaa islamiya et indépendants ; une liste FL avec des indépendants ; et une autre Kataëb-indépendants. Une cinquième liste est issue exclusivement de la société civile, à laquelle s’est ajoutée une sixième, incomplète, relevant du mouvement " Citoyens et citoyennes dans un Etat ".

La liste pro-8 Mars (Hezbollah-Amal-Courant patriotique libre) a pris forme autour de Hassan Mrad, fils du député sortant Abdel Rahim Mrad, qui avait chapeauté la liste du tandem Amal-Hezbollah en 2018. Il n’a pas de colistier sunnite, afin d’accroître le nombre de votes en sa faveur.  La réconciliation CPL-Berry, souhaitée par le Hezbollah, a permis d’inclure sur la liste un candidat partisan (et non pas simple sympathisant) du CPL, Charbel Maroun, et de retenir la candidature de Elie Ferzli, endossée cette année par Nabih Berry. Il reste à savoir qui de ces deux colistiers sera favorisé en termes de votes préférentiels, sachant qu’une telle répartition dépend principalement de la volonté du Hezbollah.

Autre fait marquant : l’échec des FL et du PSP à former une liste commune, malgré une alliance électorale nationale stratégique commune centrée sur la souveraineté face aux armes illégales.

Le Parti socialiste progressiste, représenté par le député sortant Waël Bou Faour, a fini par s’allier au député sortant Mohammad Karaaoui, soutenu implicitement par l’ancien député Jamal Jarrah (proche de Fouad Siniora) mais très réfractaire à un partenariat avec les FL.

Notable local, propriétaire de l’hôpital de la Békaa, M. Karaaoui est aussi initialement proche du régime syrien. Certains soupçonnent le fait que sa candidature a été imposée par les forces de facto sur la liste du PSP en vue de mettre en échec une liste unifiée. Au final, la solution de listes séparées FL et PSP " ne nuira ni à l’un ni à l’autre d’un point de vue arithmétique ", assurait une source FL à Ici Beyrouth avant l’annonce de la liste FL, laquelle a fini par ne pas inclure de candidat pour le siège druze.

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Békaa II

Békaa III

A Baalbeck-Hermel (Békaa III), bastion du Hezbollah et l’un des réservoirs de votes chiites les plus importants du pays (251.417 inscrits sur les 341.263), les listes rivalisant avec celle du Hezbollah sont nombreuses, mais l’opposition paraît peu efficace dans une atmosphère qualifiée de " louche " par un acteur politique de la région. En 2018, une liste formée par des chiites indépendants, présidée par Yehya Chamas, et alliant Courant du Futur et Forces libanaises, avait réalisé deux percées au niveau des sièges sunnite et chrétien. Cette année, en plus de la liste du Hezbollah et de ses alliés, cinq listes se livrent bataille.

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Békaa III

Ces listes incluent trois listes d’opposants indépendants et deux soutenues respectivement par les Forces libanaises et par le mouvement de Charbel Nahas, Citoyens et Citoyennes dans un Etat.

L’opposition la plus audible au Hezbollah émane du candidat des FL, le député sortant Antoine Habchi, dont des colistiers chiites ont subi des intimidations, et d’autres se sont retirés.

Mais l’alliance des FL avec le cheikh Abbas Jawhari, principal candidat chiite sur la liste, point de liaison avec les autres colistiers, est critiquée. L’opposition déclarée au Hezbollah par le cheikh Jawhari est jugée peu convaincante, en tout cas pas à même de mobiliser l’opposition chiite profonde, aussi bien par des observateurs connus pour tenir tête au parti chiite que par de nombreux opposants chiites traditionnels dans la région.

En contrepartie, le Hezbollah a des enjeux stratégiques clairs. L’un d’eux est de faire en sorte que son allié chrétien, le Courant patriotique libre, très affaibli dans les sondages, conserve sa majorité parlementaire. Le parti pro-iranien se concentre à faire élire par les voix chiites au moins un candidat du CPL, représenté d’une manière inédite cette année sur sa liste.

