"Un projet inouï qu'il faut continuer à accomplir": pour les 10 ans de la Philharmonie de Paris, son directeur général Olivier Mantei prévoit de l'ouvrir davantage, de renforcer les expérimentations musicales ou encore de promouvoir les femmes cheffes d'orchestre.
La salle de concert construite dans l'est de Paris par l'architecte Jean Nouvel et couplée à la Cité de la musique – qui souffle, elle, ses 30 bougies – a été inaugurée le 14 janvier 2015. À l'époque, les mauvaises langues prédisaient une désertion du public mélomane habitué à la salle Pleyel située dans le quartier huppé du 8e arrondissement, tandis que fusaient les critiques sur le coût du projet (400 millions d'euros, sans compter les intérêts de l'emprunt, selon la Cour des comptes).
Dix ans plus tard, avec sa salle qui a pris le nom du compositeur Pierre Boulez (2.400 à 3.600 places), son père spirituel, la Philharmonie "est une des salles les plus fréquentées au monde par les artistes", s'enthousiasme Olivier Mantei, rencontré par l'AFP.
"D'une part parce qu'on y invite beaucoup de formations et de solistes, mais aussi parce qu'il y a une appétence des chefs et des orchestres pour venir dans un lieu qui est une réussite", avec une acoustique permettant que "l'intimité côtoie le grandiose", selon lui.
L'Orchestre de Paris est, depuis 2019, intégré à la structure, laquelle accueille par ailleurs quatre autres phalanges en résidence, dont Les Arts Florissants et l'Ensemble intercontemporain. Environ 500 musiciens se croisent chaque jour.
Avec une programmation des plus éclectiques – musique classique, rap, jazz, musiques du monde, mais aussi danse, bals, expositions sonores, etc. –, elle a en outre "gagné un public ancré dans l'Est parisien et les communes de Seine-Saint-Denis alentour", assure M. Mantei.
"Baby-boom"
En 2014, le duo Salle Pleyel-Cité de la musique avait accueilli 700.000 visiteurs pour des concerts ou des spectacles. Un an après l'ouverture de la Philharmonie, ce nombre était passé à 1,2 million. "Aujourd'hui, on est à presque 1,5 million, avec un taux de remplissage de 92 %, sur 450 levers de rideau par an", dit-il.
L'établissement est bien plus qu'une salle de concert : il propose aussi des salles de répétition, studios d'enregistrement, expositions sonores, une médiathèque musicale, des éditions, un espace d'éveil pour les 4-10 ans, des projets d'éducation sociale, des conférences, une radio expérimentale...
De quoi aussi attirer les moins de 28 ans, qui représentent désormais 10 % du public, selon le directeur. Il observe un "baby-boom philharmonique", une génération d'enfants qui ont suivi des ateliers spécifiques petits et qui aujourd'hui basculent naturellement dans les salles de concert.
Autre sujet de fierté : le programme "Démos" (prêt d'un instrument, répétitions) qui permet aux enfants issus de quartiers prioritaires de jouer en orchestre. Il compte une cinquantaine d'orchestres aux quatre coins de la France et a profité à 12.000 enfants depuis 2010.
Pour la suite, Olivier Mantei, nommé en 2021 pour cinq ans, se fixe de "progresser encore, en matière d'accessibilité, de diversité, d'écoresponsabilité et d'égalité".
Sur ce dernier point, une nouveauté est prévue lors de l'édition 2026 du concours de cheffes d'orchestre "La Maestra", qui ambitionne de féminiser les pupitres : les sélectionnées pour la finale dirigeront l'Orchestre de Paris pour une œuvre symphonique.
"Nous allons aussi créer un nouveau festival, Explore, de création-composition et d'expérimentations musicales, en partenariat avec les huit centres nationaux de musique", ajoute-t-il.
Un projet d'école supérieure pour former les managers aux métiers de la musique est par ailleurs en gestation.
En 2025, l'établissement, qui fonctionne à 50 % avec des subventions publiques et à 50 % avec ses ressources propres, "sera à l'équilibre", assure son directeur, qui se félicite pourune "hausse de 17 % de la billetterie et 65 % du mécénat" l'an dernier.
Pour son anniversaire, la Philharmonie prévoit jusqu'au 14 janvier plusieurs concerts de musique classique avec les chefs d'orchestre stars Gustavo Dudamel et Simon Rattle, mais aussi une "nuit électro", un concert du rappeur Prince Waly et des activités pour enfants et familles.
Avec AFP
Commentaires