Décidément, même un démocrate convaincu, ardent partisan du président Biden, aura froid dans le dos en écoutant le discours présidentiel d’hier. En effet, loin des messages de soutien infaillible à l’Ukraine, menacée par une invasion russe, ou des déclarations menaçantes envers le président Poutine, Joe Biden s’est livré hier à une analyse de stratégie militaire en public. 

" Je pense qu’il ne veut toujours pas d’une guerre à grande échelle ", a-t-il lancé au sujet de son homologue russe Vladimir Poutine.

Pour autant, " il va tester l’Occident ". " Je pense qu’il va rentrer " en Ukraine d’une manière ou d’une autre, " il va devoir faire quelque chose ", a dit Joe Biden.

" Si c’est une incursion mineure ", les membres de l’Otan risquent de se diviser sur l’ampleur de la riposte, mais si les Russes " font ce dont ils sont capables avec les forces qu’ils ont massées à la frontière, ce sera un désastre pour la Russie ", a-t-il insisté. La situation pourrait " échapper à tout contrôle ", s’est-il alarmé. En somme, des paroles qui dépassent tous ce que le président Poutine peut espérer.

Cette formulation ambiguë sur une incursion " mineure ", a attiré de vives critiques de l’opposition, qui a reproché au président démocrate de se résigner à une attaque russe.

" L’impuissance de Joe Biden a enhardi Vladimir Poutine, et voilà qu’il vient de donner un feu vert à Poutine pour envahir l’Ukraine ", a réagi sur Twitter le sénateur républicain Tom Cotton. " Donc s’il ne prend que certaines zones de l’Ukraine, notre réponse sera moins sévère que s’il annexe tout? ", s’est aussi indigné son collègue Marco Rubio.

Face au tollé naissant, la Maison Blanche a aussi assuré qu’il n’avait fait qu’établir une différence entre une offensive " militaire " d’une part et " non militaire, paramilitaire ou cyber " d’autre part. " Chacune de ces actions aura sa riposte proportionnelle ", a assuré une porte-parole, Emily Horne, sur Twitter.

Mais le sauvetage médiatique va finalement venir de la porte-parole de la Maison Blanche Jen Psaki, qui s’est empressée de clarifier les propos confus de Joe Biden, en promettant une réponse " sévère " si jamais des troupes russes pénétraient en Ukraine: " Si des forces militaires russes franchissent la frontière de l’Ukraine, cela constituera une nouvelle invasion qui attirera " une réponse rapide, sévère et unie des Etats-Unis et de nos alliés ", a-t-elle indiqué.

Joe Biden a en tout cas détaillé avec fermeté les conséquences d’une invasion d’envergure.

" S’ils envahissent, ils vont le payer, ils ne pourront plus passer par les banques, ils ne pourront pas faire de transactions en dollars ", a-t-il mis en garde, évoquant, outre ces sanctions sans précédent contre l’économie russe, le risque de " lourdes " pertes humaines sur le champ de bataille.

Le 46e président des Etats-Unis, dont le premier anniversaire à la Maison Blanche est terni, sur la scène internationale, par cette crise au parfum de Guerre froide, a toutefois tendu la main sur les exigences de la Russie et s’est même dit prêt à un nouveau sommet avec Vladimir Poutine.

Sur la garantie exigée par le Kremlin que l’Ukraine n’adhérera jamais à l’Otan, il a fait valoir que dans les faits, il était peu probable que Kiev devienne membre de l’Alliance atlantique dans un avenir proche — même si par principe, celle-ci ne ferme pas sa porte.

Sur la promesse que les Occidentaux ne déploieront pas d’armes stratégiques sur le territoire ukrainien, " nous pouvons trouver une solution ", sur la base de la réciprocité, a-t-il assuré.

Après une série de pourparlers diplomatiques en Europe la semaine dernière, Moscou et Washington doivent tenter une nouvelle fois vendredi de désamorcer la menace d’un nouveau conflit en Ukraine lors d’un face-à-face à Genève entre Antony Blinken et son homologue russe Sergueï Lavrov.

Le chef de la diplomatie américaine a déjà prévenu qu’il ne satisferait pas, lors du rendez-vous en Suisse, la demande russe d’un engagement écrit sur ses exigences.

Et parallèlement, les Etats-Unis ont annoncé une nouvelle aide " sécuritaire défensive " de 200 millions de dollars à l’Ukraine, s’ajoutant aux 450 millions d’assistance militaire déjà accordés.

La Russie a déployé des dizaines de milliers de soldats à la frontière ukrainienne, laissant craindre une invasion. Tout en niant tout projet d’attaque, le Kremlin martèle qu’une désescalade passe par des garanties écrites pour sa sécurité.

Depuis Kiev, le secrétaire d’Etat Antony Blinken appelait Moscou à choisir la " voie pacifique " à deux jours d’un nouveau face-à-face diplomatique russo-américain. " J’espère fortement que nous pourrons rester sur une voie diplomatique et pacifique, mais en fin de compte, ce sera la décision du président Poutine ", a dit Blinken, qui a rencontré mercredi le président Volodymyr Zelensky et son chef de la diplomatie Dmytro Kouleba.

Il a répété que certaines exigences russes étaient " clairement, absolument, vouées à l’échec ", comme l’engagement formel à ne jamais élargir l’Otan à l’Ukraine.

Après Kiev, le secrétaire d’Etat américain est attendu jeudi à Berlin pour des discussions avec l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni.

Avec AFP

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