Mont-Liban I

Le nombre d’électeurs dans la circonscription du Mont-Liban I (Kesrouan-Jbeil) s’élève à 182.103, dont 12.932 inscrits à l’étranger.

47 candidats sont en lice pour les 8 sièges à pourvoir : 5 pour les maronites du Kesrouan, 2 pour les maronites de Jbeil, et 1 pour les chiites de Jbeil. La bataille électorale s’annonce cruciale tant sur la scène chrétienne que chiite.

Sept listes ont été enregistrées, deux de plus qu’en 2018 : " Avec vous, nous pouvons jusqu’au bout " (formée par les FL, le PNL et des indépendants) ; " La liberté est un choix " (formée par Farès Souhaid, Mansour el-Bone et des indépendants) ; " Le cri d’une Nation " (formée par Naamat Frem, les Kataëb, le Bloc national et des indépendants) ; " Le cœur du Liban indépendant " (formée par Farid Haykal el-Khazen, Chamel Roukoz et des indépendants) ; " Capables " (formée par le mouvement " Citoyens et citoyennes dans un État ") ; " Nous sommes le changement " (candidats indépendants) et " Nous étions et nous resterons " (CPL, Hezbollah et Amal).

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Mont-Liban I

Le Kesrouan est le seul caza purement maronite du Liban, avec 5 sièges à pourvoir et plus de 91% d’électeurs inscrits maronites. Le scrutin de 2022 semble très difficile pour le CPL qui n’a d’autres alliés que le Hezbollah, qui lui-même a besoin de se concentrer sur le siège chiite de Jbeil, un des rares au Liban qui pourrait échapper à la formation pro-iranienne. La liste du CPL risque donc de n’avoir qu’un seul siège maronite dans toute la circonscription, soit Nada Boustany au Kesrouan, soit Simon Abiramia ou Walid Khoury à Jbeil. Si ce scénario se concrétise le 16 mai prochain, Gebran Bassil ne pourra plus, tout comme son beau-père, dire qu’il est à la tête de la communauté maronite libanaise.

Le scrutin semble également difficile pour cheikh el-Khazen. Il n’avait personnellement obtenu que 9.081 voix en 2018 alors que le quotient électoral était de 14.452, et seule son alliance tactique avec Farès Souhaid et ses 5.617 voix lui avait permis d’être qualifié.

L’attribution du siège chiite dépendra de deux batailles le 15 mai: d’une part, la lutte au sein du CPL entre Simon Abiramia et Walid Khoury au niveau des voix préférentielles, qui permettrait au candidat du Hezbollah Raëd Berro d’obtenir le plus grand nombre de voix préférentielles sur cette liste et donc d’être qualifié avant ses colistiers maronites. Et d’autre part, le risque d’avoir des voix souverainistes dispersées entre la liste des FL et celle de Farès Souhaid, une répartition qui risque de les affaiblir toutes les deux. Il faudra également scruter les décimales de chaque liste pour savoir quelle liste obtiendra le dernier siège à pourvoir.

Quant à l’opposition se revendiquant du soulèvement du 17 octobre, il semble que la liste de Naamat Frem obtiendrait deux ou trois sièges, ce qui pourrait permettre l’entrée du Bloc national au Parlement, cinquante ans après Raymond Eddé.

Mont-Liban II

Le nombre d’électeurs dans la circonscription du Mont-Liban II (Metn) s’élève à 183.441, dont 13.594 inscrits à l’étranger.

39 candidats sont en lice pour les 8 sièges à pourvoir : 4 pour les maronites, 2 pour les grecs-orthodoxes, 1 pour les grecs-catholiques et 1 pour les arméniens-orthodoxes. La bataille sera cruciale sur la scène chrétienne puisque 6 listes se font face, une de plus qu’en 2018.

Les 6 listes en lice sont réparties comme suit : " Metn-Liberté " (formée par les FL, le PNL et des indépendants) ;  " À bord du changement " (formée par les Kataëb, et des indépendants) ; Metniotes souverainistes (formée par le fédéraliste Alfred Riachi et des indépendants) ; " Vers l’État " (mouvement " Citoyens et citoyennes dans un État ") ; " Ensemble plus fort " (formée par Michel Elias el-Murr et le Tachnag) et " Nous étions et nous resterons pour le Metn " (formée par le CPL).

