Au fil des jours, sur les petits écrans, par la voix de personnalités politiques ou d’observateurs de tous bords, il est cité, encore invisible, sans nom, devant porter toutes les qualités requises dans un président et ployant déjà sous le poids des adjectifs qui devront peser sur ses épaules: fort, courageux responsable, honnête, combattif, exceptionnel, rassembleur, diplomate et fin politicien, porteur de masters en économie et en finances. Certains souhaitant même qu'il ait des connaissances en santé et d'autres, exigeant qu'il ait des compétences en ressources hydrauliques et électriques, conjuguant ces qualités au féminin. Bref, un homme ou une femme hors pair, mais qui restent à trouver. Une tâche ardue apparemment et qui me porte à me souvenir de cette histoire autour d'Alexandre le Grand, en 333 av. J.-C.
Poursuivant ses conquêtes dans la province de Phrygie, en Anatolie, Alexandre parvient jusqu'à Gordion en 333 avant J.-C. C'est là que lui est présenté le char du légendaire roi Midas, le roi aux mains d'or, dont le timon est noué par un nœud inextricable: le nœud gordien.
Les prêtres de la cité le présentent à Alexandre et lui racontent la légende selon laquelle celui qui parviendra à dénouer ce nœud deviendra le maître de l'Asie. Le défi est à la hauteur de la réputation d'Alexandre: personne n'a jamais réussi à dénouer ce nœud. D'un geste ample, Alexandre tranche les cordes d'un coup d'épée. Les historiens ne s'accordent pas tous sur cette version et affirment qu'il aurait plutôt réussi à le dénouer.
Peu importe la version ici. L'essentiel est ailleurs. Alors est-ce Alexandre que nous attendons? Et faudrait-il qu'on lui amène le char dont le timon est noué? Ne nous faudrait-il pas d'abord résoudre l'énigme du nœud et puis trouver la personne qui pourrait porter les qualités attendues? C'est justement là que le jeu parlementaire entre en scène. Comment cela, nous dira-t-on? Eh bien, par son absence magistrale, le jeu parlementaire devient lui-même un nœud gordien et c'est, vous l'aurez peut-être compris, au Parlement que nous trouverons le char tant recherché. C'est là, dans cet espace, que le nœud devra être tranché. Que tout devra se jouer avant la date prévue de l'élection.
Pour permettre au jeu parlementaire de se mettre véritablement en marche, ne serait-il pas plus approprié que les différents prétendants à la présidence de la République annoncent leur candidature et leur programme à une date précise, afin de laisser ainsi libre cours au jeu démocratique, en attendant l'arrivée du jour J?
En ne faisant pas cela, nous restons malheureusement dans des tractations du passé, qui ne sauront dépasser les petits calculs et les intérêts personnels. Le véritable enjeu est là. Avant d'entendre défiler des personnes sous X, c'est-à-dire sans noms, dépeints en supermen, c'est-à-dire avec toutes les qualités imaginées, ne faudrait-il pas des programmes susceptibles de remettre le Liban sur les rails? Que les masques tombent! Et de grâce, que les candidats se dévoilent. Ne mettons pas la charrue avant les bœufs, dit bien le proverbe.
Réussirons-nous à dénouer ce nœud ou à le trancher? Telle est la question qu'il nous faudra résoudre, afin qu’à travers le débat, on identifie des hommes et des femmes porteurs de vision, pour que le Liban sorte de l'agonie totale et que son peuple recouvre ses droits usurpés.
*Président de l’Association des hommes d’affaires libanais de France
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