Vingt-quatre heures plus tard, la présidence de la République a répondu au communiqué au vitriol publié mercredi par le bureau du Premier ministre désigné Nagib Mikati qui avait pratiquement accusé Baabda et le chef du Courant patriotique libre Gebran Bassil de bloquer "avec leurs conditions" le processus de formation du gouvernement.

C’est le bureau de presse de la présidence qui s’est chargé de la réponse, sans citer le texte du Sérail, lequel s’est d’ailleurs empressé de répondre. De cette valse des communiqués, il ressort une idée maîtresse : un déblocage n’est pas pour sitôt, même s’il semble qu’à son retour à Beyrouth lundi, le Premier ministre désigné se rendrait à Baabda pour poursuivre le débat avec le chef de l’État Michel Aoun au sujet de la composition du cabinet.

Le communiqué présidentiel développe en effet les mêmes idées mises en avant par l’équipe du président durant toute la période du bras-de-fer entre ce dernier et Saad Hariri, lorsque les efforts du leader sunnite pour mettre en place un gouvernement, entre novembre 2020 et juillet 2022, se heurtaient aux conditions du tandem Aoun-Bassil. Ces idées s’articulent autour du droit du chef de l’État à être un partenaire à part entière dans la formation de l’équipe ministérielle.

"La Constitution a clairement défini le mécanisme de formation du gouvernement, notamment dans son article 53 qui stipule que le chef de l’État " promulgue, en accord avec le président du Conseil des ministres, le décret de formation du gouvernement, et ceux portant acceptation de la démission des ministres ou leur révocation ". Aussi, n’est-il pas près de renoncer à ce partenariat (…) ce qui signifie qu’il ne suffit pas que le Premier ministre désigné lui soumette une mouture gouvernementale qui soit le fruit de convictions qu’il a développées, sur base de données disponibles et des positions des groupes parlementaires et des leaderships politiques", souligne le communiqué de la présidence qui reprend ainsi mot pour mot ce que le bureau de presse de Nagib Mikati avait avancé pour défendre la formule soumise par ce dernier à M. Aoun.

"Le chef de l’État a son point de vue et ses remarques puisqu’il est responsable devant le peuple, du fait de son serment, tout comme le Premier ministre est responsable devant le Parlement. Il n’est pas question pour lui d’y renoncer ou d’accepter le fait accompli", insiste le texte.

Baabda se défend aussi d’avoir "fermé ses portes devant le Premier ministre désigné". "Le président attendait seulement une nouvelle approche du Premier ministre désigné sur base de ses remarques au sujet de la première combinaison gouvernementale. Le but est de renforcer celle-ci à cause de la gravité de la situation dans le pays et dans la perspective des défis qui attendent le Liban lesquels ne tolèrent pas une expédition des affaires courantes prolongée ou des paris erronés", souligne le texte.

Elle révèle que Nagib Mikati a pris contact avec le président Michel Aoun avant son départ pour la fête de l’Adha et l’a assuré qu’il allait se rendre auprès de lui à son retour de voyage. M. Mikati est attendu lundi à Beyrouth.

Le communiqué présidentiel se défend en outre de "porter atteinte à la fonction du Premier ministre" et conteste la référence faite à l’entourage du chef de l’État, accusé par le Sérail de mener campagne contre lui et de s’ingérer dans le processus de formation du gouvernement. "Le président dit clairement ce qu’il a à dire, soit directement soit à travers son bureau de presse", poursuit le texte qui plaide pour la mise en place "pressante" d’un gouvernement capable de prendre des décisions exécutives.

La réaction du Sérail n’a pas tardé. Dans un communiqué, le bureau de presse de Nagib Mikati se félicite de ce que "la présidence de la République se soit lavée les mains du mal commis par certaines parties collées au chef de l’État ainsi que de l’attachement de ce dernier à la fonction de Premier ministre".

Il précise en outre que le Premier ministre désigné "n’a jamais dit qu’il veut priver le président de son droit à faire part de ses remarques" au sujet de la formule gouvernementale "qui fait l’objet d’un débat avec le chef de l’État".