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Un mois s’est écoulé depuis l’attaque meurtrière du mouvement Hamas contre Israël, le 7 octobre dernier, qui a entrainé, comme nous le percevons quotidiennement, l’enfer et le drame vécus, depuis, par la population palestinienne de Gaza. Les informations de ces derniers jours font état de nets progrès enregistrés par l’armée israélienne qui aurait coupé la bande territoriale en deux, entre le Nord et le Sud, et qui aurait même atteint le centre de la ville de Gaza.

Ces acquis enregistrés au niveau de l’offensive terrestre, s’ils se confirment et s’ils se consolident géographiquement, revêtent un caractère primordial à un double titre: dans l’immédiat, ils pourraient faciliter de courtes "pauses" dans les tirs et les combats en vue d’acheminer de l’aide humanitaire; et par la suite, ils pourraient, s’ils aboutissent en définitive aux résultats escomptés, ouvrir la voie à une relance d’une solution politique globale et durable, qui émergera dans les faits tôt ou tard. Dans l’attente que la situation se décante davantage sur le terrain, quelques indices précurseurs d’une possible feuille de route politico-diplomatique pointent à l’horizon et donnent une indication préliminaire de la direction dans laquelle le vent semble souffler.

Quelques éléments se dégagent d’abord des déclarations et démarches des dirigeants américains. Ces derniers insistent d’abord sur la nécessité de trêves humanitaires, "courtes et ciblées", précise sur ce plan la Maison-Blanche. Le président Joe Biden en a discuté au cours d’un entretien téléphonique avec le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, et les dirigeants européens ne cessent de revenir quasi quotidiennement sur la question. L’un des buts recherchés à cet égard est d’aboutir effectivement à une courte pause militaire et à l’acheminement d’une aide à la population avant le sommet arabe qui doit se tenir à Riyad samedi prochain, 11 novembre, afin de couper court à toute position en flèche que les dirigeants arabes pourraient être acculés à adopter. L’ancien directeur de la Sûreté général, Abbas Ibrahim, qui se pose en médiateur dans cette affaire, a confirmé tard mercredi soir, qu’une "pause" dans la guerre est "imminente" et prévoirait "un échange entre des ressortissants israéliens détenant une double nationalité et des Palestiniens blessés ou détenus dans les prisons israéliennes".

Dans ce cadre, la Maison-Blanche évoque depuis quarante-huit heures un projet de trêves, ou de pauses, qui pourraient durer "quelques heures ou quelques jours". Le pluriel dans l’évocation de trêves apparait pour la première fois dans les propos des officiels US. Cela indique que Washington désire que l’offensive israélienne contre le Hamas se poursuive… Sans doute jusqu’à la réalisation de l’objectif proclamé par l’État hébreu, à savoir l’élimination du Hamas de l’échiquier palestinien.

Cette insistance occidentale à obtenir des "trêves humanitaires" limitées s’accompagne de manière complémentaire du rejet clair et net de tout cessez-le-feu, au stade actuel, et du refus d’un retour à la situation qui prévalait à Gaza avant le 7 octobre dernier. Le porte-parole de la Maison-Blanche a été très explicite à ce propos, de même d’ailleurs que le président Emmanuel Macron et le Groupe des 7 (États-Unis, France, Royaume-Uni, Allemagne, Italie, Japon et Canada).

Sur le plan macro-politique, un leitmotiv revient régulièrement dans les positions américaines et occidentales: le refus d’impliquer le Hamas, seul, dans toute future négociation visant à déboucher sur une solution politique globale. Des sources dignes de foi ajoutent à ce propos, pour compléter le tableau, que les pays arabes, notamment les États du Golfe, auraient fait savoir qu’ils refusent que l’Iran joue un rôle direct dans le processus de règlement du conflit du Proche-Orient.  

Dans cette perspective de post-conflit, aussi bien les dirigeants US que l’Union européenne insistent sur le rôle de l’Autorité palestinienne dans la prochaine relance du processus de paix. Quitte à remodeler profondément le directoire de l’Autorité palestinienne. Comme pour bien poser les jalons d’une refondation de la future représentation des Palestiniens, le groupe des 7 a été encore plus explicite, dans le communiqué publié mercredi au terme de sa conférence, au Japon: il a d’abord demandé à l’Iran de mettre fin à son aide au Hamas (et au Hezbollah, par la même occasion), ce qui revient à annoncer la couleur quant à une limitation du rôle de Téhéran dans le prochain processus politique au P.O. ; et il a en outre souligné la nécessité de renforcer les mesures susceptibles de priver le Hamas de ses sources de financement, condamnant clairement, par ailleurs, l’attaque du 7 octobre et réaffirmant "le droit d’Israël à se défendre" tout en se prononçant, en outre, pour la solution des deux États en vue d’un règlement global de la crise du Proche-Orient.

Ce dernier point, fondamental dans le contexte actuel, revient régulièrement dans les positions des États-Unis, de l’Union européenne et d’autres pays du monde occidental depuis le 7 octobre, sans compter les États arabes et l’Autorité palestinienne. Il ne se passe pas un jour sans que les décideurs internationaux insistent sur cette option de paix. En clair, on assisterait à un retour au processus d’Oslo, complété par les accords d’Abraham.

Une telle voie nécessiterait la mise à l’écart des deux extrêmes, israélien et palestinien, qui ont torpillé en 1994 et 1995 les accords d’Oslo, en l’occurrence le Hamas et l’extrême droite israélienne – Netanyahou en tête – lesquels, ironie du sort, se retrouvent ensemble aujourd’hui au cœur d’une guerre dont l’aboutissement pourrait bien être la concrétisation de l’esprit du processus d’Oslo qu’ils ont eux-mêmes combattu, il y a près de trente ans, sans offrir à leur peuple respectif une autre perspective que l’instabilité chronique, le terrorisme et le conflit armé perpétuel, sans horizons et sans fin…