La date du 26 novembre aura marqué un tournant dans la guerre qui dure depuis plus d’un an entre le Hezbollah et Israël. Mardi soir, un cessez-le-feu a été décrété au Liban, avant d’entrer en vigueur au petit matin de mercredi. Si l’accord entre les belligérants constitue une étape importante dans la gestion des tensions qui ont secoué le pays ces derniers mois, l’enjeu majeur réside aujourd’hui dans la phase d’après, surtout que certaines dispositions de l’accord ne sont pas sans équivoque. Cette nouvelle étape qui s’annonce repose donc sur deux volets importants: sécuritaire et politique. Elle devrait normalement déboucher sur une paix durable si le plan est exécuté comme prévu… sauf si de nouvelles dissensions relatives aux mécanismes d’application surgissent en cours.
Le volet sécuritaire
Si le cessez-le-feu est entré mercredi en vigueur, des points d'ambiguïté persistent sur certains aspects de cet accord-cadre et les tensions liées aux activités militaires et aux mouvements des troupes ont créé des zones d'ombre dans le texte, laissant place à des malentendus possibles entre les deux camps.
Pour y remédier, le Liban attend l’arrivée imminente d'un officier américain qui règlerait définitivement l’affaire. Sa mission est donc perçue comme essentielle pour garantir la stabilité à long terme de la région et la mise en œuvre effective du deal. “Les réunions vont donc se multiplier dans ce sens”, selon une source qui suit le dossier de près et ”l’officier en question aura pour charge de les présider pour s’assurer que les mécanismes d’exécution sont bel et bien clairs pour toutes les parties prenantes”. Sa venue a donc pour but de faciliter la communication entre les deux parties et de s’assurer que les conditions du cessez-le-feu sont respectées dans leur intégralité.
“Cela permettra plus tard de procéder à l’application des termes de cette entente, laquelle ne sera pas sans embûches”, toujours selon cette même source. Tout dépendra dans ce contexte du rôle qu’endossera le président syrien, Bachar el-Assad, qui a fait l’objet d’une mise en garde, mardi soir, lors du discours du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou. “Assad doit comprendre qu’il joue avec le feu”, a-t-il lancé, faisant allusion aux tensions et opérations militaires en cours en Syrie, pays à partir duquel transitent les armes du Hezbollah en provenance d’Iran.
Si la position adoptée par Damas durant cette phase est à suivre de près, d’autres questions restent à élucider: le repli des Israéliens se fera-t-il durant la période des 60 jours ou au bout de 60 jours (comme l’insinue l’État hébreu)? Quid du déploiement de l’armée libanaise le long de la frontière entre le Liban et Israël? Quand et comment sera-t-il entrepris? Qu’en est-il du comité d’observation qui doit veiller à l’application de la résolution 1701 sur laquelle repose essentiellement l’accord actuel? Si les États-Unis président ce comité, la France, elle, aura un rôle crucial à jouer. “N’oublions pas que la France est directement concernée par la question, d’autant plus qu’elle dispose d’un contingent de 700 soldats de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul)”, indique-t-on de source diplomatique. “La France aura une mission importante au sein de ce comité qui constitue une sorte de garantie, pour les deux parties, du respect de la 1701 et du mécanisme d’application”, ajoute-t-on de même source, avant de poursuivre: “Ce comité permettra de faciliter les échanges afin de trouver des solutions à tout problème qui pourrait être perçu sur le terrain.”
Le volet politique
Avec l’arrivée, mercredi, de l'émissaire français, Jean-Yves Le Drian (selon une source diplomatique), Paris se lance dans un long processus qui constitue la continuité d’une mission de longue date qu’il s’est attribuée: celle de soutenir le Liban, notamment sur le plan politique.
Cette septième visite de M. Le Drian au Liban “s’inscrit dans le cadre de l’engagement français constant en faveur du Liban pour l’aider surtout à trouver un cadre favorable à l’élection d’un président de la République (poste vacant depuis octobre 2022, ndlr)”, souligne-t-on de source diplomatique.
Cet engagement va plus loin et englobe la question des postes vacants au sein des institutions publiques, mais aussi celle du processus de réforme qui doit être enclenché par la classe politique. Processus qui nécessite la formation d’un gouvernement et l’approbation, au niveau du Parlement, de plusieurs lois réformatrices dans tous les secteurs”, ajoute-t-on de même source.
Ainsi, et alors que les regards se tournent vers l'avenir du Liban, le rôle du Quintette – composé des États-Unis, de la France, de l'Arabie saoudite, de l'Égypte et du Qatar – devient central pour accompagner le pays dans son rétablissement politique et institutionnel. Une réunion du Groupe des Cinq est nécessaire et sera bientôt à l’ordre du jour, comme l’ont confié à Ici Beyrouth des responsables politiques. Car, en plus du vide présidentiel, le Liban n’a qu’un gouvernement d’expédition des affaires courantes et ses institutions sont fragilisées par une corruption endémique et une gestion politique défaillante.
Si les cinq pays ont des influences parfois divergentes, il n’en demeure pas moins que leurs intérêts stratégiques à voir le Liban stabilisé priment à l’heure actuelle. Leur coopération est donc un élément essentiel pour appuyer les réformes nécessaires et le redressement du Liban. De fait, le soutien du Quintette pourrait se traduire par des pressions diplomatiques et des incitations économiques. Cependant, la réussite de ces initiatives dépendra de l'engagement réel du gouvernement libanais.
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