La tragédie libyenne est devenue la preuve vivante du danger que représentent une mauvaise gouvernance et une carence des pouvoirs publics: l’Onu a déclaré jeudi que le nombre de morts aurait pu être moins élevé. De plus, les bilans avancés par les autorités varient d’un responsable à l’autre…

L’aide internationale à la Libye s’intensifie jeudi après les inondations dévastatrices rappelant un tsunami qui ont fait des milliers de morts et de disparus dans l’Est du pays, ravageant la ville côtière de Derna.

La plupart des victimes " auraient pu être évitées ", a estimé jeudi le patron l’Organisation météorologique mondiale, Petteri Taalas, lors d’un point de presse à Genève, pointant du doigt la désorganisation liée à l’instabilité politique.

Des experts du changement climatique ont établi un lien entre le désastre qui a frappé cette région de Libye et les effets d’une planète qui se réchauffe, combinés à des années de chaos et de délabrement des infrastructures en Libye.

La tempête Daniel a pris de l’ampleur au cours d’un été exceptionnellement chaud et s’était abattue sur la Turquie, la Bulgarie et la Grèce, avant d’atteindre la Libye dimanche.

Le déferlement d’eau dans la nuit de dimanche à lundi a rompu deux barrages en amont et provoqué des dégâts énormes dans cette ville de 100.000 habitants où des pâtés de maisons entiers, des voitures et un nombre incalculable de personnes ont été emportés dans la mer Méditerranée.

Des centaines de sacs mortuaires sont maintenant alignés dans les rues maculées de boue, dans l’attente d’une inhumation des victimes. Des habitants traumatisés et en deuil recherchent des proches disparus dans des bâtiments en ruine et des bulldozers évacuent des débris.

L’ONU, les États-Unis, l’Union européenne et de nombreux pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord ont promis d’envoyer des équipes de secours et de l’aide, notamment de la nourriture, des réservoirs d’eau, des abris d’urgence et des fournitures médicales.

Cependant, l’accès à la zone sinistrée reste très difficile après la destruction de route et de ponts, les dommages causés aux lignes électriques et téléphoniques coupées dans de vastes zones, où au moins 30.000 personnes se sont retrouvées sans abri.

De plus, ce pays d’Afrique du Nord est plongé dans le chaos depuis la mort du dictateur Mouammar Kadhafi en 2011, avec deux gouvernements rivaux, l’un reconnu par l’ONU basé dans la capitale Tripoli, à l’ouest, l’autre étant installé dans la région orientale touchée par les inondations.

Les bilans avancés par les autorités varient d’un responsable à l’autre. Si le porte-parole du ministère de l’Intérieur au sein du gouvernement de l’Est a fait état mercredi de plus de 3.840 morts, le ministre lui-même, Issam Bouznigua, a parlé quelques heures plus tard de 2.794 morts à Derna et dans les autres villes de l’Est. Le ministre de la Santé Othman Abdel Jalil avait dit lui s’attendre lundi soir à un bilan de 10.000 morts.

Un responsable de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR) a fait état, lui, d’un nombre " énorme " de morts qui pourraient se compter en milliers, avec 10.000 disparus.

Un responsable du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), Erik Tollefsen, a mis en garde contre le danger lié aux munitions non explosées qui ont été déplacées vers " des zones auparavant exemptes de contamination " par les crues.

Maria Chami avec AFP