Les candidats se sont échangés une rapide poignée de main et un bref sourire à leur arrivée sur le plateau de TF1 et France 2, avant de déclencher aussitôt les hostilités.
" Vous avez été, je pense, l’une des premières responsables politiques européennes, dès 2014, à reconnaître le résultat de l’annexion de la Crimée ", a dénoncé M. Macron, faisant référence à l’annexion non reconnue par la communauté internationale de la péninsule ukrainienne par Moscou.
" Vous l’avez fait pourquoi ? (…) Parce que vous dépendez du pouvoir russe et que vous dépendez de M. Poutine ", a-t-il ajouté dans une allusion à un prêt de 9 millions d’euros contracté en 2017 par le parti d’extrême droite de Mme Le Pen auprès d’une banque russe.
" C’est faux et c’est assez malhonnête ", a rétorqué sa rivale, en affirmant qu’aucune banque française ne lui avait accordé de prêt à l’époque et qu’elle n’avait " d’autre dépendance que de rembourser son prêt ". " Je suis une femme absolument et totalement libre ", a-t-elle martelé.
L’Europe, " une copropriété "
Europe, retraites, pouvoir d’achat, environnement, climat, sécurité, voile: les sujets ont défilé, les accusations aussi.
" Votre projet consiste à sortir de l’UE. Vous mentez sur la marchandise. L’Europe est une copropriété, on ne peut pas décider seul de ripoliner la façade ", a accusé par exemple Emmanuel Macron.
Mme Le Pen venait de dire qu’elle souhaitait " rester dans l’Union européenne ", mais " profondément la modifier pour faire émerger une +alliance européenne des nations+ ".
Sur le pouvoir d’achat, préoccupation numéro un des Français selon les sondages, les deux adversaires se sont accrochés sur leurs propositions respectives d’incitations à augmenter les salaires et primes, chacun accusant l’autre de faire croire que les hausses seront " automatiques ".
" Vous n’allez pas faire les salaires Mme Le Pen ". " Tout comme vous n’allez pas faire les primes M. Macron ", se sont répondu les deux candidats, qui se faisaient face pour la première fois à la télévision depuis leur duel télévisé en 2017.
La cheffe de file du Rassemblement national a défendu sa proposition de geler " les cotisations patronales " en cas d’augmentation de " 10% les salaires jusqu’à 3 fois le Smic ".
" C’est pas Gérard Majax ce soir madame Le Pen ", " vous n’expliquez jamais comment vous financez vos projets, vous n’êtes pas honnête avec les gens ", a attaqué le président-candidat.
Les deux candidats se sont aussi opposés sur les méthodes pour protéger le pouvoir d’achat, notamment sur l’energie, Emmanuel Macron défendant le " bouclier " déjà mis en place et son projet de " chèque alimentaire ", Marine Le Pen prônant une baisse de TVA.
" Climatosceptique " vs " Climatohypocrite "
" Vous êtes très bon en économie, d’ailleurs les entreprises vous adorent. Il y a 85 milliards de déficit de la balance commerciale. Ca c’est un chiffre, on ne peut pas le pipeauter, (…) qui est un record absolu ", a déclaré Mme Le Pen attaquant le bilan d’Emmanuel Macron.
" Vous nous expliquez avoir fait beaucoup d’efforts pour les plus modestes, moi je ce que je vois c’est qu’il y a 400.000 pauvres supplémentaires sous votre quinquennat, nous sommes dans un pays où il y a 9,8 millions de pauvres ", a-t-elle lancé.
Emmanuel Macron et Marine Le Pen se sont aussi opposés sur l’âge de départ à la retraite, que le chef de l’Etat souhaite porter progressivement à 64 ou 65 ans tandis que la candidate du RN veut rester " entre 60 et 62 ans ".
Les deux adversaires ont par ailleurs étalé leurs divergences sur l’écologie, Mme Le Pen accusant M. Macron d’être " climatohypocrite " tandis qu’elle était traitée de " climatosceptique ".
Au cours d’un échange plus musclé, Marine Le Pen a ironisé sur le fait que son adversaire voulait mettre des éoliennes en mer " partout, sur toutes les côtes, sauf en face du Touquet ", la station balnéaire du Pas-de-Calais où le couple Macron possède une résidence secondaire. " Madame Le Pen… ", " Vous rigolez ? ", a réagi Emmanuel Macron d’un air outragé.
" Une trahison de l’esprit français "
Sur la sécurité, Mme Le Pen a parlé d' "une vraie barbarie ", notamment en raison de " l’immigration anarchique et massive ", ce à quoi Emmanuel Macron a répliqué que les Français ne voulaient pas " des postures ".
Le ton est monté lors d’un échange sur le voile que Mme Le Pen souhaite " interdire dans l’espace public ". Ce serait " une trahison de l’esprit français et de ce qu’est la République ", a rétorqué M. Macron.
Les lieutenants des deux candidats ont défendu leurs champions pendant le débat, l’insoumis Jean-Luc Mélenchon, arrivé troisième au premier tour, y voyant un " gâchis ".
Jordan Bardella a estimé que Marine Le Pen avait été " digne ", et Louis Alliot dénoncé sur Twitter le " mépris " d’Emmanuel Macron. Du côté du candidat-président, Gabriel Attal a souligné qu’Emmanuel Macron avait montré " les contradictions " de sa rivale notamment sur la Russie.
Avec AFP