
Entre champignon envahissant et météo capricieuse, la pomme libanaise a du mal à garder le cap. Dans les vergers des montagnes libanaises, un ennemi invisible ronge lentement feuilles, fleurs et fruits: la fameuse gale du pommier. Cette année, comme si cela ne suffisait pas, la sécheresse s’invite à la fête, affaiblissant les arbres et compliquant la tâche des producteurs. Mais les arboriculteurs ne baissent pas les bras: prévention, persévérance et passion restent leurs meilleures armes.
Au Liban, on ne plaisante pas avec la pomme. Elle trône fièrement sur les étals, incarne la fraîcheur des montagnes libanaises et représente une part importante de l’agriculture locale. Mais derrière sa peau lisse peut se cacher un véritable drame végétal: la gale du pommier, «ou plus précisément Venturia inaequalis, un champignon qui n’a rien de poétique», explique un producteur de pommes à Ici Beyrouth. «Un nom barbare pour un champignon sournois qui s’attaque aux feuilles, fleurs, branches, et surtout aux fruits, provoquant taches sombres, déformations et chutes prématurées».
Dans les régions froides et humides comme le Haut-Metn, le Akkar et la Békaa, où la pomme pousse naturellement bien, ce parasite prospère en toute discrétion. Il hiverne dans les feuilles mortes, puis revient avec vigueur dès que l’humidité pointe le bout de son nez au printemps. Son terrain de jeu préféré? «Les vergers mal aérés, trop denses ou mal entretenus. Une infection peut ruiner jusqu’à 30% de la récolte», poursuit le producteur.
Et comme un malheur ne vient jamais seul, cette année, c’est la sécheresse qui est venue compliquer la vie des arboriculteurs. Les précipitations hivernales ont été parmi les plus faibles depuis une décennie. Résultat: nappes phréatiques en berne, stress hydrique généralisé et vergers affaiblis, donc plus vulnérables à la fameuse gale. Quand la pluie ne tombe pas, les arbres sont en détresse: production réduite, fruits plus petits et une texture moins croquante.
La meilleure défense, comme souvent en agriculture, c’est la prévention. Le cultivateur explique qu’il faut une combinaison de bonnes pratiques agricoles et de traitements phytosanitaires. Il faudrait par exemple nettoyer le verger en ramassant les feuilles et les branches tombées, tailler correctement les arbres pour améliorer l’aération ou encore effectuer un traitement cuivré en hiver avant le bourgeonnement. On pourrait aussi planter, si possible, des variétés résistantes, appliquer un programme de pulvérisation préventive au printemps avec des fongicides comme le difénoconazole ou le tébuconazole.
Impact sur la production et les exportations
«Le Liban consacre environ 16.000 hectares à la culture du pommier, notamment dans les régions montagneuses. La production annuelle avoisine les 150.000 tonnes, faisant de la pomme l’un des fruits les plus cultivés et exportés du pays», poursuit le producteur de pommes.
Les principaux marchés? La Jordanie et l’Égypte. «Mais la gale du pommier peut faire perdre jusqu’à 30% de la récolte, ce qui réduit les marges, compromet l’exportation et pousse certains producteurs à abandonner cette culture», déplore-t-il.
Et comme les marchés étrangers n’aiment pas les pommes «tatouées», les fruits abîmés se retrouvent souvent relégués à la consommation locale… voire pas consommés du tout.
La pomme est un symbole de la ruralité, un pilier de l’économie agricole et une fierté nationale. Mais entre climat capricieux et champignons rebelles, les producteurs doivent redoubler d'efforts pour offrir des fruits de qualité.
Heureusement, avec une bonne dose de prévention, un suivi agronomique sérieux et un brin de passion, la pomme libanaise peut continuer à rougir... de succès!
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