La mission d’observation de l’Union européenne pour les élections du 15 mai dernier a présenté lundi son rapport final qui fait état de nombre d’irrégularités et de failles d’ordre logistique et administratif, mais également de menaces et de pratiques d’intimidation auxquelles se sont livrés les délégués du Hezbollah et d’Amal lors du scrutin. Le rapport de l’UE dénonce notamment le "vote carrousel" observé à Baalbeck-Hermel. Cette pratique, signalée déjà en Russie et en Géorgie, consiste à faire voter des électeurs partisans plusieurs fois.

Le chef de la mission d’observation de l’Union européenne pour les élections du 15 mai dernier György Hölvényi a tenu lundi une conférence de presse au cours de laquelle il a présenté le rapport final de la mission. " La conclusion du rapport de la mission relève qu’en dépit des ressources humaines et financières limitées, les autorités ont pu organiser les élections législatives du 15 mai dans les délais prévus. "

M.Hölvényi a critiqué par ailleurs " des pratiques généralisées d’achat de voix et de clientélisme, qui ont faussé l’égalité des chances et sérieusement affecté le choix des électeurs ".

Ces entraves à la campagne ont été relevées directement par les observateurs ou proviennent de " rapports crédibles ", a confirmé le chef observateur adjoint Jarek Domanski à Ici Beyrouth : " Nous avons noté un peu plus de cas (…) surtout dans le sud, ainsi que dans la zone de Baalbeck, surtout pour ce qui a trait à l’intimidation. " " En ce qui concerne l’achat de voix, on en a observé sur l’ensemble du territoire du Liban ", a-t-il ajouté.

En conclusion de sa mission, la délégation a émis 23 recommandations finales, dont six ont été exposées lors de la conférence de presse par M. Hölvényi. Parmi ces propositions, plusieurs insistent à établir l’indépendance de la commission de supervision des élections. M. Hölvényi a souligné la disposition européenne à " soutenir le Liban dans la mise en place de ces recommandations afin d’améliorer les futurs processus électoraux".

Les principaux points du rapport

En ce qui concerne le rapport final de la mission d’observation de l’UE, le document aborde les diverses irrégularités relevées lors du scrutin.

" Le jour du scrutin, souligne le document de l’UE, une tension et des cas d’intimidation ont été rapportés, peut-on lire dans le rapport. (…) À Baalbeck-Hermel, les délégués du Hezbollah étaient beaucoup plus nombreux que les autres délégués. Ils contrôlaient l’accès des électeurs aux centres de vote et empêchaient les délégués de l’opposition de rentrer dans ces centres de vote. Ils donnaient en outre des instructions aux électeurs à l’intérieur des bureaux de vote. "

Et le rapport de l’UE d’ajouter : " Les Forces de sécurité et le personnel en charge du scrutin sont restés passifs face à ces menaces et pratiques d’intimidation. La mission d’observation européenne a reçu des rapports crédibles sur des bourrages d’urnes et des votes carrousel (qui consistent à faire voter des électeurs partisans plusieurs fois, NDLR) à Baalbeck-Hermel. "

Le document de l’UE indique, entre outre, que l’association LADE (pour la démocratie des élections) a rapporté que " près de 40 de ses observateurs ont été menacés ou harcelés par les délégués d’Amal et du Hezbollah, notamment dans les villages du caza de Saïda, et ont même été agressés physiquement, comme à Saïda et Baalbeck ".

Bien que la liberté de la presse ait été globalement respectée pendant la campagne, la mission souligne l’échec des médias à "assurer une visibilité égale" à toutes les parties, et à " couvrir de façon équilibrée " les élections. Le rapport dénonce en outre les tentatives de museler et d’intimider en ligne les voix discordantes, précisant que " plusieurs contestataires, notamment des candidats chiites indépendants, ont rapporté à la mission de l’UE de sérieuses menaces et pratiques d’intimidation en ligne, incluant des menaces de mort ". " Ces menaces et cette intimidation, poursuit le rapport de l’UE, sont le reflet de la violence et de l’intimidation exercées dans la réalité contre les candidats chiites qui n’étaient pas sur les listes du Hezbollah et d’Amal. "