Après une douzaine de jours d’une saga innommable, le verdict est (enfin) tombé: la Cour fédérale australienne a confirmé l’annulation du visa de Novak Djokovic et son expulsion du pays. Venu avec pour objectif de décrocher la Lune à Melbourne, le Serbe a été prié de plier bagages afin de retrouver du côté de chez lui des cieux plus cléments.

Qui aurait pu imaginer cela le 4 janvier dernier? Serein, tranquille, " Nole " (surnom de Djoovic) publiait alors une photo sur les réseaux sociaux. Lui, ses valises et ses raquettes, en partance pour l’Australie après avoir obtenu une exemption médicale. Djokovic, qui n’a jamais communiqué sur son statut vaccinal, annonce sur les réseaux sociaux qu’il a obtenu une " dérogation " pour participer à l’Open d’Australie, où il vise une 10e victoire et un 21e sacre record dans un tournoi du Grand Chelem. Le n°1 mondial avait alors le sourire. Il l’a probablement perdu depuis. Car cette annonce met le feu aux poudres en Australie.

Et pour cause: les participants doivent fournir un certificat de vaccination ou une exemption médicale délivrée par un panel d’experts indépendants.

Suivra alors un feuilleton rocambolesque, où il est d’abord bloqué à l’aéroport de Melbourne pour incapacité de prouver que sa " dérogation médicale " est justifiée. Son visa est alors annulé. Djokovic dépose un recours en justice contre cette décision. En attendant le verdict, il est placé dans un centre de rétention.

Sentant le complot colonialiste se profiler à l’horizon, Srdjan Djokovic, son père, dégaine immédiatement. Il enfile à la hâte ses caligae, pour voler – glaive à la main et pilum sur le dos – au secours de son rejeton.

" Aujourd’hui ils peuvent le jeter dans un donjon, demain ils peuvent l’enchaîner. Novak est le Spartacus (sic) d’un nouveau monde qui ne tolérera pas l’injustice, le colonialisme et l’hypocrisie ", s’est fendu Srdjan Djokovic, en conférence de presse jeudi dernier. " Ils le gardent en captivité. Ils piétinent Novak pour piétiner la Serbie et le peuple serbe. Morrison (le Premier ministre australien) et ses semblables ont osé attaquer Novak pour mettre la Serbie à genoux. Ça n’a rien à voir avec le sport, c’est politique. Novak est le meilleur joueur au monde, mais quelques centaines de millions de personnes à l’ouest ne peuvent pas le supporter ", a ajouté sans rire papa Djokovic.

Le lendemain, estimant que la comparaison avec Spartacus était un brin déplacée, le bon papa rectifie le tir et compare son fiston, cette fois-ci au… Christ. Rien que ça ! " Jésus a été crucifié sur la croix et tout lui a été fait. Mais il est encore vivant parmi nous maintenant. Maintenant, Novak est en train d’être crucifié, ils lui font tout ". S’exprimant à l’occasion d’un ralliement en soutien de son fils organisé devant l’Assemblée du pays à Belgrade, le paternel n’a pas lésiné sur la fibre nationaliste en évoquant la " fierté " du peuple serbe. Il faut dire que quand la famille Djokovic passe à l’attaque, Srdjan Djokovic ne fait jamais dans la dentelle.

Le lendemain, ses avocats indiquent qu’il a obtenu une exemption de vaccination car il a été testé positif le 16 décembre. Mais ils oublient de préciser que Djokovic participe le jour même à un événement public où est présenté un timbre à son effigie et s’affiche sans masque sur ses propres posts Instagram. Pire encore, faisant fi d’une période d’isolement qu’il aurait dû respecter,  il accueille des enfants dans son académie, le Novak Center, à Belgrade. Le lendemain, toujours au Novak Center, le numéro 1 mondial reçoit les reporters de L’Équipe pour une longue interview (masquée) et une séance photo (sans masque).

Toutefois, le 10 janvier Djokovic est entendu par le juge Kelly, qui lève l’annulation de visa du Serbe, estimant qu’il n’était pas en mesure de fournir plus de renseignements à la police des frontières. Nouveau rebondissement le lendemain : sur son document d’entrée sur le territoire australien, Djokovic a " oublié " de préciser qu’il avait voyagé durant les quatorze derniers jours avant son arrivée. Il est allé en effet s’entraîner à Marbella, en Espagne, après avoir fêté Noël à Belgrade. Pour se défendre, le Serbe explique que Tennis Australia a rempli cette déclaration en son nom. Le 12, Djokovic s’exprime enfin par le biais d’un communiqué où il admet ses " erreurs ": l’interview et le formulaire. Il reprend l’entraînement. Le 14 janvier, le ministre de l’Immigration Alex Hawke décide d’annuler pour la deuxième fois le visa du n°1 mondial. Il est soutenu dans sa décision par le Premier ministre australien Scott Morrison. Djokovic retourne en rétention. Au passage, ses adversaires, Nadal en tête, sont copieusement agacés par ce vaudeville rocambolesque et critiquent le comportement du Serbe.

Enfin, le 16 janvier, la Cour fédérale confirme l’annulation du visa de Novak Djokovic, qui ne disputera donc pas l’Open d’Australie 2022. Triste épilogue pour le Serbe qui va manquer le premier grand chelem de l’année. Pour la petite histoire, l’Italien Salvatore Caruso est le " lucky loser " qui va remplacer Novak Djokovic dans le tableau final de l’Open d’Australie

Pour avoir affiché une assurance qui a frôlé l’insolence, assortie d’une obstination insensée durant cette période, Djokovic est loin d’avoir gagné en popularité. Loin s’en faut. A force de revirements, son image déjà atteinte est désormais marquée au fer rouge par ses maladresses et ses mensonges. Déjà le charisme n’était pas le point fort de Novak Djokovic, mais n’est pas Jimmy Connors qui veut. Toujours est-il que cette saga risque bien de ternir son image et compromettre son avenir sportif.

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