Présidentielle: les douze travaux du Parlement
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Jour-J, place de l’Étoile. C’est ici et aujourd’hui, jeudi 9 novembre 2025, que devrait (enfin?) être élu un nouveau président de la République libanaise, après trois ans de vacance à la tête de l’État et douze séances électorales avortées. C’est aussi ici et aujourd’hui que devraient se réunir (à moins d’une surprise de dernière minute) les 128 députés, avec un seul objectif: voter.

Il faut dire que depuis la fin du mandat, en octobre 2022, de l’ex-président Michel Aoun, le Liban a traversé une période de vacance présidentielle, doublée d’une succession de crises tant économiques que sécuritaires, la dernière étant la guerre qui a opposé le Hezbollah à Israël. De divisions politiques en divisions politiques, de visites diplomatiques en visites diplomatiques, la scène politique libanaise s’est noyée dans des tergiversations sans fin. Le rivage sera-t-il, cette fois-ci, atteint? À quelques instants de l’élection présidentielle, le nombre de voix en faveur de Joseph Aoun continue d'augmenter. Selon les dernières estimations, le commandant en chef de l’armée pourrait obtenir une majorité de voix, à l'exception de celles du Courant patriotique libre et du Hezbollah, qui pourraient toutefois changer de position à la dernière minute et apporter leur soutien au général Aoun. D’ici là, Ici Beyrouth vous propose un défilé des douze séances électorales passées.

Le 30 octobre 2022, clap de fin pour le général Michel Aoun. Après six ans de règne, l’ancien chef du Courant patriotique libre quitte le palais de Baabda. Depuis, le Liban fait face à une paralysie politique prolongée. Ainsi, depuis le 1er novembre 2022, les députés ont été convoqués 12 fois, invités à voter pour un nouveau président. Aucun consensus n’ayant été atteint, aucune élection n’a pu aboutir à l’élection d’un chef de l’État. Mise au point.

Séance du 29 septembre 2022

À cette première séance à laquelle se sont absentés six députés, 122 sur 128 ont participé au scrutin. Aucun candidat n’a obtenu la majorité des deux tiers du Parlement, à savoir le nombre de 86 voix requises au premier tour.

Le député de Zghorta et candidat à la présidentielle Michel Moawad est arrivé en tête avec 36 voix contre 11 pour Salim Eddé. On compte également alors 63 votes blancs (Hezbollah, Amal, Courant patriotique libre, Rassemblement national indépendant) et 12 invalidés.

Le second tour devant être lancé, plusieurs députés, notamment ceux du Hezbollah et de son allié le Courant patriotique libre (CPL) sortent de l’hémicycle. Le quorum de 65 députés exigé au second tour pour la tenue de la séance n’étant donc pas atteint, celle-ci est donc annulée et reportée à une date ultérieure.

Séance du 13 octobre 2022

Ce jour-là, sur les 128 députés, seuls 71 ont fait acte de présence. Parmi les absents, on compte principalement les députés du CPL, du Hezbollah et du mouvement Amal. Faute de quorum, la séance est alors levée.

Séance du 20 octobre 2022

Nouveau rendez-vous place de l’Étoile. Cette fois, le quorum est assuré. La séance demeure toutefois vaine. Sur les 119 députés présents dans l’hémicycle, 42 ont voté pour Michel Moawad, 17 pour le “nouveau Liban”, un pour Milad Abou Malhab (alors candidat à la présidence) et 55 ont déposé des bulletins blancs. Quatre voix ont été annulées. Au second tour, le scénario est similaire à celui de la première séance du 29 septembre, du fait du boycott opéré par le Hezbollah et ses alliés.

Séance du 24 octobre 2022

Le sort de cette quatrième séance est le même. Le nombre de voix favorables à Michel Moawad chute de 3 par rapport aux résultats du 20 octobre. D’où un total de 39 votes sur 114. Dix voix sont, par ailleurs, accordées au professeur Issam Khalifé et 13 pour le “nouveau Liban”. Cinquante bulletins blancs sont alors dépouillés et deux ont été annulés.

Séance du 10 novembre 2022

Une nouvelle figure apparaît lors de cette séance, quand bien même n’étant pas candidat déclaré à la présidence. Il s’agit de celle de l’ancien ministre de l’Intérieur, Ziad Baroud, qui bénéficie d’une voix que lui accorde le vice-président de la Chambre, Élias Bou Saab. On compte en cette journée du 10 novembre 20 absences. Sur les 108 présents, 44 ont opté pour Michel Moawad, qui a bénéficié des voix d’une grande partie de l’opposition, dont les Forces libanaises, le Parti socialiste progressiste et les Kataëb.

Parmi les participants, 47 ont voté blanc (encore et toujours le Hezbollah et ses alliés), 6 pour le professeur Issam Khalifé, 1 pour Ziad Hayek, ancien secrétaire général du Haut Conseil pour la privatisation et les partenariats (HCPP), 7 pour “le nouveau Liban”, 1 “pour le Liban”. Un vote "Plan B" a été annulé.

Après la perte du quorum nécessaire pour le second tour, une nouvelle séance est alors annoncée pour le 17 novembre.

