La campagne contre le commandant en chef de l'armée, le général Joseph Aoun, et l'institution militaire dans son ensemble s'intensifie. Elle est notamment menée par les partisans du Hezbollah, y compris certains de ses hommes politiques et une partie de sa base.
L'opération de commando israélienne à Batroun et l'enlèvement de Imad Amhaz ont apporté de l’eau au moulin des détracteurs de l’armée, qui se sont empressés de renouveler leur slogan favori, à savoir que celle-ci n'est pas en mesure de protéger le Liban.
Il va sans dire que cette campagne est savamment orchestrée, dans la mesure où elle sert un dessein précis: barrer la voie à une application de la résolution 1701 du Conseil de sécurité en sapant le principal pilier de la mise en œuvre de cette résolution, c’est-à-dire les forces régulières.
Ce n’est un secret pour personne que le Hezbollah n’est pas favorable à l’application de 1701, dont il n’a jamais tenu compte d’ailleurs. Il ne peut pas cependant l’exprimer ouvertement, notamment par la voix de son allié, le président de la Chambre et chef du mouvement Amal, Nabih Berry, qu’il a chargé de négocier un cessez-le-feu en son nom, mais qui maintient son engagement en faveur de cette résolution.
Aussi, pour empêcher sa mise en œuvre, il procède à une autre tactique: paralyser l'armée en neutralisant son commandement, comme en témoigne le peu d’empressement manifesté jusqu'à présent pour prolonger le mandat du général Joseph Aoun, qui arrive à son terme le 10 janvier prochain, alors que le pays reste sans président et sans gouvernement doté des pleins pouvoirs pour procéder à des nominations.
La guerre en cours entre Israël et le Hezbollah rend improbable l’élection d’un nouveau président dans un très proche avenir, ainsi que la formation d'un gouvernement capable de nommer un successeur au général Aoun avant cette date.
La perspective d'un vide à la tête des forces régulières inquiète de nombreuses parties. Celles-ci craignent que les luttes intestines pour le choix d’un remplaçant intérimaire n’engendrent un certain chaos au sein du commandement. Cela pourrait empêcher la Troupe d’assumer ses missions, notamment le maintien de l'ordre, tant aux frontières qu’à l'intérieur du pays, laissant le Liban vulnérable à de nouvelles menaces sécuritaires. Dans un tel contexte, l’armée libanaise serait probablement incapable de veiller à la mise en œuvre de la 1701, ce qui risque d’inciter plusieurs pays, notamment les États-Unis, à revoir leur soutien financier et militaire.
C’est ce que certains voudraient justement afin de pouvoir dire que l’état de chaos dans lequel le Liban et son armée sont plongés ne permet pas une application de la 1701 qui prévoit, comme on le sait, un retrait du Hezbollah jusqu’au nord du Litani, l’interdiction de toute présence armée ou militaire illégale au sud de ce fleuve, ainsi que le désarmement des milices en application de la résolution 1559 à laquelle il fait référence.
Dans le même ordre d’idées, la Finul se retrouve aussi dans le collimateur de ceux qui ne veulent pas que la 1701 soit appliquée. La force multinationale de paix est, avec l’armée, le second pilier de cette résolution. Ses détracteurs ont récemment placé dans leur viseur ses forces navales, notamment le contingent allemand accusé d'avoir facilité l'opération de débarquement israélienne à Batroun, samedi.
Pourtant, la force navale de la Finul comprend d'autres nationalités et se compose de cinq navires seulement. Elle est chargée d’assister l’armée libanaise dans l’inspection de navires suspects, mais n’a pas l’autorité d’intercepter des bateaux dans les eaux territoriales libanaises. Selon les déclarations officielles des Nations unies, la force navale a pour mission de soutenir la marine libanaise dans la surveillance des eaux territoriales et d’interdire l’entrée d’armes non autorisées et de matériel connexe dans sa zone d’opérations.
Les détracteurs de la Finul ont semble-t-il oublié que l’armée israélienne, qui a détruit les défenses aériennes iraniennes et frappé des sites stratégiques de production de missiles en Iran, est parfaitement capable de mener une opération de débarquement au Liban en échappant aux dispositifs libanais de surveillance, notamment les radars maritimes. D’ailleurs, l’opération de Batroun s'est déroulée dans une zone réputée touristique et éloignée des zones de conflit, où les mesures de sécurité ne sont pas renforcées, puisqu’il s’agit d’un secteur calme.
Elle ne nécessitait donc pas de présence particulière de la Finul ou de la marine libanaise, à l’instar de nombreuses autres zones côtières au Liban en dehors de la région sud.
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