
Les relations commerciales entre le Liban et l'Arabie saoudite ont longtemps été prospères, avec des exportations libanaises atteignant plus de 800 millions de dollars par an et des importations saoudiennes de 1,3 milliard de dollars. Toutefois, les tensions politiques ont lourdement affecté ces échanges, entraînant une réduction de plus de la moitié de leur volume et une perte considérable de revenus pour le Liban. La visite du président de la République, Joseph Aoun, à Riyad pourrait-elle marquer le début d’un nouveau chapitre pour la reprise tant attendue de ces relations bilatérales?
L'Arabie saoudite a toujours été un partenaire commercial clé pour le Liban. Avant la détérioration des relations en 2021, les exportations libanaises vers le Royaume étaient substantielles, constituant une source essentielle de revenus et d'injection de devises étrangères dans l'économie libanaise. Le rétablissement de relations économiques et commerciales normales entre les deux pays “devrait marquer un véritable tournant pour l'exportation des produits libanais vers l'Arabie saoudite”, a expliqué à Ici Beyrouth le directeur général du ministère de l’Économie, Mohammad Abou Haidar, avant de préciser que “l'Arabie saoudite représentait environ 10% des exportations totales du Liban, avec des échanges commerciaux annuels avoisinant les 800 millions de dollars”. Selon lui, la reprise des relations normales pourrait permettre de doubler ce chiffre.
“Au cours des deux dernières années, un terrain fertile a été préparé pour la mise en œuvre d'une série d’accords, 22 au total, entre le Liban et le Royaume”, a-t-il indiqué. Ces accords couvrent plusieurs secteurs, comme suit:
- Un accord de coopération commerciale entre le Liban et l'Arabie saoudite.
- Un accord de coopération en matière d'expositions.
- Un accord de coopération dans le domaine de la propriété intellectuelle.
- Un accord de coopération pour la protection des consommateurs.
- Un accord de coopération dans le secteur des céréales.
- Un accord de coopération dans les domaines de l'environnement, de l'agriculture et de l'eau.
- Un accord de coopération avec le ministère de l'Information.
- Un accord de coopération en matière d'éducation et d'enseignement supérieur.
- Un accord de coopération dans le domaine culturel, en lien avec Dar el-Fatwa.
- Un accord de coopération dans le secteur du logement.
- Un accord de coopération pour l'investissement dans le domaine du transport maritime.
- Un accord de reconnaissance mutuelle des certifications de compétences liées aux exportations.
- Un accord de coopération pour le transport de passagers et de marchandises à travers les frontières terrestres.
- Un accord de coopération en matière de défense civile.
- Un accord de coopération judiciaire.
- Un accord de coopération entre la Banque du Liban et l’Autorité monétaire de l'Arabie saoudite.
- Un accord pour renforcer la coopération technique dans le domaine des normes, des laboratoires et des systèmes de qualité.
- Un accord de coopération douanière.
- Un accord de coopération en matière de défense militaire.
- Un accord de coopération pour la lutte contre le terrorisme.
- Un accord de coopération pour éviter la double imposition et l'évasion fiscale.
- Un accord de coopération entre les autorités de l'aviation civile du Liban et de l'Arabie saoudite.
Le principal objectif de ces accords, dont certains détails juridiques et logistiques restent à régler, est de soutenir le Liban dans sa démarche vers le développement, en le positionnant sur la voie des pays développés.
M. Abou Haidar a estimé que la signature et l'annonce des accords renforceront considérablement la confiance dans le Liban et donneront un énorme coup de pouce à l'économie, attireront les investissements étrangers, encourageront la croissance économique, créeront des opportunités d'emploi, réduiront le taux de chômage, amélioreront le pouvoir d'achat des citoyens, ouvriront des marchés commerciaux avancés pour le Liban, qui aura l'opportunité d'augmenter ses exportations après la réouverture du marché saoudien et ouvrira la voie à d'autres marchés du Conseil de coopération du Golfe (CCG).
De plus, l'augmentation des exportations entraînera une nouvelle injection de devises fortes dans le pays, contribuant ainsi à raviver le secteur bancaire et à restaurer la confiance en lui, notamment grâce à l'accord de coopération entre la Banque centrale et l'Autorité monétaire de l'Arabie saoudite. Il a également insisté sur l'importance du retour des touristes saoudiens et du Golfe au Liban dès que les relations entre les deux pays retrouveront leur normalité. Dans ce cadre, il convient de rappeler qu’avant les restrictions de 2021, les touristes saoudiens (200.000 environ par an) étaient des consommateurs importants pour l'économie libanaise. En moyenne, chaque touriste saoudien dépensait 5.000 à 10.000 dollars pendant son séjour au Liban. Ces dépenses comprenaient l'hébergement, la restauration, les loisirs, ainsi que les achats, ce qui constituait une part significative des recettes du secteur touristique libanais.
L'Arabie saoudite compte également près de 250.000 Libanais expatriés qui travaillent dans des domaines aussi variés que les finances, le secteur bancaire, la construction, la santé, les médias et le tourisme. Ces derniers ont transféré au Liban, en 2023, 6,7 milliards de dollars, soit 30,7% du PIB du pays, plaçant ainsi le pays parmi ceux affichant les plus hauts ratios de transferts de fonds par rapport à leur PIB.
Il convient de rappeler que les relations entre le Liban et l'Arabie saoudite se sont détériorées, fin 2021, lorsque le ministre de l'Information de l’époque, Georges Cordahi, avait critiqué l'implication de l'Arabie saoudite dans la guerre au Yémen. En réponse, le Royaume a décidé de suspendre toutes les importations en provenance du Liban. L'Arabie saoudite ne voyait plus d'intérêt à maintenir des relations avec le Liban, en raison de la “domination du Hezbollah sur la scène politique” et “la réticence des dirigeants libanais à entreprendre les réformes requises”. Les flux commerciaux entre les deux pays ont également été affectés par la saisie de pilules de Captagon dissimulées dans des légumes libanais à destination du Royaume.
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