Le premier enjeu dans cette circonscription concernera l’alliance entre le petit-fils Murr et le Tachnag qui doit tenter de remporter au moins deux sièges pour conserver une présence. Il faut d’une part que Michel el-Murr arrive à récupérer les voix de son grand-père, tandis que Hagop Pakradounian doit être capable de rassembler assez de voix arméniennes : une tâche plus difficile puisque la contestation populaire d’octobre 2019 est passé par Bourj Hammoud et que les soutiens du parti qui ont émigré ne se sont pas inscrits en masse pour voter à l’étranger.

Les candidatures du CPL sont également sous pression: le député grec-catholique sortant Edgard Maalouf risque de perdre son siège face au candidat FL Melhem Riachi. Cela explique pourquoi le parti présidentiel veut orienter ses partisans vers un vote préférentiel en faveur du candidat grec-catholique qui soutient encore Gebran Bassil, contrairement à Ibrahim Kanaan ou Elias Bou Saab qui sont en froid avec le gendre présidentiel.

Les Forces libanaises tentent, contrairement à 2018, d’obtenir un second siège dans cette circonscription et ont fait le choix de nommer Melhem Riachi et Razi el-Hage pour représenter le parti. Mais malgré leur dynamisme et leur popularité plus fortes que celle d’Eddy Abillama, le pari n’est pas gagné d’avance et ils auront des difficultés dans cette région du Metn qui penche plus pour les Kataeb. Ces derniers tenteront cette fois de remporter un troisième siège en profitant des pertes du CPL et en comptant sur des voix issues du soulèvement d’octobre 2019.

Les deux autres listes restantes, celle du fédéraliste Alfred Riachi d’une part et du mouvement CCDE qui comptent des figures connues comme Jad Ghosn et Lucien Bourjeily, d’autre part, pourraient être les faiseurs de roi en fonction du nombre de voix qu’elles obtiendront au dépend des partis traditionnels.

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Mont-Liban II

Mont-Liban III

Le nombre d’électeurs dans la circonscription du Mont-Liban III (Baabda) s’élève à 171.746, dont 13.271 inscrits à l’étranger.

33 candidats sont en lice pour les 6 sièges à pourvoir : 3 pour les maronites, 2 pour les chiites et 1 pour les druzes. La bataille électorale s’annonce mouvementée tant sur la scène chrétienne que chiite.

Sept listes ont été enregistrées, trois de plus qu’en 2018 : " Souveraineté et décision " (formée par les FL, le PNL, le PSP et des indépendants) ; " Baabda se révolte " (formée par Khalil Hélou et des anciens cadres aounistes) ; " Capables " (formée par le mouvement " Citoyens et citoyennes dans un État ") ; " Baabda pour le changement " (formée par le Bloc national, Wassef Haraké et des indépendants) ; " Nous sommes le changement " (formée par des indépendants) ; " Ensemble nous pouvons " (formée par l’ancien député du 8 Mars Fadi el-Awar et des indépendants) et " Entente nationale " (formée par le Hezbollah, Amal, le Parti démocratique de Talal Arslane et le CPL).

Cette circonscription acquise de facto au tandem chiite et ses alliés en 2009 a connu une percée significative en 2018 grâce au système proportionnel : Pierre Bou Assi, le candidat FL, a obtenu le plus grand nombre de voix préférentielles, plus qu’Ali Amar le candidat du Hezbollah qui pouvait piocher dans les 41.000 électeurs chiites inscrits.

Le scrutin de 2022 ressemblera vraisemblablement à celui de 2018 : les voix chiites iront principalement aux candidats d’Amal et du Hezbollah, les voix druzes au candidat du PSP Hadi Abou el-Hosn, les voix FL à leur candidat Bou Assi, et les voix du CPL à leur candidat Alain Aoun. Mais contrairement aux dernières élections, le CPL, conspué depuis octobre 2019, doit faire face à une crise interne avec la démission de Hikmat Dib qui s’est vu refusé une place sur la liste du parti. Le gendre présidentiel n’a présenté qu’un seul candidat dans cette circonscription, signe de faiblesse populaire malgré le probable soutien de ses alliés pro-iraniens.

