
Le Liban-Sud a connu une intensification des frappes israéliennes ce dimanche, en réponse aux récentes déclarations du Hezbollah réaffirmant son refus de se désarmer. Alors que les tensions s'exacerbent, ces attaques pourraient également être perçues comme une réponse israélienne à la politique du Hezbollah, mettant en lumière le fragile équilibre entre l'État libanais et la milice pro-iranienne, qui semble de plus en plus déconnectée des réalités géopolitiques de la région.
Le Liban-Sud a connu dimanche l’une des journées les plus violentes depuis le cessez-le-feu. En multipliant les frappes ciblées sur plusieurs positions présumées du Hezbollah, l’armée israélienne a franchi un nouveau seuil dans l’escalade en cours. Cette offensive intervient quelques jours seulement après les déclarations du secrétaire général du Hezbollah, Naïm Qassem, qui a réaffirmé le refus catégorique de son groupe de se désarmer, soulignant que le Hezbollah «ne permettra à personne de le désarmer», même sous la pression de Washington ou d’Israël.
Les propos de Qassem, tout comme ceux de Wafiq Safa, ont été perçus comme une provocation directe. Tous deux ont insisté sur le maintien de l’arsenal militaire du Hezbollah, déclarant qu’aucune force ne saurait «désarmer la résistance» – une posture est en rupture avec la position officielle de l’État libanais, réaffirmée dans le discours d’investiture du président Joseph Aoun et dans la déclaration ministérielle, lesquelles insistent sur le fait que seul l’État libanais doit détenir le monopole des armes.
Une réponse israélienne ciblée
Des observateurs estiment que cette résistance au désarmement reflète une forme de déni de la réalité de la part du Hezbollah qui semble ignorer les revers qu’il a subis ces derniers mois. En dépit des difficultés militaires récentes, notamment face à la pression et l’action militaire israélienne ainsi qu’à un isolement international croissant, la formation pro-iranienne cherche à préserver son pouvoir militaire et son influence politique au Liban, quitte à mettre en péril l'avenir du pays. Le Hezbollah continue de parier sur les négociations irano-américaines, jugées comme une issue favorable par certains diplomates, bien que cette stratégie de maintien du statu quo semble de plus en plus risquée.
Les dernières frappes israéliennes ont visé des sites stratégiques du Hezb, tels que Sajad, Louaizé, et Jabal Safi, entre autres, endommageant des infrastructures utilisées pour stocker des missiles et des plateformes de lancement. D’une intensité inédite depuis le 18 février, cette série d’attaques marque un tournant. En frappant des positions cruciales du Hezbollah, Israël cherche à perturber l’approvisionnement en armement du groupe et à affaiblir sa capacité de projection militaire. Mais ces frappes s’inscrivent aussi dans une logique politique, constituant une réponse directe aux déclarations publiques des dirigeants du Hezbollah.
Parallèlement, un drone israélien a frappé un véhicule dans le village de Kaouthariyat el-Siyad, tuant un membre du Hezbollah et blessant deux autres personnes. Cette frappe ciblée fait partie d’une série d’opérations israéliennes destinées à affaiblir les capacités militaires du groupe et à liquider ses cadres.
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Le Liban à un carrefour
Face à ces événements, le Liban reste confronté à un dilemme structurel: celui de concilier sa souveraineté d’État avec l’existence d’un acteur non étatique, le Hezbollah. Le président Joseph Aoun a récemment réaffirmé son opposition à toute intégration du groupe armé au sein de l’armée nationale, déclarant qu’il «ne souhaitait pas reproduire l’expérience du Hachd el-Chaabi en Irak», où des milices pro-iraniennes influencent directement les rouages de l’État.
Selon des sources libanaises bien informées des discussions en cours, la seule issue jugée «réaliste» par certains responsables serait la dissolution progressive de l’appareil militaire du Hezbollah, dans le cadre d’un processus de réintégration au sein des structures étatiques. Mais une telle option est-elle réellement envisageable? Et qui garantirait que le Hezbollah renoncera à s’aventurer face à Israël ?
Le Liban se trouve ainsi à un carrefour décisif. Le pays est confronté à une dualité de plus en plus insoutenable: l’État d’un côté, et le Hezbollah de l’autre. La question demeure: combien de temps encore le Liban pourra-t-il maintenir cet équilibre précaire? Et à quel prix pour son avenir?
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