Les grands clubs de basket libanais doivent essentiellement compter sur les sponsors, les donations et les apports personnels pour générer des recettes, en raison du mode de répartition des recettes de billetterie et des droits audiovisuels qui leur sont défavorables.

Pour financer leurs importantes dépenses, les clubs ont plusieurs sources de recettes. Les principaux revenus proviennent des sponsors, des donations, des financements personnels et dans une moindre mesure des recettes des droits TV et de la billetterie, redistribués par la Fédération.

Les droits TV et numériques, d’un montant total de 1,1 million de dollars sur trois saisons (2021 à 2024), sont repartis de la façon suivante: 20% de ce montant est réservé à la Fédération libanaise de Basket (FLB), 10% à la première division de basket féminin, et 70% sont repartis équitablement entre les clubs de première division masculine. Le montant payé par les diffuseurs sur cette période de trois ans varie d’une saison à l’autre, et il est progressif. Les onze clubs de l’élite devraient donc recevoir au total 770.000 dollars sur trois ans en droits TV, soit 70.000 dollars par club, et près de 236.000 dollars pour chaque club, par saison. Chaque club perçoit donc 6,36 % du montant des droits TV et numériques réservés à la première division masculine. Le président de La Sagesse, Élie Yahchouchi, souligne que ce mode de répartition est très différent de ce qui se fait dans le sport professionnel mondial: "Mondialement, la répartition est guidée par des critères incluant notamment le classement sportif et le nombre de téléspectateurs."

En effet, si l’on compare le mode de répartition des droits TV du basket libanais à la distribution effectuée dans le championnat espagnol de football, la méthodologie est très différente. La Liga octroie par exemple une part plus importante des revenus des droits TV à ses grands clubs, en prenant notamment en compte le classement sportif et la médiatisation du club dans la redistribution. Sur la saison 2019-2020, le Barca a empoché 165 millions d’euros et le Real Madrid 156,2 millions d’euros, sur les 1.417 millions d’euros distribués cette année. Soit 11,6% et 11% du total. En comparaison, les deux cadors du championnat du Liban (Riyadi et Sagesse) ne touchent chacun que 6,36% chacun du montant total des droits TV. Certes, la distribution égalitaire présente l’avantage de soutenir les clubs de seconde zone de l’élite, mais elle nuit à la compétitivité des grands clubs libanais au cours de compétitions régionales et continentale, où d’importants investissements sont nécessaires pour construire une équipe solide.

Le mode de répartition des recettes de billetterie est lui aussi très différent de ce qui se produit dans le sport de haut niveau. Le mode de répartition est là aussi très égalitaire entre les clubs. La répartition est actuellement la suivante: 20% des recettes de billetterie reviennent à la Fédération. La Fédération paie ensuite différents frais d’organisation des matches comme les arbitres, les arbitres de table… Le montant restant est ensuite distribué équitablement entre les 11 clubs. Autant dire que ce système lèse grandement les grands clubs de l’élite, qui jouent beaucoup de leurs matches à guichets fermés, tandis que des clubs de second plan jouent certains de leurs matches dans des stades peu remplis. Élie Yahchouchi explique à Ici Beyrouth que "ce mode de répartition n’existe que dans le basket libanais". "Il existe depuis très longtemps et n’est pas rationnel. Toutes les fédérations sportives au monde n’adoptent pas de système similaire. Même dans le football libanais, le système est différent. Quand au cours d’un match à domicile, 1.000 spectateurs assistent au match, les recettes rentrent dans les caisses du club. Dans le système actuel du basket libanais, un club qui a 10 supporters et un autre qui en a 10.000 généreront les mêmes recettes de billetterie. Si la billetterie revenait aux clubs, La Sagesse engrangerait par saison entre 800 millions et 1 milliard de livres libanaises. J’ai présenté un document de réforme à la Fédération, incluant une demande de changement du mode de redistribution des recettes de billetterie", a ajouté M. Yahchouchi.

Le président de Riyadi Beirut, Mazen Tabbara, est également pour une évolution sur le dossier des recettes de billetterie: "Nous cherchons à faire un changement concernant le mode de répartition. Mais cela doit passer par un accord avec la Fédération libanaise de basket. En raison de la situation économique actuelle du pays, les changements sont plus difficiles à faire passer. Nous proposons que 60% des recettes de la billetterie produite par Riyadi au cours de ses matches à domicile nous reviennent, que 20% aillent à l’ensemble des clubs restants et que 20% reviennent à la Fédération."

Ainsi, dans l’écosystème actuel, les meilleurs clubs de l’élite ne profitent pas pleinement de la manne financière que peuvent leur générer les recettes de billetterie, les droits TV et les droits numériques. Les meilleurs clubs de football européen assurent près de 50% de leurs revenus grâce à ces deux postes de recettes. Les principaux clubs de basket libanais se retrouvent donc excessivement dépendants des sponsors, des donations et des apports personnels. Le président de SC Beirut, Nadim Hakim, precise que dans le schéma actuel, "les recettes de billetterie représentent une part négligeable des revenus du club".

Si cette redistribution des recettes de billetterie et des droits audiovisuels souhaitée par les grands clubs diminuerait les recettes des clubs de second plan, ceci pourrait aussi les inciter à s’inspirer de l’écosystème optimal en vigueur dans le sport européen, où ces clubs à la popularité et à la zone de chalandise moins importantes se focalisent sur le poste de recettes de ventes et d’achats de joueurs pour assurer leur pérennité financière. Et cela passe par une plus grande importance accordée à la formation, qui leur permettra de bénéficier de recettes importantes sur la vente de joueurs, tout en ayant la possibilité de briller sportivement certaines saisons, lors de l’éclosion de générations dorées.