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Entre le Hezbollah et les Émirats arabes unis, une "détente" semble s’amorcer. C’est ce qui ressort, du moins, de la visite "inédite" du chef de l’unité de liaison et de coordination au sein du Hezbollah, Wafic Safa, à Abou Dhabi. Si ce déplacement portait officiellement sur la question des sept Libanais, détenus dans les geôles émiraties pour des liens présumés avec le mouvement pro-iranien, considéré comme "terroriste" par certains pays du Golfe, il n’en demeure pas moins que la visite semble servir des intérêts communs aux deux protagonistes.

Après des années marquées par une relation houleuse entre Abou Dhabi et le Hezbollah – plusieurs membres de la formation pro-iranienne ayant été arrêtés sur le territoire émirien –, "le tournant qui a été pris à ce niveau et qui prime par rapport à ces dossiers de second plan, c’est la relation diplomatique qui s’est installée entre Abou Dhabi et Damas", explique Didier Leroy, chercheur à l’École royale militaire de Belgique, interrogé par Ici Beyrouth.

Les Émirats ont, en effet, été le premier État membre de la Ligue arabe à avoir rouvert son ambassade, fin 2018, dans la capitale syrienne. "C’est probablement à l’aune de cet élément et de ce positionnement émirien assez particulier sur l’échiquier du Moyen-Orient qu’il faut comprendre qu’il puisse exister un canal de communication direct avec une personnalité aussi importante dans l’organigramme du Hezbollah, à savoir Wafic Safa", précise M. Leroy.

Un autre objectif pour les Émirats pourrait être, selon lui, "d’essayer d’éviter une escalade régionale, à l’œuvre depuis le 7 octobre (date du début de la guerre entre le Hamas et Israël, ndlr) puisqu’après avoir conclu les accords d’Abraham en 2020, ils n’ont aucun intérêt à ce que la région de la Méditerranée orientale se maintienne dans l’instabilité qu’elle connait actuellement". Pourquoi? Géographiquement, les Émirats sont en première ligne d’un conflit (s’il venait à éclater), se situant entre leur voisin perse d’un côté et le reste des pays du Golfe de l’autre. Ensuite, et d’après le fondateur du cabinet Celtic Intelligence, Jean Sébastien Guillaume, "Abou Dhabi a, tout comme Doha et Djeddah, des prétentions régionales et peut servir de plateforme à des échanges économiques, culturels et diplomatiques".

Il faut dire que les Émirats sont idéalement positionnés pour essayer d’influer sur les tensions et tenteraient de jouer la carte de la diplomatie. Le but serait de négocier avec un maximum de parties, dont Israël et celles qui sont proches de la Syrie, comme le Hezbollah", indique M. Leroy. Cette position d’équilibriste est d’ailleurs à l’œuvre dans toute la région, d’où la concurrence entre les différentes alliances.

Pour les EAU, la priorité demeure toutefois de se faire rayer de la liste des pays à risque de blanchiment établie par l’Union européenne (UE). Le 14 mars dernier, Bruxelles a rendu public l’acte délégué qui entérine sa décision de réhabiliter les Émirats, ce qui donne au Parlement européen un délai d’un mois pour se prononcer sur la question.

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