30 août 2013: le président Barack Obama décide de ne pas ordonner les frappes contre le régime syrien, laissant la place à l’intervention russe en 2015. Début d’une guerre intermédiaire? Peut-être. Ou encore une confrontation masquée avec une Russie poutiniste plus déterminée que jamais de s’affirmer au niveau géopolitique…

Ces derniers jours ne font pas exception à la règle, car la Syrie continue d’être le théâtre d’une escalade entre la Russie et les États-Unis. Depuis le début du mois de juillet, le Pentagone a rapporté plusieurs incidents dangereux impliquant des avions russes qui harcèlent des drones américains.

Le 23 juillet dernier, un nouvel incident, le quatrième en un mois, a impliqué des chasseurs russes harcelant un drone américain en mission contre Daech en Syrie. (DVIDS)

 

Ces incidents mettent en évidence la tension croissante entre les deux puissances qui entament une surenchère géopolitique en Syrie.

Dans ce cadre, selon des informations ayant fuité sur le réseau social Discord et ultérieurement confirmées par le Washington Post, il ressort que les forces iraniennes, en collaboration avec le régime Assad et la Russie, seraient en train d’élaborer un plan visant à forcer les États-Unis de se retirer de Syrie, afin que le régime reprenne le contrôle du pays.

Ces indications s’inscrivent dans le sillage d’informations interceptées par les communications de hauts responsables pro-iraniens entre Beyrouth et Damas, et révélées par le Washington Post. Elles confirment l’organisation de tests d’engins explosifs par les forces iraniennes et russes à Dumeir, une ville située à 40 km au nord-est de Damas.

Ces tests serviraient, selon le quotidien américain, à cibler les forces américaines qui interviennent dans le cadre de la coalition internationale contre l’État islamique (Daech).

D’autres informations rapportées par le Washington Post ont révélé que Téhéran, Damas et Moscou tentent effectivement de fomenter une révolte antiaméricaine dans les régions du nord et du nord-est de la Syrie. Visant les territoires à population arabe contrôlés par les Kurdes, les alliés d’Assad miseraient sur la coexistence difficile entre les autorités régionales et les locaux.

La Syrie, note-t-on par ailleurs, est souvent le théâtre de raids aériens menés par Israël contre des installations militaires du régime ou des forces pro-iraniennes.

Selon le Post, en ciblant les forces américaines présentes en Syrie, le Hezbollah entendrait riposter aux attaques israéliennes contre leurs bases. Surtout dans un contexte particulier: une escalade régionale entre l’Iran et Israël dans la cadre de rapports, toujours plus inquiétants, de l’AIEA concernant le dossier nucléaire iranien.

Renforcer la posture de la Russie

Parallèlement, la Syrie demeure une garantie géopolitique pour la Russie, qui exploite sa mainmise afin de renforcer sa posture dans un contexte difficile pour le régime de Poutine.

Le président russe sort considérablement affaibli de la mutinerie du groupe paramilitaire Wagner, menée les 23 et 24 juin derniers. Surtout qu’il fut contraint de démanteler une milice qu’il a lui-même créée et financée et qui fut son plus grand allié dans la guerre en Ukraine et en Afrique subsaharienne.

Dans ce cadre, la Russie a récemment annoncé l’organisation d’exercices militaires conjoints avec la Syrie, dans le but, en apparence, de réaliser une démonstration de force.

De plus, dans la soirée du mardi 27 juin, plusieurs médias arabes ont divulgué des informations, citant un ancien responsable du ministère allemand de la Défense, que "des membres des armées syrienne et russe ont arrêté plusieurs membres de Wagner présents en Syrie".

Cette information a été confirmée par une source haut placée au Pentagone lors d’un échange avec la chaîne télévisée Sky News Arabia basée à Abou Dhabi.

Ces actions viseraient, non seulement à renforcer la présence militaire russe dans la région, mais aussi à dissimuler, autant que possible, l’image d’un régime et d’un chef d’État vulnérables. Les exercices, impliquant l’aviation militaire syrienne, coïncident d’ailleurs avec l’incident survenu entre les forces russes et les drones américains.

La purge des chefs de Wagner en Syrie, quant à elle, suggèrerait que les autorités russes chercheraient à renforcer leur emprise sur les activités des mercenaires de Wagner, afin de limiter tout débordement.

En exploitant la complexité géopolitique de la Syrie, Vladimir Poutine semble avoir opté pour un territoire qu’il a su maitriser suite à son intervention de 2015, mettant en avant ses victoires militaires de l’époque qui ont véritablement changé le cours de la guerre syrienne.

Contrastant avec l’échec militaire en Ukraine ou ses faiblesses internes suite à la mutinerie du groupe Wagner, le président russe aurait pour objectif de redorer et de rétablir son image de dictateur incontournable, démontrant sa capacité à exercer sa puissance à l’échelle géopolitique. Ce n’est cependant pas gagné d’avance.