Le tandem Hezbollah-Amal doit aussi faire face à la contestation interne au sein de la communauté : Octobre 2019 est également passé par la banlieue-sud et l’activiste chiite Wassef Haraké pourrait engranger des voix qui mettrait à mal l’hégémonie voulue par la formation pro-iranienne. Le tandem va donc vraisemblablement se concentrer sur ses propres candidats en attirant un maximum des 44.524 électeurs chiites et laissé ses alliés s’illustrer pour tenter de remporter un siège supplémentaire.

Au niveau de la contestation populaire, tout comme dans la plupart des circonscriptions, la multiplicité des listes risque de diviser les électeurs. Si un vote utile ne s’organise pas d’ici le 15 mai, des milliers de voix risquent d’être éliminées de l’équation, ce qui profiterait aux listes des partis traditionnels.

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Mont-Liban III

 

Mont-Liban IV

Le nombre d’électeurs dans la circonscription du Mont-Liban IV (Chouf-Aley) s’élève à 346.451, dont 25.556 inscrits à l’étranger.

68 candidats sont en lice pour les 13 sièges à pourvoir : Au Chouf, 3 pour les maronites, 2 pour les druzes, 2 pour les sunnites et 1 pour les grecs-catholiques. A Aley, 2 pour les maronites, 2 pour les druzes et 1 pour les grecs-orthodoxes. La bataille électorale s’annonce cruciale sur la scène druze ainsi que pour la lutte du camp souverainiste.

7 listes s’affrontent, une de plus qu’en 2018 : " Partenariat et volonté " (formée par les FL, le PSP, le PNL et des indépendants) ; " Nous nous sommes unis pour le changement " (formée par les Kataëb, Taqaddom, Sabaa et des indépendants) ; " La souveraineté d’une Nation " (formée par des indépendants) ; " Capables " (mouvement " Citoyens et citoyennes dans un État ") ; " La montagne se révolte " (indépendants) ; " Ta voix est révolutionnaire " (indépendants) et " La montagne " (le Hezbollah, Amal, le Parti démocratique de Talal Arslane, le CPL et des indépendants)

Au niveau de la représentation druze, deux sièges sont en jeu : tout d’abord au Chouf, le Hezbollah veut faire élire Wiam Wahab à la place de Marwan Hamadé, qui est l’un des plus farouches adversaires du parti pro-iranien, tandis qu’à Aley, la liste d’opposition dont fait partie Mark Daou vise le siège de Talal Arslane, laissé traditionnellement vacant par Walid Joumblatt.

Les cartes chrétiennes sont également rebattues avec l’affaiblissement du CPL. Le troisième siège maronite du Chouf, le deuxième siège maronite d’Aley, ainsi que les sièges grec-orthodoxe et grec-catholique sont brigués par toutes les listes et feront l’objet des batailles de voix préférentielles et de décimaux des quotients électoraux

Le siège sunnite, que Mohammad el-Hajjar du courant du Futur ne tente pas de retrouver, est aussi convoité par les différents camps. L’opposition issue d’Octobre 2019 tente de faire élire l’activiste féministe Halimé Kaakour, le Hezbollah et ses alliés veulent engranger des sièges sunnites pour compenser les pertes du CPL tandis que le camp du 14 Mars veut conserver ses sièges dans la Montagne pour éviter une percée du camp pro-iranien qui isolerait encore plus les Joumblatt.

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Mont-Liban IV

 

Nord I

Le nombre d’électeurs dans la circonscription du Nord I (Akkar) s’élève à 309.517, dont 8.478 inscrits à l’étranger.

53 candidats sont en lice pour les 7 sièges à pourvoir : 3 sunnites, 2 grecs-orthodoxes, 1 maronite et 1 alaouite. La bataille électorale s’annonce mouvementée sur la scène sunnite, puisque 8 listes s’affrontent, 2 de plus qu’en 2018.