Séance du 17 novembre 2022

Sur les 112 députés qui ont voté au premier tour, 43 ont donné leur voix à Michel Moawad, 7 au professeur Issam Khalifé, 3 à l’ancien ministre Ziad Baroud, 46 ont voté blanc et 10 votes ont été annulés.

La surprise de la séance a été le dépôt dans l’urne et pour la première fois depuis le 29 septembre 2022, d’un bulletin portant le nom de l’ancien chef des Marada, Sleiman Frangié, candidat du duo Hezbollah-Amal.

La session est alors clôturée et, faute de quorum, puisque les députés du CPL et du Hezb se sont retirés, le second tour est annulé.

Séance du 24 novembre 2022

Il s’agit d’une septième séance, lors de laquelle le nom de Sleiman Frangié ne ressort pas. Le député de Zghorta Michel Moawad remporte 42 voix sur 110 contre 6 au profit du professeur Issam Khalifé. Deux députés ont voté pour l’ancien ministre Ziad Baroud, 8 pour “le nouveau Liban” et un pour l'ancien directeur des Douanes, Badri Daher, proche du CPL et alors incarcéré dans le cadre de l'enquête sur l'explosion au port de Beyrouth. Les votes blancs sont au nombre de 50. Un bulletin est annulé.

Séance du 1er décembre 2022

Michel Moawad perd le soutien des députés sunnites pro-Hariri et voit son score passer de 42 à 37 voix. Sur les 111 députés présents à la séance, 52 votent blanc. Ce sont ceux affiliés au Hezb et à ses alliés qui ne parviennent pourtant pas à s’accorder sur un nom. Alors que le duo chiite avance la candidature de Sleiman Frangié, le CPL, lui, tente de lui bloquer la voie.

Par ailleurs, le professeur Issam Khalifé recueille 4 voix, contre 2 pour Ziad Baroud, 1 pour Badri Daher et 1 à l’intention de l’homme d’affaires et candidat déclaré Béchara Abi Younès. L’on compte aussi 14 votes nuls.

Séance du 8 décembre 2022

L’acharnement persiste. Comme celles qui l’ont précédée, cette neuvième séance est un échec. Aucun candidat n’est élu. Si le second tour a été boycotté, empêchant le quorum d’être atteint, le premier tour, lui, s’est soldé par un total de 105 votes, dont 39 à Michel Moawad, 1 à Ziad Baroud, 3 à l'ex-patron des Douanes Badri Daher, 1 au candidat officiel Fawzi Bou Malhab, 1 à l'ex-député et candidat officiel Salah Honein et 5 au professeur Issam Khalifé. Trente-neuf bulletins blancs ont été, en outre, recueillis de l’urne et 16 ont été annulés.

Séance du 15 décembre 2022

Après décompte des voix, aucune majorité n’est atteinte. Sur les 109 voix, 38 ont été en faveur de Michel Moawad, 8 de Issam Khalifé, 2 au profit de Ziad Baroud, 2 pour le compte de Salah Honein, une pour Fawzi Bou Malhab et 1 pour Chafic Merhi, un ex-responsable douanier au port, en détention dans le cadre de l'enquête sur l'explosion du 4 août 2022. On compte alors 37 votes blancs et 20 nuls.

Comme à l’accoutumée, les députés du Hezb et ses alliés se retirent de la séance à l’issue du dépouillement du premier tour, provoquant une perte du quorum pour le second tour.

Séance du 19 janvier 2023

Aucun résultat définitif à l’issue de cette onzième séance. La situation demeure bloquée avec 34 voix pour Michel Moawad sur les 111. Sept députés ont accordé leur suffrage au professeur Issam Khalifé, 2 à l’ancien ministre Ziad Baroud, 1 à Salah Honein et au candidat officiel Milad Bou Malhab. Par ailleurs, 14 députés ont opté pour “le nouveau Liban” et 37 ont déposé des bulletins blancs.

Séance du 14 juin 2023

Douzième (et avant-dernière?) séance. Vaine et infructueuse. Si le nombre total des députés ayant participé n’a pas été confirmé, certains estimant que 128 étaient présents, d’autres suggérant 127, il n’en demeure pas moins que la bataille électorale s’est annoncée assez intense. Avec 59 voix, l’ancien ministre des Finances surpasse le candidat du Hezbollah, Sleiman Frangié, qui, lui, bénéficie de 51 voix. Six députés votent pour Ziad Baroud, 8 pour “le nouveau Liban”, un pour le commandant en chef de l’armée, Joseph Aoun. Un bulletin blanc est retiré de l’urne et un autre est annulé.

On rappelle à cet égard qu’en date du 26 avril, l’ancien chef des Marada, Sleiman Frangié, pose sa candidature à la présidence lors d’un entretien télévisé. Le 4 juin, soit 10 jours avant la 12e séance, le député Michel Moawad annonce le retrait de sa candidature et le soutien de 32 députés de l’opposition à Jihad Azour. Le chef du CPL, Gebran Bassil, se déclare également favorable à M. Azour.

Depuis cette date du 14 juin 2023, aucune séance électorale n’a plus eu lieu. Si les perspectives d'un accord semblent incertaines, laissant planer une incertitude sur l’avenir immédiat du Liban, l’on se demande si au lendemain du 9 janvier le palais de Baabda continuera de rester inoccupé…

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