Le Liban est riche… en communautés religieuses.
Dix-huit communautés, c’est l’âge de la majorité ! Sauf que, quand on parle de communautés religieuses, c’est surtout le côté mineur qui prône. Le " mon père est plus fort que le tien ", le " je préfère employer un comme moi plutôt que… ", ou même " la pauvre elle est répudiée par ses parents car elle va épouser un tel… "
Bref… Entre ces 18 communautés qui cohabitent tant bien que mal au quotidien, quatre se sont fréquemment fait la guerre: maronites, sunnites, chiites et druzes, et les autres ont suivi, avec les uns ou les autres.
Les guerres que se sont livrées ces communautés furent, très souvent, " les guerres des autres au Liban ", et cela ne date pas d’hier !
Au XIXe siècle déjà, les Européens se livraient bataille sur notre petit " lopin de terre " par communautés libanaises interposées : les maronites soutenus par la France et les druzes sous la bannière du Royaume-Uni.
Et ainsi de suite, à travers l’histoire tourmentée du Liban, changement de belligérants qui manipulent facilement les marionnettes locales, toutes étant des minorités à protéger (les uns des autres, bien évidemment). Ces minorités puisent leur semblant de pouvoir de ces forces externes, des marionnettistes professionnels aux discours prometteurs.
Le Grand Liban a donc vu le jour à travers un assemblage improbable de quatre géopolitiques différentes, habitées par des communautés culturellement, ethniquement, économiquement et socialement opposées.
Pour que ces composantes hétéroclites puissent former un pays uni, la nation libanaise, il aurait fallu œuvrer pour créer une citoyenneté commune, les unissant dans un projet social et économique commun, puisant dans les avantages de chaque région et le savoir-faire de ses habitants au profit de la nation entière.
C’est exactement l’inverse qui a été fait jusqu’à ce jour !
La promotion telle quelle de ce nouvel Etat ne pouvait qu’entraîner ses principales composantes à s’affronter, qui plus est dans un climat prégnant de confessionnalisme et de sectarisme.
En réalité, le Grand Liban n’a pas été créé pour devenir une nation indépendante, mais pour être asservi aux puissances tutélaires, à l’inverse de ce que le général Gouraud avait proclamé dans son discours de 1920, acclamant la nouvelle liberté du Liban et les conditions pour que le peuple libanais devienne un grand peuple : l’union ; l’unité politique et administrative et le droit au respect de tous. Où en-sommes-nous de tout cela ?
Gouraud avait également souligné qu’il faudrait faire de vrais sacrifices dans la mesure où " une patrie ne se crée que par l’effacement de l’individualisme devant l’intérêt général, commandé par la foi dans les destinées nationales ".
Je vous invite à relire ces dernières phrases plusieurs fois, peut-être même essayer de les réécrire, en plusieurs couleurs, comme nos punitions scolaires d’antan.
La suite de notre histoire depuis, nous ne la connaissons hélas que trop bien et nous avons tous tant souffert pendant ces cent dernières années, submergés par une série continue et ininterrompue de violences et d’épreuves, et couronnées par la crise étouffante des deux dernières années.
La crise libanaise est internationale. C’est, encore une fois, la guerre des autres chez nous, sur notre petite " terre-couloir ". Si on ne relit pas et on ne comprend pas notre propre histoire et si on ne s’unit pas en un seul peuple, une nation unique, nous serons bientôt ensevelis sous un tsunami de forces politiques externes représentées par nos marionnettes locales, et l’histoire écrira ces quelques lignes : " Il était une fois un pays, il était une fois le Liban… "