Les listes en lice sont : " Akkar " (formée par les FL, des anciens du Futur et des indépendants) ; " La modération nationale " (formée par des anciens du Futur) ; " Vers la citoyenneté " (" Citoyens et citoyennes dans un État ", le PC et des indépendants) ; " Le redressement pour Akkar " (indépendants) ; " Akkar se révolte " (indépendants) ; " Akkar pour le changement " (formée par des indépendants) ; " La loyauté envers Akkar " (indépendants) et " Akkar d’abord " (CPL et des indépendants).

Le retrait politique de Saad Hariri semble avoir moins impacté cette circonscription par rapport au reste du pays. Néanmoins, l’absence de leadership central a provoqué une scission déjà existante entre les sunnites souverainistes : les anciens du Courant du Futur qui ont décidé de poursuivre leur action politique se présentent sur deux listes distinctes, l’une en alliance avec les FL et l’autre en alliance uniquement avec des personnalités de la région. Tout comme dans le reste du pays, cette adversité entre deux listes souverainistes risque de profiter au camp du 8 Mars.

Malgré l’absence de chiites de cette circonscription (1% des électeurs inscrits), le Hezbollah y est présent et va essayer de capitaliser sur les divisions sunnites pour remporter certains sièges. La formation pro-iranienne s’est faite remarquer l’été dernier après l’explosion de Tleil en distribuant des aides aux familles des victimes.

En 2018, les FL avaient réussi à porter Wehbé Katicha au Parlement grâce à leur alliance, déjà fragile à l’époque, avec le Futur. Cette année, leurs chances sont amoindries et ce siège grec-orthodoxe risque de basculer dans le camp du 8 Mars.

Au niveau de la contestation populaire d’octobre 2019, le mouvement de Charbel Nahas a pu s’allier avec le PC et les " Révolutionnaires de Halba ". Le grand nombre de listes et l’appel officiel du Futur pourrait permettre à cette liste d’opposition ou aux autres listes d’indépendants de percer.

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Nord I

Nord II

Le nombre d’électeurs dans la circonscription du Nord II (Tripoli – Denniyé – Minié) s’élève à 377.111, dont 15.276 inscrits à l’étranger.

100 candidats sont en lice pour les 11 sièges à pourvoir : 8 sunnites (5 à Tripoli, 2 à Denniyé et 1 à Minié), et à Tripoli 1 grec-orthodoxe, 1 maronite et 1 alaouite. La bataille électorale s’annonce imprévisible sur la scène sunnite, puisque 11 listes s’affrontent, 3 de plus qu’en 2018.

Les listes en lice sont : " Sauvetage d’une nation " (formée par les FL, Achraf Rifi et des indépendants souverainistes) ; " Le Liban est à nous " (formée par des anciens du Futur dont Moustapha Allouche et Sami Fatfat, et des indépendants) ; " Soulève-toi pour la souveraineté et la justice " (formée par le Bloc national, Sabaa, et des indépendants) ; " Pour le peuple " (formée par Najib Mikati et des anciens du Futur) ; " Capables " (mouvement " Citoyens et citoyennes dans l’État ") ; " L’ambition des jeunes " (indépendants) ; " L’aube du changement " (indépendants) ; " La stabilité et le développement " (indépendants) ; " Le vrai changement " (indépendants) ; " La troisième République "  (formée par l’homme d’affaires Omar Harfouche) et " La volonté populaire " (formée par Fayçal Karamé, Jihad el-Samad, les Maradas et d’autres personnalités du camp du 8 mars).

Le retrait de Saad Hariri et du Courant du Futur, ainsi que la non-candidature de Najib Mikati, ont rebattu les cartes dans la capitale sunnite du Nord. Ce haut-lieu de la contestation populaire d’octobre 2019, qu’on surnomme " la fiancée de la Révolution ", est également la région où la pauvreté cohabite avec les plus grandes fortunes du pays.

