![Les prix de l’immobilier: d’hier à aujourd’hui, qu’est-ce qui a changé ?](/images/bibli/1920/1280/2/liliane-3.jpg)
Quelle est aujourd’hui la valeur du mètre carré bâti à Beyrouth, au Mont-Liban et dans le reste du pays? Une question que se posent de nombreux Libanais, alors que le pays oscille entre guerre et paix, et au lendemain d’un conflit entre le Hezbollah et Israël qui a détruit plus de 22.000 unités résidentielles, principalement concentrées dans la banlieue sud de Beyrouth et le sud du Liban.
Le marché immobilier libanais est actuellement marqué par un décalage (mismatching) entre les attentes des vendeurs et celles des acheteurs. Tandis que les vendeurs anticipent une hausse des prix, portée par l'espoir d'un redressement économique après l'élection d'un président, mettant fin à plus de deux ans et demi de vacance du pouvoir, les acheteurs, quant à eux, perçoivent un marché toujours stagnant.
Un marché de l’immobilier segmenté
Le marché immobilier n'est ni en récession ni totalement revitalisé. Il est toutefois essentiel de rappeler qu'il ne s'agit pas d'un marché homogène, mais plutôt d'un secteur divisé en deux segments principaux. D'un côté, le marché de la prime location, qui regroupe les biens prisés situés dans des emplacements centraux, tels que Verdun, Ramlet el-Baida, Ras-Beyrouth, le Centre-ville, Achrafieh, ou dans des lieux de villégiature, comme Faqra, Faraya, Batroun et Amchit, ces deux dernières zones offrant souvent un accès direct à la mer. De l'autre, le marché périphérique, qui concerne les biens situés en dehors de ces zones privilégiées.
Selon Walid Moussa, président du Syndicat des agents et des consultants immobiliers au Liban (R.E.A.L.), interrogé par Ici Beyrouth, les prix des logements en prime location restent d’environ 20% inférieurs à leur niveau d’avant 2019, tandis que ceux des zones périphériques accusent une baisse plus marquée, atteignant 35%. Il attribue cette disparité à l’affaiblissement du pouvoir d’achat des résidents des zones périphériques, ce qui pèse sur la demande. Celle-ci est d’autant plus affectée par l’absence de crédits immobiliers, habituellement accordés dans des conditions normales par les banques commerciales, l’Établissement public de l’habitat (EPH) et la Banque de l’habitat.
Dans ce contexte, Walid Moussa précise que l’ajustement progressif des prix des logements en prime location ne dépend pas directement du volume des transactions conclues. En effet, dans ce segment, les propriétaires de résidences haut de gamme ont tendance à augmenter leurs prix, indépendamment de la demande, dans la mesure où ils ne sont pas contraints de vendre rapidement.
Un indice des prix de l’immobilier
Interrogé sur la question, Walid Moussa explique que R.E.A.L. a mis en place un indice d’évaluation des prix des logements. Cet indice composite, mis à jour tous les six mois, est calculé à partir des données fournies par les membres de R.E.A.L. via un questionnaire, ainsi que des informations recueillies sur la plateforme Dubizzle.
Cet indice reste accessible aux membres de R.E.A.L. et est partagé avec certains partenaires, tels que les mohafazats, leur permettant notamment d’évaluer la valeur locative des zones sous leur juridiction.
D’une manière générale, la valorisation d’un bien immobilier repose sur trois éléments: un tiers correspondant au coût du terrain, un tiers au coût de construction et un tiers à la plus-value réalisée. Toutefois, cette répartition varie en fonction du marché, de la localisation, du type de projet et d’autres facteurs économiques.
Ralentissement sans précédent en 2024
Bien que la situation soit restée fragile, le secteur immobilier a conservé un certain dynamisme jusqu’aux premiers mois de 2024, porté par les perspectives des investisseurs. Entre 2020 et 2023, cette activité était principalement stimulée par la demande d’expatriés et d’étrangers à hauts revenus. Ces derniers, attirés par des prix jugés “relativement abordables”, misaient sur une future valorisation, malgré l’adaptation progressive de l’économie libanaise à de nouvelles réalités.
Cet élan a cependant marqué un ralentissement avec le déclenchement de la guerre de soutien à Gaza, en octobre 2023, avant de s’interrompre brutalement lorsque le conflit entre le Hezbollah et Israël s’est étendu au Liban.
Par ailleurs, la dollarisation croissante de larges pans de l’économie et l’inflation qui en a découlé ont exclu une grande partie des résidents libanais du marché immobilier, en rendant les prix inaccessibles, en particulier pour ceux dont les revenus sont en livres libanaises.
-59,3% de ventes immobilières
De janvier à novembre 2024, la valeur totale des ventes immobilières a diminué de 59,3%, atteignant 2,5 milliards de dollars, contre 6,1 milliards de dollars sur la même période l'année précédente. La valeur moyenne des transactions a également chuté de 74,5%, s'établissant à 78.008 dollars sur les onze premiers mois de 2024. Cette baisse a été particulièrement marquée dans des régions telles que Beyrouth, le Liban-Sud et Nabatiyé, avec des diminutions comprises entre 70,1% et 81,6%. En revanche, le recul a été moins prononcé dans le nord du Liban et la Békaa, où les baisses ont oscillé entre 26,5% et 42,8%. Ces chiffres ne sont pas étonnants lorsque l’on sait que l’indice de l’investissement rapporté au PIB a atteint moins de 10%.
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