Le Rassemblement national a réalisé une performance historique au premier tour des législatives avec 33,14% des voix et 39 députés élus d’emblée. Face à cette percée de l’extrême droite, la gauche et la macronie appellent à des désistements pour empêcher une majorité absolue du RN au second tour.

Après le score historique du Rassemblement national au premier tour des législatives, gauche et macronie appellent à des désistements au second tour qui se mettent difficilement en place pour tenter d’empêcher que l’extrême droite ait une majorité absolue au soir du 7 juillet.

Trois semaines après le séisme des européennes et de la dissolution, la vague bleu marine a de nouveau déferlé avec plus de 10,6 millions de voix, soit 33,14% des suffrages au niveau national, un niveau historique – hors second tour de la présidentielle.

Porté par un taux de participation de 66,71%, le Rassemblement national a frappé un grand coup d’entrée, en faisant élire 39 députés dès le premier tour, à commencer par Marine Le Pen dans son fief du Pas-de-Calais. Idem pour ses lieutenants Sébastien Chenu (Nord), Julien Odoul (Yonne), Edwige Diaz (Gironde) et Laure Lavalette (Var).

Avec 27,99%, le Nouveau Front populaire a lui déjà 32 élus, parmi lesquels les insoumis Manuel Bompard, Mathilde Panot et Clémentine Autain, ainsi que le socialiste Olivier Faure et l’écologiste Sandrine Rousseau. Le camp présidentiel confirme la déroute des européennes et arrive en troisième position avec 20,04% des suffrages.

Exit en revanche le patron du parti communiste Fabien Roussel, balayé par le raz-de-marée RN dans le Nord, tandis que le franc-tireur François Ruffin se retrouve en ballottage compliqué dans la Somme même s’il va bénéficier du désistement de la candidate "Ensemble pour la République".

Combien de triangulaires? 

Un exemple parmi tant d’autres du dilemme posé aux macronistes et à la gauche, dans les plus de 300 circonscriptions en situation potentielle de triangulaire – voire de quadrangulaire dans une poignée de cas.

Arrivées en troisième position, les ministres-candidates Sabrina Agresti-Roubache et Marie Guévenoux ont ainsi déjà choisi de se désister pour faire battre le RN.

Mais, certains candidats de l’ex-majorité, bien qu’arrivés troisièmes, refusent de se retirer, estimant qu’ils ont davantage de réserves de voix que la gauche pour battre le RN au second tour.

Les candidats encore en lice ont jusqu’à mardi 18H00 pour décider de se maintenir, ou pas.

"Cacophonie"

Du côté du Nouveau Front populaire, les partis ont déjà donné une consigne claire: tout candidat arrivé en troisième position devra se retirer. Mais pour La France insoumise, cela vaudra seulement là où le RN est "arrivé en tête", a précisé Jean-Luc Mélenchon.

Manuel Bompard a ainsi indiqué sur RTL que LFI ne se retirerait pas par exemple dans la circonscription de Gérald Darmanin qui devance d’une courte tête le candidat RN.

En gage de bonne volonté, le candidat insoumis de la 6e circonscription du Calvados a annoncé son retrait au profit de l’ex-Première ministre Elisabeth Borne. "Nous allons la sauver", a même affirmé le patron du PS Olivier Faure.

La gauche a cependant dénoncé la "cacophonie" au sein de la majorité qui a du mal à exprimer une position unique sur le second tour entre ceux qui, comme Édouard Philippe, ne veulent ni du RN, ni de LFI et ceux, comme l’ancien ministre Clément Beaune qui ont appelé à se désister pour le Nouveau Front populaire, y compris pour un candidat LFI.

Tout plutôt que le "projet funeste" du RN, c’est la ligne défendue par l’actuel locataire de Matignon, Gabriel Attal, qui a lui aussi reconnu que "cela passera par le désistement de (ses) candidats" en "troisième position".

Mais seulement pour avantager "un autre candidat qui défend les valeurs de la République", a-t-il ajouté, soulignant que le camp présidentiel constituera "le meilleur choix pour éviter que le RN ne dispose d’une majorité absolue".

Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a de son côté appelé lundi à voter pour "le camp social-démocrate" qui n’inclut pas LFI.

Majorité relative 

En l’état, les projections des instituts de sondage anticipent une large majorité relative d’au moins 240 sièges pour les troupes de Jordan Bardella, voire une courte majorité absolue jusqu’à 295 sièges.

Mais ces projections sont faites avant désistements.

"Même si les électeurs ne suivent pas mécaniquement les consignes de leurs responsables politiques, on aura un effet qui jouera plutôt en défaveur du RN", a commenté le directeur général délégué d’Ipsos Brice Teinturier sur France inter.

Selon le politologue, "le point de départ est plutôt sur une majorité relative qu’une majorité absolue".

Si Jordan Bardella avait déclaré avant le premier tour qu’il n’irait pas à Matignon sans majorité absolue, Sébastien Chenu a semblé nuancer cette position.

"Il faudra regarder la configuration de l’Assemblée nationale. S’il y a effectivement à trouver des soutiens, nous assumerons nos responsabilités devant les Français", a-t-il déclaré sur France 2.

Pour que l’extrême droite atteigne la majorité absolue, Marion Maréchal a de son côté lancé sur RMC un appel à "la lucidité et à la responsabilité" aux électeurs de "centre droit".

Pour évoquer la question centrale des désistements, le chef de l’État a convoqué ses ministres à l’Élysée à 12H00.

Comme le veut l’usage, les parlementaires fraîchement élus pourront eux se rendre à l’Assemblée à partir de 14H00, pour prendre ou reprendre leurs repères.

Par Gabriel BOUROVITCH et Fabrice RANDOUX, AFP

 

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