La liste souverainiste qui allie Achraf Rifi avec les FL va tenter de percer le paysage politique de la ville, contrairement à 2018 où les FL ne s’étaient pas présenté et l’ancien ministre de la Justice n’avait pas obtenu le seuil minimum de voix pour être qualifié. Mais la division de voix entre ces souverainistes et les anciens du Futur risquent de les pénaliser et de profiter aux alliés du Hezbollah et aux nouveaux partis.

Le grand nombre de listes " indépendantes " montrent tout de même que le soulèvement d’octobre 2019 n’a pas engendré de figures unificatrices permettant l’entrée de personnalités alternatives. Le camp du 8 Mars et l’homme d’affaires Omar Harfouche vont vraisemblablement tirer leur épingle du jeu des divisions.

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Nord II

AnchorNord III

Le nombre d’électeurs dans la circonscription de Nord III (Bécharré – Batroun – Zghorta – Koura) s’élève à 257.964, dont 26.714 inscrits à l’étranger.

55 candidats se disputent les 10 sièges à pourvoir : 7 sièges maronites (2 à Bécharré, 2 à Batroun et 3 à Zghorta) et 3 sièges grecs-orthodoxes au Koura. La bataille électorale sera fiévreuse dans cette circonscription des " présidentiables " où 7 listes s’affrontent, 4 de plus qu’en 2018.

Les listes en lice sont : " Le Nord de la confrontation " (formée par Michel Moawad, Majed Harb, les Kataëb et des indépendants) ; " Le pouls de la République forte " (formée par les FL et des indépendants) ; " Notre Nord " (Bloc national et des indépendants) ; " Capables de changer " (mouvement " Citoyens et citoyennes dans un État ") ; " Vote consciencieusement " (indépendants) ; " L’unité du Nord " (Maradas et le PSNS) et " Nous resterons là " (formée par le CPL).

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Nord III

La circonscription est celle où la bataille sera vraisemblablement la plus enflammée. L’un de ses enjeux est en effet l’avenir du CPL et surtout de Gebran Bassil, mais aussi la présidentielle à venir. Les chefs des trois principales formations de cette circonscription, presqu’exclusivement chrétienne, sont présidentiables et pourraient peut-être, dépendamment des circonstances, franchir le seuil de Baabda à l’issue du mandat Aoun, à la fin du mois d’octobre. Le vote des électeurs inscrits à l’étranger sera à scruter le 8 mai, notamment en Australie qui compte une importante diaspora libanaise du Nord.

Dans nombre de ses récentes interventions, le candidat à Batroun Majd Harb (fils de l’ancien député et ministre Boutros Harb) a insisté sur la possibilité de faire chuter Gebran Bassil dans son propre fief. Du côté des Forces libanaises, la détermination à battre Bassil est tout aussi caractérisée. La bataille s’annonce néanmoins rude, du fait que M. Bassil joue l’avenir de sa formation et la difficulté pour les autres prétendants vient surtout du fait que deux sièges maronites sont à pourvoir dans le caza de Batroun, ce qui exigerait donc que le chef du parti aouniste soit en 3e position ou moins en termes de nombres de voix.

Dans le caza de Bécharré acquis au FL depuis au moins 2005, l’enjeu est clair : les FL veulent reconduire les deux députés sortants et ne sous-estiment pas la candidature de Melhem Tawk qui aurait pu être élu en 2018 à cause d’une mauvaise organisation de la machine électorale du parti.

A Zghorta, c’est le troisième siège qui est vraisemblablement en jeu. Michel Moawad et Tony Frangié retrouveront leurs sièges, et le dernier siège dépendra des quotients électoraux.

Les prévisions à Koura sont moins claires. Le caza demeure imprégné d’une idéologie pro-syrienne qui se manifeste par les victoires continues de candidats du 8 Mars, surtout PSNS. Si la bataille semble, là aussi, jouée d’avance en faveur de Selim Saadé ou Fadi Ghosn, il ne faut pas sous-estimer l’ambition des FL d’y rafler un siège grâce à la candidature de l’ancien député du caza, Fadi Karam, qui a raté de peu l’accès au Parlement en 2018.

