Mollahs Inc.: les tentacules iraniennes et le «shadow banking»
©Ici Beyrouth

Alors que les discussions sur le nucléaire iranien peinent à avancer, Washington s’attaque à un autre front: l’argent. Les États-Unis ont annoncé vendredi des sanctions contre plus d’une trentaine d’individus et d’entités impliqués dans un vaste réseau de blanchiment d’argent au profit du régime iranien.

Ce réseau de «shadow banking» – un système bancaire parallèle et clandestin – opère à travers des maisons de change iraniennes et des sociétés écrans à l’étranger afin de contourner les sanctions internationales visant Téhéran.

Un réseau clandestin pour financer le régime iranien

D'après le Trésor américain, plus d'une trentaine d'entités et d'individus liés aux trois frères iraniens Mansour, Nasser et Fazlolah Zarringhalam ont été sanctionnés pour avoir blanchi des milliards de dollars via des maisons de change en Iran et de multiples sociétés-écrans à l'étranger, faisant transiter clandestinement les fonds issus de la vente de pétrole iranien et d'autres marchandises sanctionnées.

Ce stratagème, qualifié de «shadow banking», permet aux mollahs d'échapper aux sanctions et de financer leurs programmes nucléaire et balistique, ainsi que leurs alliés dans la région.

Le shadow banking iranien, mode d’emploi

Le shadow banking, ou «banque de l’ombre», désigne de manière générale les activités d’intermédiaires financiers non bancaires qui opèrent en dehors du système bancaire traditionnel.

Dans le cas de l’Iran, il s’agit d’un véritable système bancaire parallèle, étendu sur plusieurs juridictions, conçu pour contourner les sanctions internationales et faciliter des flux financiers souvent illicites.

Ce réseau repose sur plusieurs mécanismes. D’abord, des maisons de change iraniennes qui servent d’intermédiaires pour les transactions internationales en contournant les restrictions imposées aux banques officielles.

En parallèle, des sociétés-écrans sont établies dans des pays à faible surveillance réglementaire, comme les Émirats arabes unis ou Hong Kong. Ces entreprises de façade détiennent des comptes bancaires internationaux et réalisent des paiements pour le compte de clients iraniens sanctionnés, permettant à ceux-ci d’échapper au contrôle des autorités financières.

Pour donner une apparence légitime à ces transferts, de faux documents sont produits, notamment pour des marchandises sous embargo.

De plus, les sociétés offshore utilisent des comptes bancaires multidevises afin de convertir, dissimuler et transférer les revenus issus de ces activités, notamment les ventes de pétrole.

Ce système parallèle permet à l’Iran de continuer à exporter ses ressources et à importer des biens interdits.

Le rôle clé des frères Zarringhalam

Au centre de cette affaire se trouvent les frères Mansour, Nasser et Fazlolah Zarringhalam, identifiés comme les animateurs du réseau.

D'après le Trésor américain, ceux-ci ont utilisé un ensemble de sociétés-écrans, basées aux Émirats arabes unis et à Hong Kong, pour aider des responsables du régime iranien et des hommes d'affaires qui leur sont affiliés à encaisser discrètement le produit de la vente de pétrole et d'autres marchandises sanctionnées.

Leur réseau a servi de plaque tournante aux principaux exportateurs iraniens de pétrole, ainsi qu'aux forces armées iraniennes, leur permettant d’éviter les contrôles et de récupérer les paiements liés à ces ventes.

Les sanctions de vendredi visent ainsi de nombreux collaborateurs et entités associées à ce réseau, notamment des compagnies écrans basées à Dubaï et à Hong Kong. Leur inscription sur la liste noire américaine entraîne le gel de leurs avoirs aux États-Unis et leur exclusion des circuits financiers en dollars.

Vigilance accrue et contexte sécuritaire

Ces sanctions s'accompagnent d'une mise en garde aux institutions financières internationales.

Le même jour, le réseau de lutte contre les crimes financiers du Trésor américain (FinCEN) a diffusé un communiqué actualisé mettant en garde contre les schémas de contrebande de pétrole, de shadow banking et d'acquisition illicite de matériels sensibles par l'Iran, afin de renforcer la vigilance du secteur financier face à de telles pratiques.

Sur le plan politique, cette action s'inscrit dans une stratégie américaine de «pression maximale» face à l'Iran. Le 4 février dernier, un mémorandum présidentiel sur la sécurité nationale a ordonné de renforcer la campagne de sanctions pour couper les financements du régime iranien.

L'objectif affiché par Washington est de priver l'Iran de l'accès aux circuits financiers mondiaux tant que Téhéran poursuivra ses activités déstabilisatrices (programme nucléaire, missiles, soutien à des groupes armés).

En annonçant ces nouvelles mesures, les États-Unis réaffirment leur volonté d'étouffer les réseaux financiers parallèles du régime iranien, dans le but de contraindre ce dernier à changer de comportement sur la scène internationale.

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