L’absence de sondages crédibles au Liban ne nous permet pas de prévoir si la liste formée par l’opposition issue du soulèvement d’octobre 2019 peut atteindre le seuil minimum de qualification. Mais le poids que les ténors maronites mettent dans la balance dans cette circonscription amenuisent leurs chances.

Sud I

Le nombre d’électeurs dans la circonscription du Sud I (Saïda – Jezzine) s’élève à 129.299, dont 8.355 inscrits à l’étranger.

28 candidats répartis sur 7 listes – soit trois listes de plus qu’en 2018 – se disputent les 5 sièges à pourvoir : 2 sièges sunnites à Saïda, 2 sièges maronites à Jezzine et 1 siège grec-catholique.

Les listes en lice sont :  " Notre unité à Saïda et Jezzine " (formée par les FL et des indépendants) ; " Nous votons le changement " (formée par Oussama Saad, Abdel Rahman  al-Bizri et des indépendants) ; " Nous sommes le changement " (formée par Madinati et des indépendants) ; " Capables " (" Citoyens et citoyennes dans un État " et des indépendants) ; " La voix du changement " (indépendants) ; " Ensemble pour Saïda et Jezzine " (CPL) et " La modération, notre force " (formée par Ibrahim Azar soutenue par Amal).

Cette circonscription est la plus petite des 15 selon la loi électorale en vigueur avec 5 sièges uniquement. Ce qui veut dire que le coefficient électoral est automatiquement le plus élevé, 20% du suffrage exprimé, ce qui rend la bataille difficile pour les forces politiques qui tentent de se frayer un chemin vers la place de l’Étoile. Mais elles pourraient profiter d’un retrait politique du Courant du futur et de Bahia Hariri pour obtenir relativement plus de voix.

La capitale sunnite du Sud se retrouve sans leadership national sunnite depuis la fin de la guerre civile. Le retrait de la famille Hariri laisse un vide que semble combler pour l’instant Oussama Saad. Le leader nassérien est bien vu des groupes issus de la contestation du 17 octobre 2019, et il a pris ses distances du Hezbollah et du camp du 8 Mars ces derniers mois. Son alliance avec Abdel Rahman al-Bizri, personnalité proche du Futur et qui s’est fait connaître du grand public par sa présidence du comité responsable de la vaccination anti-Covid 19, pourrait permettre à leur liste d’obtenir les deux sièges sunnites de la ville.

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Sud I

Selon des observateurs, cela n’est toujours pas acquis. Le bloc électoral du Courant du futur représente 40% des électeurs de la ville. Or à ce jour, la position de la députée sortante et sœur de l’ancien Premier ministre, Bahia Hariri, n’est pas encore très claire concernant le scrutin. Il semblerait qu’il faudrait attendre le jour J pour y voir plus clair, notamment pour savoir si Youssef el-Naqib de la liste soutenue par les Forces libanaises et l’ancien Premier ministre Fouad Siniora, bénéficierait d’un report de voix discret. Le cas échéant, la bataille pour le second siège sunnite se déroulerait entre Abdel Rahman al-Bizri et Youssef al-Naqib.

Du côté chrétien de la montagne, la bataille sera plus difficile, notamment pour le CPL. D’une part, Ibrahim Azar a de fortes chances d’être reconduit pour un nouveau mandat à l’un des deux sièges maronites, soutenu par les voix chiites du mouvement Amal (19.934 électeurs chiites inscrits). Selon des observateurs, la liste du CPL risque de ne pas être qualifiée du fait que le chef du Parlement, Nabih Berry, refuse que des voix chiites aillent au profit du CPL. Mais dans le cas où la liste obtiendrait le minimum requis, le second siège maronite peut lui être attribuée. Mais la lutte entre Amal Abou Zeid, conseiller du président de la République, et Ziad Assouad, ténor du parti de Gebran Bassil, a failli faire imploser la liste au début du mois d’avril juste avant la clôture des candidatures. Il avait fallu l’intervention directe du président de la République, Michel Aoun, et du chef du CPL pour que les choses rentrent dans l’ordre. Amal Abou Zeid était revenu sur sa décision de se retirer, mais le problème de fond n’était pas pour autant réglé. Amal Abou Zeid et Ziad Assouad ne se supportent pas. On risque dès lors d’assister le 15 mai 2022 au même scénario que lors du scrutin de 2018 lorsque les deux hommes ont chacun mené une bataille âpre contre l’autre pour obtenir le maximum de voix.

Sud II

La circonscription du Sud II (Tyr-Zahrani) est la chasse gardée du président de la Chambre Nabih Berry, ménagé d’ailleurs par la loi électorale qui a réuni les deux cazas de Tyr et Zahrani en une seule circonscription. Elle inclut sept sièges : quatre sièges chiites à Tyr, deux chiites et un grec-catholique à Zahrani, que doivent se répartir les 328.064 électeurs inscrits, dont 18.692 à l’étranger.

Alors qu’en 2018 une seule liste d’opposition était formée, cette année a vu l’émergence de trois listes opposées à la liste du pouvoir.

Cela ne veut pas dire pour autant que l’opposition s’est affaiblie par rapport à 2018. C’est au contraire l’émergence d’une opposition unifiée plus radicale à l’égard du Hezbollah qui explique la multiplicité des listes.

En 2018, la seule liste de l’opposition était constituée autour d’un discours anti-Berry mais pas anti-Hezbollah. Il s’agissait d’une liste incluant notamment l’homme d’affaires Riad el-Assaad. Ce dernier se porte une nouvelle fois candidat cette année sur une liste conjointe avec des figures connues pour leur allégeance ouverte au Hezbollah, comme Bouchra Khalil.

En revanche, la liste Ensemble pour le changement a réussi à fédérer les différentes gauches dans une dynamique contestant le pouvoir, en l’occurrence le Hezbollah et Amal dans la circonscription en question. Cette liste est la jumelle de la liste portant le même nom au Sud III.

Une autre liste incomplète alliant les Forces libanaises aux indépendants laisse perplexes des observateurs qui en questionnent les motifs au vu de la constitution d’une liste probante face au Hezbollah, sachant que les FL orientent leur campagne contre l’hégémonie de ce parti.

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Sud II

Sud III

La circonscription du Sud III, formée des trois cazas de Nabatiyé, Marjayoun-Hasbaya et Bint Jbeil, est le terrain qui compte le plus de votes chiites (401.160 chiites sur les 497.531 inscrits) au Liban, suivi par Tyr et Baalbeck, et donc le terrain où le Hezbollah et ses alliés assoient le plus confortablement leur hégémonie. Cela fait depuis 1992 que la liste n’a pas subi de percée. 21.911 électeurs sont également inscrits à l’étranger pour pourvoir les 11 sièges de cette circonscription : 8 chiites (3 à Nabatiyé, 3 à Bint Jbeil et 2 à Marjayoun-Hasbaya), 1 sunnite, 1 grec-orthodoxe et 1 druze.

Cette hégémonie risque cette année d’être défiée, en comparaison avec d’autres fiefs du parti pro-iranien, après que l’opposition a réussi à former une liste unifiée, en l’occurrence la liste Ensemble vers le changement. Une autre liste incomplète d’indépendants baptisée la voix du Sud a émergé seulement après la première pour l’affaiblir, selon certains observateurs. Le retrait de l’un de ses membres a réduit considérablement son incidence sur la bataille électorale. La liste Ensemble vers le changement a réussi le pari de regrouper différentes tendances de gauche, y compris ceux qui, comme le Parti communiste et le mouvement Citoyens et citoyennes dans l’Etat, font preuve de complaisance à l’égard du Hezbollah.

La liste du pouvoir, représentée dans cette circonscription par le Hezbollah et ses alliés, est appuyée par le Parti socialiste progressiste d’une part, et bénéficie d’autre part, du boycott des élections par les Forces libanaises. Il reste qu’il n’est pas exclu que l’on assiste à une percée des sièges non-chiites, notamment grec-orthodoxe, sunnite, et druze.

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Sud III